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Qui est Jean-Claude Juncker ?

Jean-Claude Juncker, le 5 avril 2014, à Berlin [Odd Andersen / AFP/Archives] Jean-Claude Juncker, le 5 avril 2014, à Berlin [Odd Andersen / AFP/Archives]

Le chrétien-démocrate Jean-Claude Juncker, qui a été désigné vendredi président de la Commission européenne, est à 59 ans un vétéran européen et un fédéraliste hostile aux multiples exemptions exigées par les Britanniques.

 

"Il connaît tout, et il connaît tout le monde", souligne l'ancien ministre français Pierre Moscovici. Premier ministre du Luxembourg pendant près de 19 ans (1995-2013), M. Juncker a côtoyé tous les dirigeants européens depuis François Mitterrand et Helmut Kohl.

Il a vécu la profonde transformation de l'Union, l'échec du traité constitutionnel en 2005 et l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne quatre ans plus tard, la naissance de la monnaie unique, puis la crise de la dette et le sauvetage de l'euro, une tâche à laquelle il s'est consacré avec ardeur pendant huit ans à la tête de l'Eurogroupe.

Né le 9 décembre 1954 dans un des six Etats fondateurs de l'Union européenne, un petit pays niché entre la France et l'Allemagne, chrétien-social habitué des coalitions avec les socialistes, avec lesquels il a quasiment toujours gouverné, il a toujours fait preuve d'un grand art de la négociation et du compromis.

"Il a l'expérience, avec ses avantages et ses inconvénients, il peut faire la synthèse entre une droite sociale et la gauche social-démocrate, il est de double culture française et allemande", estime M. Moscovici.

Le Premier ministre britannique David Cameron, qui a fait une véritable croisade contre sa candidature, a beau jeu de dénoncer un "homme du passé", qui en outre "n'a été candidat nulle part et n'a été élu par personne". Il l'a encore accusé vendredi d'être la "mauvaise personne" pour diriger l'exécutif européen.

- Attaqué par la presse anglaise -

 

La presse s'est déchaînée contre lui outre-Manche, où ce fumeur invétéré est aussi accusé d'avoir un penchant coupable pour l’alcool. Dans leur campagne contre M. Juncker, certains tabloïds sont même allés jusqu'à traiter son père, enrôlé de force dans la Wehrmacht pendant la Deuxième guerre mondiale, de nazi. Une attaque "dégoûtante" qui l'a profondément meurtri.

Relancé sur la scène européenne au printemps après son éviction du pouvoir au Luxembourg, Jean-Claude Juncker est apparu au début de la campagne comme un candidat par défaut, plus intéressé par la présidence du Conseil qui lui avait échappé en 2009, que par la Commission et son rythme effréné.

M. Juncker, qui aura 60 ans à la fin de l'année, s'est souvent montré las au cours de la campagne, peinant à insuffler de l'enthousiasme dans des discours convenus.

Pendant des années, il a été réputé pour son humour parfois acerbe et son franc-parler, dont il n'hésitait pas à user contre les grands Etats, refusant un diktat franco-allemand sur l'Europe, appelant Paris à respecter ses engagements en matière de déficits ou Berlin à plus de solidarité avec les pays en crise.

Il avait fustigé en juin 2005 "les intérêts mesquins et sordides" dissimulés derrière l'opposition britannique au projet de super Etat européen, dans un discours au Parlement européen considéré comme une virulente diatribe antibritannique.

Mais il pratique aussi avec maestria l'art de l'esquive pour éluder les questions des journalistes.

Son viatique a toujours été la promotion de la construction européenne, avec une vision fédéraliste qui lui valut en 2006 de recevoir le prestigieux prix Charlemagne pour l'unification européenne.

- Idéalisme et sens des réalités -

 

Mais ce vieux routier de la politique, qui en connaît toutes les ficelles, a toujours fait cohabiter son idéalisme avec un solide sens des réalités, notamment au service des intérêts de son pays dont il a très longtemps défendu avec acharnement le secret bancaire.

"Pour moi, l'Europe est un mélange d'actions concrètes et de convictions fortes", a-t-il dit un jour, ajoutant aussitôt que "les convictions fortes n'apportent rien quand on ne fait pas preuve de pragmatisme".

Jean-Claude Juncker a toujours défendu la nécessité d'accorder plus de place à la dimension sociale. Pour autant, à la tête de l'Eurogroupe (jusqu'en janvier 2013), il a contribué à concevoir et à mettre en oeuvre les politiques d'austérité ensuite imputées à la Commission européenne.

Accusé d'avoir fait preuve d'une négligence coupable vis-à-vis des dérives des services de renseignement luxembourgeois, il avait été évincé fin 2013 du pouvoir dans le Grand-Duché. A ceux qui lui reprochaient d'avoir délaissé, au profit de l'Europe, son pays, il avait alors promis de s'y consacrer.

 

 

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