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La diplomatie multipolaire des Brics, contrepoint à l'isolement russe

La présidente du Brésil Dilma Rousseff et le président russe Vladimir Poutine lors de la finale de la Coupe du monde de football à Rio, le 13 juillet 2014  [Aleksey Nikolskyi  / Pool Ria Novosti/AFP] La présidente du Brésil Dilma Rousseff et le président russe Vladimir Poutine lors de la finale de la Coupe du monde de football à Rio, le 13 juillet 2014 [Aleksey Nikolskyi / Pool Ria Novosti/AFP]

Le sixième sommet des Brics cette semaine au Brésil prend à contre-pied l'isolement de la Russie par les Occidentaux, nouveau signe de la diplomatie multipolaire défendue par les pays émergents.

Les dirigeants du Brésil, de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du sud vont consacrer, mardi à Fortaleza et mercredi à Brasilia, le retour du président russe Vladimir Poutine dans un sommet international depuis son éviction du G8 des nations les plus industrialisées en raison de la crise ukrainienne.

"Les Brics ont montré que l'Occident ne peut pas continuer à mettre au pas les émergents, même sur des sujets géopolitiques cruciaux", affirme à l'AFP Oliver Stuenkel, professeur en relations internationales à la Fondation Getulio Vargas de Sao Paulo.

"Ils ont refusé de participer aux efforts menés pour isoler la Russie. Ils ont montré qu'ils ne croient pas aux sanctions", ajoute M. Stuenkel, estimant que les Brics avaient même "réussi à éviter l'exclusion de la Russie du G20", club des pays développés et émergents.

En pleine montée de tensions entre Moscou et Kiev après un tir frontalier, le sommet des Brics pourrait évoquer cette question dans sa déclaration finale.

"Les présidents n'ignorent pas l'actualité, il est possible qu'il y ait une mention de la crise en Ukraine", a indiqué un responsable gouvernemental brésilien lors d'un briefing.

Les présidents brésilien Dilma Rousseff, russe Vladimir Poutine, chinois Xi Jinping et sud-africian Jacob Zuma ainsi que le Premier indien Manmohan Singh au sommet du G20 le 5 septembre 2013 à Saint-Pétersbourg  [Sergei Karpukhin / Pool/AFP/Archives]
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Les présidents brésilien Dilma Rousseff, russe Vladimir Poutine, chinois Xi Jinping et sud-africian Jacob Zuma ainsi que le Premier indien Manmohan Singh au sommet du G20 le 5 septembre 2013 à Saint-Pétersbourg

Ce dernier prévoit une position dans la lignée de celle adoptée à l'ONU, où en mars les Brics s'étaient abstenus lors du vote à l'Assemblée générale contre le rattachement de la Crimée à la Russie.

- "Consolidation de l'alliance" -

Vadim Loukov, coordinateur du ministère russe des Affaires étrangères pour les Brics, avait à cette époque assuré que le cas ukrainien avait "contribué à une consolidation de l'alliance", dans une déclaration à l'agence russe RIA Novosti.

"C'est une satisfaction pour Poutine de voir, avant le sommet des Brics, que face à une certaine solidarité occidentale, il y a une nette différence chez ses partenaires", confirme à l'AFP Bertrand Badie, chercheur au Centre d'Etudes et de Recherches Internationales (CERI) de Paris.

Ce politologue relève la "neutralité" de la Chine, d'habitude "très sourcilleuse en matière d'intégrité territoriale", tandis que le "Brésil et l'Inde sont restés plus discrets de même que l'Afrique du Sud".

Des nuances qui illustrent les intérêts de chacun des pays dans leur relation bilatérale avec la Russie. M. Stuenkel souligne qu'il n'y a "aucune pression au sein des Brics pour adopter une position commune".

Leur point d'accord reste simple: ménager un partenaire clé, tant pour la Chine que pour l'Inde, et s'opposer à une hégémonie occidentale sur le plan diplomatique.

"Les Brics ont surtout été très clairs dans leur opposition aux sanctions des Etats-Unis et de l'Union européenne contre la Russie", souligne à l'AFP Mark Weisbrot, co-directeur du Center for Economic and Policy Research (CEPR) à Washington.

"Ils ne peuvent pas forcer Washington à changer sa politique étrangère, mais ils peuvent lui en faire payer un prix politique et économique", insiste-t-il.

- "Revanche financière" -

Grand enjeu du sommet des Brics, la création d'une banque de développement et d'un fond de réserve témoigne d'une même volonté d'autonomie face aux institutions internationales.

M. Abadie y voit "un peu une revanche financière des pays du sud et de l'est face à la prédominance occidentale".

"Cela représenterait le début de construction d'un monde financier multipolaire, en miroir au monde géopolitique multipolaire que souhaite Poutine", précise à l'AFP Charles Movit, responsable de l'Europe de l'Est pour le cabinet de conseil anglo-saxon HIS.

Toutefois, cette banque des Brics ne pourrait répondre à l'impact de sanctions plus dures sur "les activités financières quotidiennes" de la Russie, tempère-t-il.

Ex-président du Conseil américano-russe du commerce, Edward Verona, du cabinet d'affaires américain McLarty Associates, pointe à l'AFP une autre limite des émergents en cas de sanctions anti-russes portant sur des "technologies" que les Brics seraient "incapables de fournir".

Une manière de rappeler que la diplomatie multipolaire peut se heurter aux réalités économiques.

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