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Zimbabwe : 27 militants devant la justice, l'opposition dénonce une répression généralisée

Ahlia Kumire (au centre), fille d'Ishmael Kumire, pleure la mort de son père tué dans la répression d'une manifestation de l'opposition, lors de ses obsèques dans le village de Chinamhora, à 45 km au nord-est d'Harare, au Zimbabwe, le 4 août 2018 [Zinyange AUNTONY / AFP] Ahlia Kumire (au centre), fille d'Ishmael Kumire, pleure la mort de son père tué dans la répression d'une manifestation de l'opposition, lors de ses obsèques dans le village de Chinamhora, à 45 km au nord-est d'Harare, au Zimbabwe, le 4 août 2018 [Zinyange AUNTONY / AFP]

Vingt-sept opposants arrêtés après les violences post-électorales au Zimbabwe comparaissaient en justice lundi pour tenter d'obtenir leur liberté provisoire, alors que l'opposition accuse le pouvoir d'une répression tous azimuts pour empêcher la contestation de la présidentielle du 30 juillet, remportée par le sortant Emmerson Mnangagwa.

M. Mnangagwa, qui avait pris le pouvoir en novembre à la faveur d'un coup de force contre Robert Mugabe dont il est l'ancien bras-droit, a été élu de justesse dès le premier tour avec 50,8% des voix.

L'annonce des résultats à ce premier scrutin depuis la chute de M. Mugabe, resté près de quatre décennies au pouvoir, a donné lieu mercredi à des manifestations violemment réprimées par les forces de l'ordre. Au moins six personne sont mortes. Le lendemain, la police avait perquisitionné les locaux du Mouvement pour le changement démocratique (MDC, opposition), arrêtant une vingtaine de personnes.

Lundi, le procureur Michel Reza a demandé à ce qu'elles restent en prison. «La mort de six personnes, les voitures brûlées... sont directement liées aux accusés. Les enquêtes ne sont qu'à leur début. Libérer les prévenus n'est pas dans l'intérêt de la justice», a-t-il lancé lors de l'audience, qui poursuivait dans l'après-midi.

La défense a évoqué des arrestations arbitraires. L'opposition, qui a déjà annoncé son intention de contester le résultat de l'élection devant la justice, a dénoncé une répression généralisée destinée à faire peur aux gens et donner une fausse impression de normalité.

Un soldat zimbabwéen frappe un homme dans les rues de Harare, le 2 août 2018, après des manifestations contre des fraudes présumées lors des élections générales. [Zinyange AUNTONY / AFP]
Un soldat zimbabwéen frappe un homme dans les rues de Harare, le 2 août 2018, après des manifestations contre des fraudes présumées lors des élections générales.[Zinyange AUNTONY / AFP]

«Ils essaient de paralyser l'opposition pour qu'il n'y ait pas de résistance ou d'action contre les faux résultats» de la présidentielle, a affirmé à l'AFP Nkululeko Sibanda, porte-parole du chef de l'opposition Nelson Chamisa, arrivé en deuxième position avec 44,3% des suffrages.

«Ca devient plus dangereux chaque jour. Nous savons qu'ils recherchent 4.000 personnes. On ne sait pas pour quelle raison. Mais ce que nous savons c'est que c'est de l'intimidation», a-t-il précisé.

«Bon flic - Mauvais flic»

«C'est une situation inquiétante. Ils (policiers) vont dans les maisons (..), emmènent des gens vers des destinations inconnues. Ces gens ne sont pas conduits aux postes de police», a ajouté le porte-parole.

Il estime qu'une cinquantaine de militants sont portés disparus.

Une femme prend un selfie avec le président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa, peu après l'annonce de sa réelection, le 3 août 2018 à Harare. [MARCO LONGARI                                                                                                                                                                                                                                                   / AFP]
Une femme prend un selfie avec le président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa, peu après l'annonce de sa réelection, le 3 août 2018 à Harare.[MARCO LONGARI / AFP]

De son côté, le président Mnangagwa, ancien chef de la sécurité nationale sous Mugabe, qui a dirigé la brutale répression (20.000 morts) dans les provinces dissidentes du Matabeleland (ouest) et des Midlands (centre) en 1983, tente une opération de séduction.

Il assure que son élection marque «un nouveau départ» pour «construire un nouveau Zimbabwe pour tous».

Il a aussi promis une enquête indépendante sur les violences et même dénoncé l'intervention de policiers qui ont retardé vendredi une conférence de presse de l'opposition. Ce genre de comportement «n'a pas de place dans notre société», a-t-il commenté.

La police a, dans un communiqué, dénoncé la circulation de «fausses nouvelles» sur les réseaux sociaux, appelant les Zimbabwéens à «aller travailler sans entrave».

Chronologie de la situation politique au Zimbabwe depuis novembre 2017 [Gillian HANDYSIDE / AFP]
Chronologie de la situation politique au Zimbabwe depuis novembre 2017[Gillian HANDYSIDE / AFP]

Pour Charles Laurie, du groupe de réflexion Verisk Maplecroft, «il y a une stratégie du "bon flic-mauvais flic". Pendant que Mnangagwa multiplie les platitudes sur la réconciliation et le respect de la loi, l'appareil sécuritaire qu'il contrôle réprime les opposants».

«On ne parle pas d'incidents isolés, ou de soldats qui auraient dépassé les bornes. Cela fait partie d'une stratégie», estime-t-il. «Mnangagwa a passé les huit derniers mois à essayer de construire des relations avec les gouvernements et hommes d'affaires occidentaux. Sa priorité est d'asseoir sa victoire et pour le moment le plus grand écueil, c'est la contestation du résultat. Il essaie donc de déstabiliser le MDC».

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