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Mobilisation pour sauver des pans du Mur de Berlin

Des policiers face aux manifestants devant l'East Side Gallery, à Berlin, le 28 février 2013 [Odd Andersen / AFP] Des policiers face aux manifestants devant l'East Side Gallery, à Berlin, le 28 février 2013 [Odd Andersen / AFP]

Des habitants se mobilisent pour sauver l'un des derniers vestiges du Mur de Berlin, symbole honni de la Guerre froide durant 28 ans, menacé d'être amputé pour permettre de nouveaux aménagements urbains.

Environ 200 manifestants ont interrompu vendredi les travaux de percement d'une brèche dans le plus long vestige du Mur, l'East Side Gallery, un tronçon de plus d'un kilomètre décoré de fresques, a constaté l'AFP.

Des dizaines de policiers faisaient face aux protestataires qui avaient commencé à se rassembler à l'aube avec des pancartes, certains poussant des huées après qu'une grue eut retiré un premier panneau de quelques mètres de large. Afin de calmer la situation, la police a annoncé la suspension des travaux "pour la journée et jusqu'à nouvel ordre".

"C'est un mémorial de la Guerre froide qui rappelle le temps où l'Allemagne était divisée!", s'emporte Sascha Disselkamp, patron d'un club et d'un restaurant berlinois. "On ne doit pas permettre que soient construits un immeuble d'habitation et un hôtel" de luxe à un endroit où des gens sont morts.

Cette figure des nuits berlinoises est l'un de ceux qui se rebiffent contre le projet de la Ville de percer une partie de l'East Side Gallery, coincée entre une voix rapide et la Spree, la rivière qui traverse Berlin et marqua pendant 28 ans la frontière entre Berlin-Ouest et Berlin-Est.

Le long de cette avenue sans âme où vrombissent camions et berlines s'étire sur 1,3 kilomètre les pans de béton de 3,6 mètres de hauteur ornés de fresques, devenus l'une des attractions touristiques majeures de la capitale allemande.

Manifestation contre la destruction d'une partie de la East Side Gallery de Berlin, le 28 février 2013 [Odd Andersen / AFP]
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Manifestation contre la destruction d'une partie de la East Side Gallery de Berlin, le 28 février 2013
 

Des restes du Mur, qui sépara Berlin du 13 août 1961 au 9 novembre 1989, il ne reste plus grand chose dans cette ville devenue l'une des capitales les plus en vogue d'Europe. Sur les 155 km de béton qui encerclaient Berlin-Ouest, à peine trois kilomètres sont encore debout.

Le percement de l'East Side Gallery vise à construire un accès direct à une tour d'habitation de grand luxe de 63 m de haut qui doit prochainement sortir de terre sur les berges de la Spree, selon les opposants.

Le promoteur immobilier, la société Living Bauhaus, s'en défend. Percer le Mur s'impose pour des raisons de sécurité, selon son patron, Maik Uwe Hinkel. "Cela n'a rien à voir avec notre immeuble mais avec les directives de l'arrondissement", poursuit-il.

La Ville veut assurer l'accès à un pont pour piétons et cyclistes qui devrait enjamber la Spree d'ici 2015. Une deuxième percée est même envisagée, ce qui ferait disparaître au total environ 30 mètres de l'East Side Gallery.

"On procède à la destruction d'une oeuvre d'art", s'insurge Kani Alavi, un artiste allemand d'origine iranienne qui a peint l'une des fresques et dirige l'Association qui gère le lieu.

Ces restes de l'ancien Mur appartiennent "au patrimoine culturel mondial", renchérit Robert Muschinski qui gère un collectif contre un vaste projet immobilier berlinois.

Des policiers allemands arrêtent un militant lors d'une manifestation devant la East Side Gallery de Berlin, le 28 février 2013 [Odd Andersen / AFP]
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Des policiers allemands arrêtent un militant lors d'une manifestation devant la East Side Gallery de Berlin, le 28 février 2013
 

Plus d'un million de touristes des quatre coins du monde viennent chaque année se faire photographier devant ces restes du Mur. Parmi les fresques les plus connues qui composent l'East Side Gallery: le "Baiser fraternel" entre les dirigeants soviétique Brejnev et est-allemand Honecker, ou les têtes multicolores de l'artiste français Thierry Noir.

Pour ce dernier, il est important de préserver cette galerie à ciel ouvert dans son intégralité car elle donne une idée du caractère spectaculaire de l'édifice. "C'est la dernière possibilité de montrer simplement à la jeune génération: +Ne commettez plus les erreurs de vos parents!+", estime-t-il.

Pour certains Berlinois, la capitale, très endettée, brade ses derniers terrains à des sociétés immobilières avides de gains mais Berlin réplique que la parcelle où doit être construit le nouvel immeuble de grand luxe a été vendue dès le début des années 90.

Depuis plus de 20 ans, le long de la Spree s'est développée la culture alternative qui fait la réputation de Berlin la fêtarde dans le monde entier. Clubs installés dans des anciens entrepôts, bars sur barges en bois, plages de sable importé, on danse ici sans discontinuer du vendredi au dimanche.

Mais la foule festive pourrait bientôt disparaître, emportée avec ces clubs qui ferment les uns après les autres, comme le Kater Holzig, installé dans une ancienne fabrique de savon, qui doit éteindre ses amplis à la fin de l'été.

Quant au Mur, de petits morceaux d'origine douteuse se vendent toujours dans le bric à brac des marchands de souvenirs. Mais le plus souvent, le ciment récupéré a servi à couler des autoroutes et construire des immeubles.

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