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Pakistan : les espoirs nés de l'alternance politique menacés

Le nouveau Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif, le 5 juin 2013 à Islamabad [Aamir Qureshi / AFP/Archives] Le nouveau Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif, le 5 juin 2013 à Islamabad [Aamir Qureshi / AFP/Archives]

Les Pakistanais espèrent que leur nouveau Premier ministre Nawaz Sharif mènera à bien dans le pays autant de projets de développement que dans sa province du Pendjab, mais leurs espoirs pourraient être douchés par la situation budgétaire délicate du pays.

La Ligue musulmane (PML-N), le parti de M. Sharif, a largement remporté les élections générales du 11 mai, en raison notamment de sa force dans son fief du Pendjab, la province la plus riche et la plus peuplée du pays, nourrie par d'importants projets d'infrastructure ces cinq dernières années.

Nouveau système de bus public dans la capitale provinciale Lahore -- le premier du genre dans l'histoire de ce pays né il y a 65 ans--, distribution d'ordinateurs portables et de panneaux solaires aux étudiants, mise en place d'écoles dernier cri dans les campagnes pauvres : toutes ces innovations ont fait des envieux dans un pays aux services publics en déshérence.

Lors de la campagne électorale, Nawaz Sharif et son frère Shahbaz, chef du gouvernement provincial du Pendjab, ont promis des projets similaires au niveau national. Et après cinq ans de pouvoir inefficace du Parti du peuple (PPP), les électeurs ont plébiscité leurs promesses.

A Lahore, le service de bus (Metro Bus) moderne ouvert en février a révolutionné le transport dans cette ville engorgée.

"C'est plus confortable et rapide que les autres moyens de transport. Le gouvernement doit faire la même chose dans d'autres villes", se félicite Hira Farhat, étudiante en pharmacie à l'université du Pendjab.

La PML-N a promis d'installer ce système à Karachi, mégalopole méridionale de près de 20 millions d'habitants, et dans la capitale Islamabad.

Dans son Premier discours depuis qu'il est redevenu Premier ministre -- il l'avait déjà été deux fois dans les années 1990, des mandats teintés de forts soupçons de corruption -- Nawaz Sharif a insisté sur la nécessité d'investir dans les infrastructures, notamment entre son pays et la Chine, sa voisine et alliée.

Le président pakistanais Asif Ali Zardari (à gauche), et le Premier ministre Nawaz Sharif (à droite), le 5 juin 2013 à Islamabad [ / AFP/Archives]
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Le président pakistanais Asif Ali Zardari (à gauche), et le Premier ministre Nawaz Sharif (à droite), le 5 juin 2013 à Islamabad
 

"Tous les projets de développement seront achevés avant la fin de nos cinq ans de mandat", a-t-il promis.

Mais ces projets auront un coût pour un déjà pays déjà plombé par un déficit public de 8,5% en 2012, une croissance de 3,5%, insuffisante selon les économistes pour compenser l'augmentation de la population, et des réserves en devises étrangères qui ont fondu comme peau de chagrin.

Les opposants de la famille Sharif dénoncent des projets selon eux coûteux, tape-à-l'oeil, inégalitaires et plombés par la corruption.

Pour Raja Riaz, ancien chef de l'opposition PPP dans le Pendjab, le Métro bus n'a pas coûté 30 milliards de roupies (230 millions d'euros), comme annoncé par le gouvernement provincial, mais 70 milliards de roupies (256 millions d'euros).

Pour le financer, "ils ont réduit ou détourné des fonds prévus pour le développement d'autres villes et pour l'éducation et la santé", accuse-t-il.

Islamabad doit toujours rembourser au Fonds monétaire international (FMI) plus de 4 milliards de dollars (environ 3 millions d'euros) avant la fin de 2014, et nombre d'économistes estiment que le Pakistan ne pourra faire l'économie d'un nouveau prêt qui serait certainement assorti de conditions contraignantes, notamment une réforme destinée à augmenter les recettes fiscales, qui représentent actuellement moins de 10% du Produit intérieur brut (PIB).

A peine son fauteuil de Premier ministre retrouvé, Nawaz Sharif a indiqué qu'il accepterait l'aide de pays tels que la Chine ou la Turquie. Mais certains économistes réclament plus de réformes pour éviter d'alourdir un déficit déjà inquiétant.

 
 

Pour l'économiste Kaiser Bengali, le gouvernement devrait plus chercher à améliorer l'existant que se lancer dans de nouveaux projets coûteux.

"Nous avions par exemple déjà un réseau de train urbain préexistant à Karachi (tombé en déshérence il y a plus de 20 ans, ndlr). Le gouvernement devrait normalement chercher à le relancer. Mais nos dirigeants veulent toujours dépenser leur argent dans de nouveaux projets à la mode", regrette-t-il.

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