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L'exode des Rohingyas se poursuit à la veille de la réunion de l'ONU

La cause des Rohingyas trouve aussi un écho particulier dans le monde musulman, notamment en Indonésie.[JUNI KRISWANTO / AFP]

Des milliers de Rohingyas continuaient mardi à affluer vers le Bangladesh, où plus de 370.000 personnes sont arrivées depuis fin août, un exode massif qui s'apparente à un «nettoyage ethnique» d'après l'ONU, qui réunira mercredi son Conseil de sécurité.

À la frontière entre la Birmanie et le Bangladesh, pendant que le dossier des Rohingyas prenait de l'ampleur au niveau diplomatique, la crise humanitaire s'aggravait.

Des bateaux de Rohingyas ont accosté toute la journée encore sur la rive bangladaise de la rivière Naf, a constaté une journaliste de l'AFP TV. De l'autre côté, les panaches de fumée de villages en feu montaient dans le ciel. Deux hommes transportaient une femme âgée dans un panier.

Le nombre exact de réfugiés de cette minorité musulmane persécutée pourrait être beaucoup plus élevé, ont précisé les Nations unies, qui estiment que de «nombreux arrivants sont encore en mouvement et restent au bord des routes, ce qui rend difficile de les inclure dans les calculs». 

Autorités locales et organisations internationales peinent à prendre en charge cette marée humaine, d'une ampleur sans précédent pour ce conflit. Malades, blessés pour certains, affaiblis et affamés, les Rohingyas arrivent complètement démunis dans une zone où les camps miséreux sont déjà surpeuplés.

La réunion du Conseil de sécurité s'annonce d'ores et déjà tendue : la Chine, qui est le premier investisseur étranger en Birmanie, a réitéré mardi son «soutien» à Naypyidaw et loué «ses efforts pour préserver la stabilité de son développement national».

Cette nouvelle flambée de violences, dans une région souvent en proie aux troubles, a commencé fin août avec des attaques de rebelles rohingyas contre la police birmane, qui ont déclenché une répression de l'armée. Bilan, plus de 400 morts - la plupart rohingyas - selon l'armée, l'ONU évoquant plus de 1.000.

Les rebelles ont déclaré dimanche un cessez-le-feu unilatéral d'un mois, mais le gouvernement birman a répondu qu'il ne négociait pas avec des «terroristes». 

En visite dans les camps mardi, la Première ministre bangladaise, Sheikh Hasina, a demandé au gouvernement birman de «cesser de torturer des personnes innocentes».

Incendie, exécutions

Franchissant un pas dans son discours, le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, avait évoqué lundi «un exemple classique de nettoyage ethnique».

«Nous avons reçu de multiples rapports et des images satellites montrant des forces de sécurité et des milices locales brûlant des villages rohingyas, et des informations cohérentes faisant état d'exécutions extrajudiciaires, y compris de tirs sur des civils en fuite», avait-il déclaré. 

Traités comme des étrangers en Birmanie, un pays à plus de 90% bouddhiste, les Rohingyas sont apatrides même si certains vivent dans le pays depuis des générations. Ils sont victimes de multiples discriminations - travail forcé, extorsion, restrictions à la liberté de mouvement, règles de mariage injustes et confiscation des terres. Mais pour Min Aung Hlaing, chef de l'armée birmane, les «"Rohingyas" ne font pas partie de l'histoire du pays». 

La dirigeante birmane et prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi est très critiquée sur la scène internationale pour sa retenue et sa froideur sur ce sujet mais reste fortement soutenue dans son propre pays.

D'autres prix Nobel de la paix, Malala Yousafzai et l'archevêque sud-africain Desmond Tutu puis le Dalaï lama, leader spirituel des Tibétains, admiré par Aung San Suu Kyi, l'ont appelée à intervenir dans cette crise.

La cause des Rohingyas trouve aussi un écho particulier dans le monde musulman, où les images présentées comme montrant des exactions de l'armée birmane contre cette communauté sont largement partagées sur les réseaux sociaux. Mardi, le guide suprême iranien Ali Khamenei a estimé que le sort marquait «la mort du prix Nobel de la paix».

La tâche d'Aung San Suu Kyi est compliquée par la montée des bouddhistes extrémistes ces dernières années et par la grande autonomie de l'armée birmane, qui reste toute puissante dans cette zone de conflit.

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