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Syrie: un navire américain prêt à appareiller pour détruire les armes chimiques

Le MV Cape Ray (g), amarré avec ses deux "sister ships" dans le port de la base navale de Norfolk (Virginie, est), le 2 janvier 2014 [Jim Watson / AFP] Le MV Cape Ray (g), amarré avec ses deux "sister ships" dans le port de la base navale de Norfolk (Virginie, est), le 2 janvier 2014 [Jim Watson / AFP]

Dans l'immense cale, les deux usines portables sont déjà fixées au sol et les citernes de stockage ont été embarquées: le navire américain MV Cape Ray n'attend plus que l'ordre d'appareiller pour aller détruire en mer les armes chimiques syriennes.

Ce cargo roulier de 200 mètres de long de la Flotte de réserve et les deux systèmes d'hydrolyse déployable (FDHS), des installations portables capables de "neutraliser" les agents chimiques les plus dangereux, constituent la contribution des Etats-Unis à la coopération internationale mise en oeuvre pour démanteler l'arsenal chimique de Bachar al-Assad.

Pour l'instant, le navire est amarré avec ses deux "sister ships" dans le port de l'immense base navale de Norfolk (Virginie, est).

"J'attends mes ordres d'appareillage", confie le capitaine du navire Rick Jordan, en combinaison de travail blanche et casque de chantier sur le crâne. Il pense les avoir d'ici deux semaines.

Car les opérations ont pris du retard en Syrie, où les autorités étaient censées convoyer quelque 1.290 tonnes d'armes chimiques vers le port de Lattaquié à l'aide de camions et de blindés fournis par la Russie avant le 31 décembre.

Des difficultés logistiques et la météo ont ralenti les opérations, selon l'ONU et l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC).

Les éléments les plus dangereux, dits de "priorité Un" et entrant dans la composition du gaz moutarde et du sarin, doivent être ensuite embarqués à Lattaquié à bord de deux cargos escortés par des navires militaires danois, norvégien et britannique vers un port italien.

Là, ces agents chimiques --700 tonnes selon le sous-secrétaire américain à la Défense Franck Kendall-- seront chargés à bord du Cape Ray qui ira procéder aux opérations de neutralisation dans les eaux internationales. Rick Jordan avoue ne pas encore savoir où.

Dans les entrailles du Cape Ray tout est prêt, les installations pour accueillir 35 membres d'équipage, 63 personnes chargées des opérations de neutralisation, sans compter l'équipe de sécurité, sont en place.

La cale ressemble à un hangar aux trois-quart vide dans lequel trône une immense tente plastifiée blanche dotée de d'un système de filtration.

A l'intérieur, les deux usines de neutralisation, chacune composée d'une cuve dans laquelle seront mélangés les agents chimiques avec de l'eau puis de la lessive et reliée à une multitude de tuyaux et de valves.

Un navire vieux de 36 ans

Si la neutralisation d'agents chimiques en mer est une première, la technologie est éprouvée depuis longtemps, assure Adam Baker, un chimiste du Centre américain pour l'élimination des armes chimiques.

"C'est au fond le même procédé que celui que nous utilisons pour nos propres stocks d'armes chimiques", explique le jeune trentenaire aux boucles blondes.

Le MV Cape Ray (g), amarré dans le port de la base navale de Norfolk (Virginie, est), le 6 mai 2012 [Thoralf Doehring / AFP/Archives]
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Le MV Cape Ray (g), amarré dans le port de la base navale de Norfolk (Virginie, est), le 6 mai 2012

Ce processus doit permettre de détruire les agents chimiques à plus de 99% et d'en réduire la toxicité à des niveaux similaires avec ceux habituels dans l'industrie.

A l'extérieur de la tente, de gros tuyaux verts courent jusqu'à une forêt de valves et six énormes citernes grises, où les produits inertes issus de l'hydrolyse seront stockés le temps de vérifier leur causticité.

Ces "résidus", qui devraient représenter plus de 5.700 tonnes selon Adam Baker, seront ensuite transférés dans d'autres citernes blanches montées sur châssis et déjà à bord sur un pont inférieur.

Ils seront ensuite confiés à des sociétés de traitement spécialisées dans les déchets industriels, tout comme les autres agents chimiques syriens, pour lesquels l'OIAC a lancé un appel d'offre international au secteur privé.

L'ONG française Robin des Bois a fait part de ses inquiétudes face au risque d'une telle opération à bord d'un navire vieux de 36 ans doté d'une simple coque et manquant de cloisons transversales pour empêcher la propagation de l'eau ou des flammes.

Une crainte que le capitaine du Cape Ray balaie d'un revers de main. Les doubles coques sont pour les pétroliers et les transport de vrac. Or les produits chimiques sont déjà confinés dans des conteneurs hermétiques, explique-t-il.

"La sécurité est notre priorité. Nous avons affaire à des matériaux dangereux, il n'y a aucun doute la-dessus", convient pour sa part le sous-secrétaire à la Défense Franck Kendall.

Les opérations de neutralisation en mer devraient prendre entre 45 et 90 jours selon le Pentagone. Tout dépendra de la météo et de l'état de la mer, selon le capitaine Jordan: "Si elle est démontée, nous devrons suspendre les opérations".

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