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Italie : le premier parti de gauche européen, en plein psychodrame

La guerre des chefs au sein du PD affaiblit le camp de la gauche, pour la plus grande joie des populistes du Mouvement Cinq étoiles.[VINCENZO PINTO / AFP]

Démission de son chef, scission de sa minorité de gauche : le Parti démocrate (PD) italien, principale formation de gauche en Europe, vit depuis plusieurs jours un psychodrame dont certains redoutent les conséquences en Italie et au-delà.

La démission de Matteo Renzi de son poste de secrétaire-général du Parti Démocrate dimanche dernier n'aura pas suffi à calmer les «frondeurs» de ce mouvement qui est aussi le principal soutien du gouvernement italien. Au contraire, elle n'a fait que renforcer la détermination de plusieurs poids lourds du PD, dont l'ancien patron Pier Luigi Bersani ou l'ex-chef du gouvernement Massimo D'Alema. Avec quelques autres, ils ont confirmé cette semaine leur intention de créer un nouveau mouvement plus à gauche.

Un geste attendu tant ils contestent depuis des mois, et plus spécialement depuis l'échec du référendum sur les réformes constitutionnelles de décembre dernier, la politique menée par l'ex-chef du gouvernement et désormais aussi ex-secrétaire général du PD, Matteo Renzi.

Ce dernier a mis résolument le cap vers le centre en arrivant au pouvoir en février 2014, au grand dam de la vieille garde du PD, issue de la lignée du parti communiste italien, le PCI, et qui n'a jamais considéré comme l'un des siens cet ancien scout, catholique, pour qui la gauche et la droite sont des notions dépassées.

Paradoxalement, le départ de dizaines de députés et sénateurs réduit certes l'importance du PD au Parlement mais pas la majorité parlementaire soutenant le gouvernement de Paolo Gentiloni, un fidèle de Matteo Renzi, même si l'exécutif est objectivement affaibli.

Cette majorité parlementaire est fondée sur le paradoxe que ces deux adversaires, le PD de Renzi et la nouvelle formation des scissionnistes, «soutiennent Gentiloni mais ne renoncent pas à se faire la guerre», écrit Marcello Sorgi, l'éditorialiste de La Stampa.

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Le sort du gouvernement est otage de ce paradoxe. Car si les scissionnistes ne sont guère pressés d'affronter les électeurs, l'intérêt de Renzi est au contraire d'aller voter le plus tôt possible en faisant l'économie d'une discussion approfondie au sein du PD, explique à l'AFP Lorenzo De Sio, professeur de Sciences Politiques à l'université Luiss de Rome.

Tant que Matteo Renzi gagnait, comme aux européennes de 2014 avec un résultat de 41% des votes pour le PD, ses adversaires étaient contraints au silence. Mais une série d'échecs, la perte des villes comme Rome et Turin ou le flop du référendum en décembre, ont donné des ailes à ses détracteurs.

Un combats des chefs

Car les raisons de la scission semblent peu idéologiques mais avant tout dictées par des animosités personnelles, dans ce combat des chefs pour prendre la tête du PD, dont le secrétaire général est par statut candidat au poste de chef du gouvernement en cas de victoire.

«La scission est apparue comme une question liée à des rancunes personnelles, à des luttes de pouvoir, pas sur des problèmes politiques», juge M. De Sio. Matteo Renzi avait semblé, dimanche devant l'assemblée de son parti, faire le pari d'une scission limitée. Il l'a presque gagné cette semaine.

Le leader pressenti il y a une semaine pour ce nouveau mouvement de gauche, Michele Emiliano, président de la région des Pouilles, a fait faux bond au dernier moment, déclarant vouloir rester dans le PD pour défier Matteo Renzi lors du prochain congrès.

Un autre ténor de la gauche du PD, le ministre de la Justice Andrea Orlando, a annoncé jeudi qu'il restait au sein du PD, se portant lui-aussi candidat pour succéder à Matteo Renzi.

Face à la multiplication de ses adversaires, chaque nouveau affaiblissant l'autre, «Renzi aura jeu facile pour gagner le congrès et être élu. Il devient gagnant dans un parti qui pèse un peu moins, un leader plus fort mais d'un parti plus faible», résume le professeur De Sio.

Reste alors l'inconnue des élections, prévues au plus tard en février 2018. Car la guerre des chefs au sein du PD affaiblit aussi le camp de la gauche, pour la plus grande joie des populistes du Mouvement Cinq étoiles qui ambitionnent de gouverner un jour l'Italie.

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