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La semaine de Philippe Labro : des flocons éphémères, un champion éternel

«Les enfants vont jouer, faire des boules, des bonshommes, les plus petits découvrant cette magie blanche venue du ciel...».[Eric FEFERBERG / AFP]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour CNEWS Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

DU LUNDI 5 AU VENDREDI 9 FÉVRIER

La neige, quand il s’agit d’un épisode aussi majeur que celui que nous vivons actuellement, c’est terrible, et c’est merveilleux.

C’est terrible, parce que cela immobilise les gens qui travaillent, ralentit les secours, on ne peut plus rentrer chez soi, on dort dans des abris, les activités de commerce et de loisirs voient leurs bénéfices s’amoindrir, l’école n’est pas toujours suivie – c’est une «disruption» (jargon publicitaire et politique) de nos vies quotidiennes.

Et c’est merveilleux, parce que les enfants vont jouer, faire des boules, des bonshommes, les plus petits découvrant cette magie blanche venue du ciel, qui les force à augmenter leurs doses de «pourquoi ?» habituels. 

Ils prennent conscience de la précarité de l’existence. Pour beaucoup de gens, c’est une occasion de solidarité, on s’aide, on se parle, c’est un réducteur des barrières sociales. On dirait, aussi, qu’une sorte d’excitation s’est emparée du ton, du verbe, du comportement, comme si ce phénomène ajoutait de l’adrénaline à nos natures.

La neige, quand elle tombe aussi fort, ce n’est jamais qu’une sorte de métaphore de la vie : rien ne se déroule vraiment comme prévu. Il faut savoir s’adapter – vous ne pouvez pas faire grand-chose sans l’aide de l’autre, des autres –, c’est dans les moments de crise que se révèlent les caractères, la capacité des hommes et des femmes à se confronter aux éléments. Il y a ceux qui, malgré toutes les informations, n’en font qu’à leur tête, croient pouvoir défier ce qui n’est pas contrôlable, des imbéciles et des intelligents, la sérénité et la patience, le vouloir et le pouvoir, la maîtrise de soi et la maîtrise du temps.

A l’occasion des Jeux olympiques d’hiver qui s’ouvrent ce vendredi, on a pu lire, à au moins deux reprises, des entretiens avec Jean-Claude Killy, 74 ans, triple médaillé d’or aux JO de Grenoble, en 1968. Cet homme me plaît. Non seulement il a été un exceptionnel athlète, une sorte de Federer du ski, mais surtout, il a vécu, après la compétition, un destin hors norme. Il confie à Jean-Julien Ezvan, dans Le Figaro du 6 février : «Je ne suis jamais rentré dans mon village – je n’ai fait que souscrire à mon destin. Cela s’est présenté, j’ai suivi.» Juste, serein, parfois ironique, sachant tout relativiser. Dans Le Parisien du 7 février, il lance à Patrick Lafayette : «Je m’occupe de mes abeilles, je n’ai plus mon mot à dire.»

Deux questions, parmi mille autres, m’ont arrêté cette semaine.

Premièrement, pourquoi avons-nous eu droit à autant de docus télé sur «ce qui est arrivé à Fillon», «ce qui l’a tué», «s’est-il tué lui-même ?», etc. ? Sans doute une date anniversaire (celle de sa chute), mais il y a une autre explication : une grande partie de la droite et de l’ensemble de la classe politique considère, à raison, que la déconfiture du prétendant fut le vrai tournant qui a conduit à ce qu’un quasi-inconnu de 39 ans devienne président de la Ve République.

Deuxièmement : il existe, en sport, le délicieux syndrome de la «dernière minute». En rugby, samedi dernier, au Stade de France, c’est à la «dernière minute», on pourrait même dire à la dernière seconde, que Jonathan Sexton a ajusté un drop de 40 m qui a fait gagner l’Irlande, 15 à 13, contre la France. En football, c’est à la «dernière minute», dimanche, à Monaco, que Rony Lopes a marqué un but qui a fait gagner les Monégasques contre les Lyonnais, 3 à 2. Dimanche également, au Super Bowl, à Minneapolis, c’est à la «dernière minute» – enfin, pour être honnête, c’était deux minutes avant la fin du match – que le célèbre Tom Brady, des Patriots de la Nouvelle-Angleterre, a laissé échapper le ballon, ce qui a permis aux Eagles de Philadelphie de le récupérer et de marquer, ensuite, pour gagner 41 à 33.

Moralité : il ne faut jamais, non, jamais ! quitter un stade avant le coup de sifflet final.

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