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Européennes: La Bulgarie déchirée entre Bruxelles et Moscou

Symbole du tiraillement de la Bulgarie, à Sofia, le 8 mai 2014, un homme agite un drapeau européen devant le monument dédié à l'armée soviétique, illuminé par les étoiles jaunes sur fond bleu, symbolisant.. l'Europe [Nikolay Doychinov / AFP] Symbole du tiraillement de la Bulgarie, à Sofia, le 8 mai 2014, un homme agite un drapeau européen devant le monument dédié à l'armée soviétique, illuminé par les étoiles jaunes sur fond bleu, symbolisant.. l'Europe [Nikolay Doychinov / AFP]

A la veille des élections européennes, la Bulgarie est plus que jamais déchirée entre la Russie, l'allié traditionnel qui lui fournit son gaz, et l'UE, qui investit massivement dans le pays le plus pauvre des 28.

A Sofia, on sait qu'une nouvelle Guerre froide née de la crise ukrainienne frapperait de plein fouet une économie déjà très fragile, que ce soit à travers une coupure du gaz russe ou par les sanctions européennes.

Dans la crise entre l'Europe et la Russie, "la Bulgarie tient la position de l'épouse obligée de s'aligner sur son mari (Bruxelles), tout en sachant qu'elle subira de lourdes pertes", résume le politologue Andrey Raytchev pour l'AFP.

Conséquence: d'après un article récent du magazine Spiegel citant des sources de renseignement allemandes, Berlin et d'autres redoutent de plus en plus de voir Moscou exploiter son influence en Bulgarie "pour diviser le bloc" européen.

Entre 40% et 53% des Bulgares sont déjà opposés à des sanctions contre la Russie, selon trois sondages Gallup, Mediana et Centre d'analyses et marketing.

- Alliée fidèle de l'URSS -

Les liens entre la Bulgarie et la Russie sont profonds et anciens, façonnés par l'histoire, des langues proches et une culture partagée. La fête nationale est la date de la libération de la domination ottomane par la Russie en 1878.

Un homme tient un drapeau rouge et un portrait de Staline, le 9 mai 2014 durant les célébrations marquant la fin de la deuxième guerre mondiale devant le monument dédié à l'armée soviétique à Sofia [Nikolay Doychinov / AFP]
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Un homme tient un drapeau rouge et un portrait de Staline, le 9 mai 2014 durant les célébrations marquant la fin de la deuxième guerre mondiale devant le monument dédié à l'armée soviétique à Sofia

Alliée la plus fidèle de l'URSS à l'époque communiste, la Bulgarie fait perdurer cette relation étroite au travers de l'actuel gouvernement soutenu par les socialistes (ex-communistes).

Surtout, le pays dépend quasi entièrement de la Russie pour son approvisionnement en énergie. Le gaz russe arrive par l'Ukraine, les livraisons de pétrole sont majoritairement russes, la seule raffinerie est russe, et l'unique centrale nucléaire bulgare emploie des réacteurs et du combustible russes. Les projets de diversification, eux, n'avancent pas.

La Russie est aussi très présente dans d'autres secteurs de l'économie bulgare, comme le tourisme ou l'immobilier.

Bruxelles ne manque pas non plus de leviers financiers: les fonds européens représentent 65% des investissements et les échanges au sein de l'UE se chiffrent à 62% du commerce bulgare.

- Moscou dans la campagne des Européennes -

Tout en se conformant à la politique commune de l'UE, Sofia n'hésite pas à hausser le ton contre Bruxelles au sujet du projet russo-italien de gazoduc South Stream, qui doit transporter du gaz russe sous la Mer Noire vers l'Europe, en contournant l’Ukraine.

Le Parlement européen réclamait en avril l'abandon du projet, en réponse notamment à la politique russe envers Kiev.

Le dirigeant socialiste Serguei Stanichev, chef de file des socialistes européens à Strasbourg, photographié le 8 mai à Ovchartsi, a assisté le 9 mai à une commémoration d'antifascistes nostalgiques brandissant des drapeaux soviétiques [Nikolay Doychinov / AFP]
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Le dirigeant socialiste Serguei Stanichev, chef de file des socialistes européens à Strasbourg, photographié le 8 mai à Ovchartsi, a assisté le 9 mai à une commémoration d'antifascistes nostalgiques brandissant des drapeaux soviétiques

"South Stream est un projet stratégique prioritaire" dont la construction doit commencer "dès cet été", a répliqué le ministre de l’Economie et l’Energie Dragomir Stoïnev. C'est précisément le plan du géant russe Gazprom.

Or, soutenir South Stream à l'heure actuelle est "une action anti-ukrainienne", analyse pour l'AFP Ognian Mintchev, directeur de l'Institut d'études internationales à Sofia.

Les Bulgares, eux, se souviennent plutôt, avec angoisse, de la coupure des livraisons de gaz russe en direction de l'Europe, en janvier 2009. Il avait fallu réduire le chauffage et suspendre le plus gros de l'activité économique.

Le sujet est l'un des rares à émerger dans la morne campagne des élections européennes en Bulgarie. Les socialistes promettent de servir de "pont dans les relations entre la Russie et l'UE". Les conservateurs, eux, insistent en faveur d'une politique européenne commune de l'énergie. Mais les deux camps soutiennent South Stream.

Plus folklorique, mais non moins parlant: le dirigeant socialiste Serguei Stanichev, par ailleurs chef de file des socialistes européens à Strasbourg, a assisté le 9 mai à une commémoration d'antifascistes nostalgiques brandissant des drapeaux soviétiques et le portrait de Staline. Le leader ultra-nationaliste Volen Siderov est allé jusqu'à lancer sa campagne depuis Moscou, et ses militants ont brûlé le 9 mai le drapeau européen devant le monument de l'armée soviétique à Sofia.

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