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Mobilisation face à l'étrange disparition d'un militant en Patagonie

L'acteur argentin Pablo Echarry manifeste avec un portrait de Santiago Maldonado porté disparu le 1er août 2017, à Buenos Aires le 1er septembre 2017 [JUAN MABROMATA / AFP] L'acteur argentin Pablo Echarry manifeste avec un portrait de Santiago Maldonado porté disparu le 1er août 2017, à Buenos Aires le 1er septembre 2017 [JUAN MABROMATA / AFP]

Santiago Maldonado, un jeune baba cool argentin, a mystérieusement disparu en Patagonie quand la gendarmerie a dispersé une manifestation. Depuis, les Argentins se mobilisent car ils y voient un modus operandi rappelant les sombres heures de la dictature.

Vendredi, cela faisait un mois que cet artisan de 28 ans, barbe et longs cheveux noirs, n'avait pas donné signe de vie et ils ont été des dizaines de milliers à défiler pour demander des comptes aux autorités, dans le centre de Buenos Aires.

«Où est Santiago Maldonado ?», «on le veut vivant !» : ces slogans scandés dans la rue, sont devenus viraux sur les réseaux sociaux. Sur Twitter, Facebook ou Instagram, les Argentins postent des messages en donnant leurs nom et prénom, en disant où ils se trouvent, avant d'interroger «mais où est Santiago Maldonado ?».

L’anthropologue Alejandro Grimson fait remarquer que depuis la fin de la dictature militaire, en 1983, il existe en Argentine «un pacte en vertu duquel l'Etat ne peut pas exercer de violences menaçant la vie ou l'intégrité des personnes. Et chaque fois que ce pacte a été violé, cela a généré une grande commotion dans la société».

Le sort de la plupart des disparus de la dictature étant toujours inconnu, c'est un sujet sensible en Argentine, une plaie béante. Une explication du phénomène Maldonado est que depuis la fin de la dictature, c'est la première fois qu'une instance de l'Etat est soupçonnée d'avoir fait disparaître un opposant.

«Bavure» ? 

Les Mères de la Place de Mai, mobilisées depuis 40 ans pour dénoncer la disparition de leurs enfants sous la dictature (1976-1983) se sont jointes au mouvement de protestation.

En pleine campagne électorale avant les législatives de mi-mandat, l'ex-présidente de gauche Cristina Kirchner a saisi l'aubaine pour s'associer à la mobilisation et critiquer le gouvernement.

L'affaire est encombrante pour le pouvoir, car une «bavure» a peut-être été commise. Le gouvernement nie une «disparition forcée», tandis qu'une enquête a été ouverte par la justice. Mais cette enquête piétine, dans un pays où le taux de résolution des affaires criminelles est très faible.

La ministre de la Sécurité Patricia Bullrich se dit convaincue que la gendarmerie n'a rien à voir avec sa disparition et a demandé à ses détracteurs de ne pas politiser cette affaire.

Mercredi devant le Parlement, le chef du gouvernement Marcos Peña a lancé : «nous sommes les premiers à souhaiter qu'il réapparaisse».

Graciela Fernandez Meijide, dont le fils a disparu quand la junte militaire était au pouvoir, regrette la politisation du cas Maldonado et y voit plutôt «un excès isolé d'un membre de la gendarmerie».

Pression internationale

Les Nations unies, l'ONG Amnesty International et la Commission interaméricaine des droits de l'Homme (CIDH) de l'OEA se sont émues de l'affaire.

Sa mère, Stella Maris, le décrit comme «éloigné de tout militantisme politique. Son engagement est social. Il se fait facilement des amis et soutient les causes qui lui paraissent justes». «C'est simplement un défenseur de tout un tas de causes», confirme un de ses amis, Marcos Ampuero. Ensemble, ils ont fait un voyage au Chili en 2017.

Le 1er août, il participait à une manifestation de la communauté Mapuche de la province de Chubut qui bloquait une route pour revendiquer des terres détenues par l'entreprise Benetton et a finalement été dispersée par des escadrons de gendarmes dans le bourg de Pu Lof.

Le gouvernement a offert une prime de 25.000 euros pour toute information permettant de résoudre l'énigme Maldonado.

Le phénomène a même gagné les terrains de football. Les joueurs du club de San Lorenzo ont déroulé avant un match une banderole demandant «où est Santiago Maldonado».

Le sélectionneur de l'équipe argentine de football, qui équivaut en Argentine à un poste de ministre, a mis son grain de sel. «J'ai vécu cette époque (de la dictature) quand j'étais adolescent avec beaucoup de peur et de douleur, et que cela resurgisse maintenant, ça interpelle», a dit Jorge Sampaoli en conférence de presse avant la rencontre Uruguay-Argentine.

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