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Le défi catalan, voie de légitimité pour le futur roi

Le roi d'Espagne Juan Carlos (d) et son fils Felipe (g), le 27 décembre 2011 à Madrid [Pedro Armestre / AFP/Archives] Le roi d'Espagne Juan Carlos (d) et son fils Felipe (g), le 27 décembre 2011 à Madrid [Pedro Armestre / AFP/Archives]

La poussée indépendantiste en Catalogne sera l'un des défis majeurs auxquels sera confronté le futur roi Felipe VI d'Espagne, et l'une des clés d'une légitimité qu'il devra conquérir à l'heure où le sentiment républicain progresse dans le pays.

"Le problème majeur de Felipe est d'asseoir sa légitimité, car il hérite du trône mais pas de la légitimité, ni du respect qu'a obtenu son père" en instaurant la démocratie, relève le politologue Anton Losada, citant la vague républicaine qui se fait entendre depuis l'annonce de l'abdication du roi le 2 juin.

Ce soir-là, des milliers d'Espagnols ont manifesté pour réclamer un référendum sur l'avenir de la monarchie. A Barcelone, le drapeau indépendantiste, l'estelada, frappé d'une étoile blanche, se mêlait aux drapeaux républicains, rouge, or et violet.

Devenu roi le 22 novembre 1975, deux jours après la mort du dictateur Francisco Franco qui avait fait de lui son dauphin, Juan Carlos s'était attiré le respect du pays en choisissant la voie de la démocratie, qui avait mené à l'adoption par référendum d'une Constitution en 1978.

Felipe, lui, devient chef d'Etat dans un pays meurtri par la crise économique, doutant de ses institutions. Parmi ses tâches les plus lourdes, il devra redorer l'image de la monarchie et faire face à la crise catalane, à l'heure où cette région entend organiser le 9 novembre un référendum sur son indépendance.

"C'est là une occasion pour lui de s'imposer", estime Anton Losada.

Depuis le début de l'année, Felipe, âgé de 46 ans, s'est rendu six fois en Catalogne, trinquant quatre fois en public avec le président nationaliste Artur Mas.

Le prince a également rencontré, selon la presse, des dizaines d'hommes d'affaires catalans, préoccupés par les conséquences sur l'économie de la région et du pays d'une éventuelle indépendance.

"Il peut être un roi actif pour la Catalogne, maintenant un dialogue régulier avec les autorités catalanes, avec les instances économiques et sociales, avec un rôle de médiation dans les conflits", note José Antonio Zarzalejos, ancien directeur du journal conservateur ABC.

- Un rôle limité -

Pour Anton Losada cependant, l'abdication inopinée de Juan Carlos, à 76 ans, témoigne de la nécessité d'adapter le modèle de l'Etat né de la Constitution de 1978.

"L'analyse du roi est que le modèle de départ de la transition se fonctionne plus, n'a plus la capacité de résoudre la question territoriale par exemple", avec certaines des 17 régions réclamant encore plus d'autonomie.

Cependant, la marge de manoeuvre du nouveau monarque sera beaucoup plus faible que celle dont jouissait son père.

"Quand Juan Carlos a été couronné, après la mort de Franco, il avait les pouvoirs absolus, il pouvait tout faire, donc aussi des changements très importants", affirme Josep Ramoneda, philosophe et politologue.

Le président du gouvernement régional de Catalogne Artur Mas, au parlement régional à Barcelone, le 26 mars 2014 [Lluis Gene / AFP/Archives]
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Le président du gouvernement régional de Catalogne Artur Mas, au parlement régional à Barcelone, le 26 mars 2014

"Le nouveau roi aura des possibilités très limitées, parce que son rôle dans la Constitution est très strict, un rôle de modérateur et d'arbitre," souligne-t-il.

"Il ne peut pas ordonner au Premier ministre d'autoriser un référendum. Il ne peut pas décider unilatéralement d'ouvrir un processus de modification de la Constitution", ajoute-t-il.

En revanche, pour José Antonio Zarzalejos, ce que le nouveau souverain peut impulser, c'est "un changement de climat, un changement d'attitude face au problème" catalan. Il peut "faciliter le dialogue", dit-il. "Ensuite, ce sont les gouvernements catalan et espagnol qui doivent parvenir à un accord".

Pour l'heure, le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, et Artur Mas restent figés sur leurs positions.

Le président catalan a annoncé qu'il pourrait ne pas assister à la prestation de serment de Philippe VI en raison d'un voyage prévu à l'étranger, et son parti, la coalition nationaliste CiU, devrait s'abstenir lors du vote au Parlement sur l'abdication de Juan Carlos.

Mariano Rajoy lui a demandé mercredi de ne pas faire "la politique de bas étage".

En Catalogne, "dans les moments importants, nous savons avancer ensemble. Et nous l'avons déjà montré, non pas en faisant de la politique de bas étage mais de la politique avec un grand P, tant qu'il y a la confiance nécessaire pour faire de grandes choses", a répondu Artur Mas.

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