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La Gagaouzie, entre nostalgie de l'URSS et crainte d'un scénario ukrainien

La statue de Lénine près du siège du gouvernement local à Comrat, principale ville de Gagaouzie, une région autonome de Moldavie où la nostalgie de l"URSS est forte, le 7 avril 2014 [Daniel Mihailescu / AFP] La statue de Lénine près du siège du gouvernement local à Comrat, principale ville de Gagaouzie, une région autonome de Moldavie où la nostalgie de l"URSS est forte, le 7 avril 2014 [Daniel Mihailescu / AFP]

Des vignobles à perte de vue sous un soleil éclatant donnent une image bucolique de la Gagaouzie. Mais cette région autonome de Moldavie où la nostalgie de l'URSS est toujours forte craint d'être prise dans la tourmente de la crise qui secoue l'Ukraine voisine.

"La situation est explosive, le danger est grand mais il y a heureusement en Gagaouzie des hommes politiques modérés qui savent que si (le scénario ukrainien, ndlr) se répète, il sera très difficile de l'arrêter", déclare à l'AFP Nikolaï Dudoglu, maire de Comrat, chef lieu de la Gagaouzie.

Cette région représente 5,4% du territoire de la Moldavie, pays de 3,5 millions d'habitants majoritairement roumanophone.

La Gagaouzie a renoncé en 1994 à ses velléités séparatistes en échange d'un statut d'autonomie l'autorisant à accéder à l'indépendance si la Moldavie décidait de s'unir avec la Roumanie.

Travail dans les champs près de Comrat, la principale ville de Gagaouzie, une région autonome de Moldavie où la nostalgie de l'URSS est forte, le 8 avril 2014 [Daniel Mihailescu / AFP]
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Travail dans les champs près de Comrat, la principale ville de Gagaouzie, une région autonome de Moldavie où la nostalgie de l'URSS est forte, le 8 avril 2014

Lors d'un récent référendum non reconnu par la Moldavie, les quelque 160.000 habitants de Gagaouzie, des turcophones chrétiens orthodoxes pour qui le russe est néanmoins la langue de prédilection, ont plébiscité à 98% une entrée de leur région dans l'union douanière Russie-Bélarus-Kazakhstan et dit "niet" à une adhésion à l'Union européenne (UE).

"Il est évident que la situation en Ukraine a changé la dynamique et l'atmosphère dans toute la région", indique à l'AFP le représentant de l'UE en Moldavie, Pirkka Tapiola.

S'il estime qu'"aucun mouvement indépendantiste n'est en train de se créer" en Gagaouzie, "les craintes" d'une perte de l'identité gagaouze se renforcent, à l'approche de la signature par Chisinau de l'accord d'association avec l'UE.

Le "bachkan" (gouverneur) de la région, Mikhaïl Formuzal, assure, lui, que "pour la Gagaouzie, le terme +séparatisme+ est inacceptable".

Mais il qualifie de "correcte" la proclamation par la Crimée de son indépendance, dès lors que les droits des Russes en Ukraine étaient "bafoués" et "leurs intérêts négligés".

"La Russie a compris qu'elle doit promouvoir une politique ferme, dans l'intérêt de sa propre nation", lance le gouverneur, alors que Moscou a dépêché jusqu'à 40.000 militaires à la frontière ukrainienne, faisant craindre une invasion.

Des enfants se promènent à Comrat, principale ville de Gagaouzie, une région autonome de la Moldavie, le 6 avril 2014  [Daniel Mihailescu / AFP]
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Des enfants se promènent à Comrat, principale ville de Gagaouzie, une région autonome de la Moldavie, le 6 avril 2014

Pour éviter que la Gagaouzie n'emboîte le pas de la Crimée, la Moldavie, déjà confrontée au séparatisme de la république autoproclamée de Transdniestrie, "ne doit adhérer à aucun bloc politique", martèle-t-il.

"La Moldavie aura d'énormes problèmes si elle signe le traité d'association à l'UE. La Russie a dit clairement qu'elle introduira des taxes supplémentaires pour les produits moldaves" et renverra chez eux les 500.000 Moldaves qui y travaillent dont 25.000 Gagaouzes, dit M. Formuzal.

Un tiers du PIB de la Moldavie, pays le plus pauvre d'Europe, vient des fonds envoyés à leurs familles par les émigrés.

- 'Rien pour nous en Europe' -

"Ici, nous sommes tous attachés à la Russie et la seule perspective pour nous et pour nos enfants est là-bas", dit Ivan Gavrilov, un agriculteur de la ville de Ceadir-Lunga.

Un ouvrier installe un panneau publicitaire sous les drapeaux moldave et gagaouze à Comrat, principale ville de Gagaouzie, le 6 avril 2014 [Daniel Mihailescu / AFP]
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Un ouvrier installe un panneau publicitaire sous les drapeaux moldave et gagaouze à Comrat, principale ville de Gagaouzie, le 6 avril 2014

"Il n'y a rien pour nous en Europe, nous ne connaissons pas la langue, nous ne savons pas à quoi nous attendre", ajoute-t-il, après avoir signé pour la tenue d'un nouveau référendum, national cette fois, qui entérine l'ancrage de la Moldavie à l'est.

Une tente rouge érigée par le parti socialiste près de la statue de Lénine, dans la rue principale de Comrat, attire de nombreux curieux, dont l'écrasante majorité se dit favorable à des liens plus étroits avec Moscou.

"Moi, je suis née dans l'Union soviétique et je pense que nous devons faire partie de la Russie. Du temps de l'URSS on avait stabilité, sécurité, garanties sociales, nous aimerions que ces temps-là reviennent", dit Olga Patraman, une quadragenaire de Comrat.

Et Moscou, qui semble prête à tout pour séduire les Gagaouzes, a récemment levé un embargo sur les importations de vins moldaves uniquement pour les producteurs de cette région.

Candidat à l'élection du nouveau gouverneur prévue en février, il souligne que la Moldavie doit garder de bonnes relations aussi bien avec l'UE qu'avec la Russie.

Mais, dit-il, "il ne faut pas oublier que nous sommes voisins de l'Europe unie et que nous ne pourrons pas voler au-dessus de l'Ukraine" pour être plus proches de la Russie.

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