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Burundi : trêve des manifestations dans la capitale

Le calme était revenu samedi dans la capitale du pays après une journée de violences.[Jennifer Huxta / AFP]

Au terme d'une nouvelle semaine de manifestations et une alarmante escalade de la violence, Bujumbura connaissait samedi une trêve décrétée par les leaders du mouvement anti-troisième mandat qui ont entamé un "dialogue" avec le gouvernement.

 

A l'occasion de ce "nouveau dialogue entre les différentes parties engagé depuis quelques jours", les leaders de la contestation ont demandé "au gouvernement de montrer sa bonne foi en s'abstenant de tirer sur les manifestants". Ces très discrètes négociations se déroulent sous l'égide de l'envoyé spécial de l'ONU Saïd Djinnit, de représentants de l'Union africaine (UA) et des pays de la région.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, s'est dit vendredi encouragé par ce "dialogue politique" qui inclut des représentants de la société civile, de partis politiques, d'organisations religieuses et du gouvernement. Néanmoins, "il y a un grand problème qui continue de diviser tout le monde ici", c'est la question du troisième mandat, a reconnu l'émissaire de l'UA, Edem Kodjo, qui a souligné le rôle crucial des chefs d’États de la région pour aider à trouver une solution.

 

Calme à Bujumbura

Bujumbura est restée étrangement calme samedi, et il devrait en être de même dimanche, en vertu de la trêve décrétée pour ce weekend par les leaders de la contestation. Ce calme contrastait avec les scènes sanglantes de la veille au soir, quand trois personnes ont été tuées par l'explosion de trois grenades jetées dans la foule en plein centre-ville. Les auteurs ont pris la fuite. Mais pour la police, qui dit avoir appréhendé un suspect, pas de doute: ces attaques sont liées aux manifestants.

"Nous n'avons évidemment rien à voir avec ces attaques", a démenti Vital Nshimiramana, l'un des leaders du mouvement: "la police cherche à nous diaboliser pour pouvoir justifier l'usage excessif de la force".Cette attaque à la grenade - première du genre - contribue encore un peu plus à instaurer un climat d'instabilité et d'angoisse dans la capitale, qui connaît depuis fin avril un vaste mouvement de contestation populaire contre le président Pierre Nkurunziza, candidat à un troisième mandat à la présidentielle du 26 juin.

 

Manifestations

Des manifestations ont lieu quasi-quotidiennement, émaillées de nombreux heurts avec la police, avec près de 25 morts en quatre semaines. La police fait désormais un large usage de ses armes à feu pour disperser les opposants, faisant craindre un dérapage sanglant.

Malgré les menaces du pouvoir, l'échec du coup d'Etat et la répression de la police, les manifestants ne fléchissent pas, et la contestation a même pris racine durablement dans les quartiers.

 

Conflit politique

C'est le pire des scénarios qui semble en train de se réaliser, celui du pourrissement politique. Avec toujours plus d'incidents qui rappellent par bien des aspects le spectre des années de la sanglante guerre civile entre majorité hutu et minorité tutsi (1993-2006). De l'avis de tous les observateurs, le conflit n'est aujourd'hui pas ethnique mais politique, ce qui est d'une certaine manière rassurant. Certains extrémistes pourraient néanmoins être tentés de jouer la carte de l'ethnisme. Et surtout, le blocage reste total entre les deux camps.

Les protestataires espèrent faire renoncer M. Nkurunziza, au pouvoir depuis 2005, à briguer un troisième mandat qu'ils jugent anticonstitutionnel et contraire aux accords de paix d'Arusha qui avaient mis fin à la guerre civile. Pour le président, ce mouvement en cours est une "insurrection", limitée à "quatre quartiers" de la capitale, alors que "la paix et la sécurité règnent sur 99,9% du territoire".

 

Elections reportés

Des manifestations ont aussi été signalées en province, mais de moindre ampleur et plus sporadiques. Depuis la fermeture des principales radios privées (seuls médias indépendants susceptibles de toucher l'ensemble de la population, largement illettrée et très majoritairement rurale), il est difficile de savoir ce qu'il se passe à l'intérieur du pays. A l'inverse, les paysans des collines -qui forment l'assise populaire du Cndd-Fdd- sont très peu informés des événements dans la capitale.

Des élections législatives et communales, reportées de dix jours sous la pression internationale, sont censées se tenir le 5 juin, et marqueront le début des élections générales, avant la présidentielle du 26 juin. Beaucoup craignent des débordements. Jeudi, des manifestants ont brûlé pour la première fois du matériel électoral, en périphérie rurale de la capitale.

La vitesse avec laquelle les gens quittent le pays est aussi révélatrice des peurs et des tensions. A ce jour, près de 110.000 Burundais ont trouvé refuge dans les pays voisins, dont 70.000 en Tanzanie.

 

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