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Le Cambodge aux urnes pour des législatives controversées après l'interdiction du principal parti d'opposition

Les Cambodgiens ont pris le chemin des bureaux de vote dimanche pour participer à des législatives controversées, qui s’annoncent comme un plébiscite pour le Premier ministre Hun Sen en l’absence de la principale force d’opposition dissoute en novembre 2017.

«Tous les bureaux de vote ont ouvert à 7h» (0h GMT), a déclaré à l'AFP un porte-parole de la Commission électorale, et les résultats préliminaires sont attendus dans la soirée.

L'homme fort du Cambodge est au pouvoir depuis 33 ans et son mouvement, le Parti du peuple cambodgien (PPC), a remporté toutes les élections depuis 1998.

Hun Sen, 65 ans, et son épouse, Bun Rany, ont voté à Takhmao, petite ville située à une quinzaine de kilomètres de la capitale, le Premier ministre brandissant devant la presse son doigt couvert d'encre comme le veut la procédure électorale, selon des journalistes de l'AFP présents sur place.

«Cette élection est très importante pour moi, je viens voter car je veux le bonheur, le développement et la paix pour le pays», a commenté Im Chanthan, une électrice de 54 ans.

Plus de huit millions d'électeurs sont inscrits sur les listes électorales et 80.000 policiers ont été mobilisés pour ce scrutin, la police se disant prête à «empêcher tout acte de terrorisme et de chaos».

Le climat s'est considérablement tendu dans le pays avec la dissolution fin 2017 du Parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP), principale force d'opposition, et l'emprisonnement de son chef, Kem Sokha.

«Le PPC continuera à être victorieux», a assuré vendredi Hun Sen devant des dizaines de milliers de ses partisans réunis à Phnom Penh lors d'un dernier grand rassemblement électoral. Il a ajouté avoir pris "des mesures légales pour éliminer les traîtres qui tentaient de renverser le gouvernement», une allusion au CNRP accusé de comploter contre le régime avec le soutien des Etats-Unis.

Taux d'abstention

Une des questions-clés du scrutin est le taux d'abstention, alors que le fondateur du CNRP, Sam Rainsy, exilé en France pour échapper à la prison, a appelé au boycott de ces législatives, qualifiées de «farce électorale».

En 2013, le taux de participation avait atteint 69%, d'après la Commission électorale. Et les électeurs, face à la corruption qui touche le royaume, avaient voté en masse pour le CNRP, qui avait raflé plus de 44% des voix, prenant le régime de Hun Sen de court.

Le gouvernement a depuis brandi la menace d'une ère de chaos dans le pays encore traumatisé par le régime khmer rouge, coupable d'un génocide qui a fait près de deux millions de morts dans les années 1970.

Surfant sur cette menace, des médias indépendants ont été fermés, un autre a été repris en main par le régime, tandis que plusieurs actions en justice ont été lancées contre des représentants de la société civile.

Face à cette dérive, alors que le puissant et fidèle allié chinois a annoncé dépêcher des «observateurs», Washington et Bruxelles ont suspendu leur assistance à ces élections.

Rhona Smith, rapporteuse de l'ONU pour le Cambodge, a exhorté le gouvernement à respecter la liberté des électeurs, soulignant qu'appeler au boycott était autorisé et ne devait pas être sanctionné.

Hun Sen est coutumier des déclarations choc contre l'opposition. Il a par le passé promis «l'enfer» à ses opposants, invités à «préparer leurs cercueils» en cas de contestation.

Devenu Premier ministre en 1985, à seulement 32 ans, cet ex-Khmer rouge, qui a toujours minimisé son rôle au sein de ce régime, a tissé une toile au maillage serré pour assurer sa longévité politique. Il a placé ses trois fils, qui occupent des postes-clés au sein de l'armée et du parti au pouvoir, au coeur de ce dispositif et ces derniers ont participé activement à la campagne.

La vingtaine de petits partis officiellement enregistrés ont quant à eux fait une campagne discrète.

Cette élection fictive «sera facile à remporter», a relevé Sam Rainsy samedi dans un communiqué, mais Hun Sen «va se retrouver face à une tâche beaucoup plus difficile, voire impossible : «convaincre la communauté internationale que son régime est tout sauf une dictature» et «tenter d'échapper à des sanctions» commerciales et financières.

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