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Tensions en mer d'Azov : Berlin propose une médiation franco-allemande

A Madrid, le ministre allemand des Affaires étrangères Heiko Maas a déclaré que l'Allemagne et la France pourraient jouer les médiateurs entre l'Ukraine et la Russie pour éviter que les tensions entre ces deux pays ne dégénèrent en une «crise grave». [Tobias SCHWARZ / AFP]

L'Ukraine a exigé lundi la libération de ses marins et navires capturés la veille par la Russie en mer Noire au large de la Crimée, lors d'un incident sans précédent entre les deux pays, tout en appelant à de nouvelles sanctions contre Moscou. A Madrid, le ministre allemand des Affaires étrangères a déclaré que l'Allemagne et la France pourraient jouer les médiateurs entre l'Ukraine et la Russie pour éviter que les tensions entre ces deux pays ne dégénèrent en une «crise grave».

Heiko Maas a précisé qu'à l'occasion d'une réunion prévue de longue date pour lundi à Berlin avec la Russie et l'Ukraine, la France et l'Allemagne allaient «s'efforcer ensemble, et au besoin en tant que médiateurs, d'éviter que ce conflit ne débouche sur une crise grave».

Les directeurs politiques des Affaires étrangères des quatre pays devaient se retrouver dans la journée dans la capitale allemande, «la première occasion de réunir les parties au conflit», a expliqué Maas. Pour lui, les tensions autour de la Crimée et dans l'est de l'Ukraine «sont un danger pour la sécurité de l'Europe et nous allons tous deux nous engager pour arriver enfin à une solution politique que nous aurions dû trouver depuis longtemps».

Les tensions entre Kiev et Moscou ont connu une brusque flambée dimanche lorsque la Russie s'est emparée de trois navires militaires ukrainiens - deux petites vedettes blindées et un remorqueur avec au total une vingtaine de marins à bord - après leur avoir tiré dessus.

Kiev «demande» à Moscou de remettre en liberté les marins et de «retourner les navires militaires capturés», a déclaré le ministère ukrainien des Affaires étrangères dans un communiqué publié dans la nuit de dimanche à lundi.

«L'Ukraine appelle ses alliés et partenaires à prendre toutes les mesures nécessaires pour retenir l'agresseur, notamment en imposant de nouvelles sanctions» contre la Russie, a-t-il souligné.

Ukraine [ / AFP]
Ukraine [ / AFP]

Cet incident inédit, qui a fait des blessés parmi les Ukrainiens - six dont deux graves selon Kiev, trois selon Moscou - a suscité les craintes d'une escalade militaire entre les deux ex-républiques soviétiques dont les relations traversent une crise profonde depuis 2014.

Le Parlement ukrainien se réunira à 14H00 GMT pour une session extraordinaire et pourrait déclarer la loi martiale pour 60 jours dans ce pays à la demande du président Petro Porochenko.

L'incident s'est produit lorsque les bateaux tentaient d'entrer depuis la mer Noire dans le détroit de Kertch, séparant la Crimée de la Russie et marquant l'accès à la petite mer d'Azov.

Selon Kiev, des bateaux russes ont d'abord percuté le remorqueur ukrainien et bloqué l'accès à la mer d'Azov, située entre la Crimée, annexée en 2014 par la Russie, et l'est de l'Ukraine, théâtre d'une guerre entre Kiev et les séparatistes prorusses.

«Méthodes dangereuses»

Moscou a confirmé l'arraisonnement et l"«usage d'armes», en accusant les navires ukrainiens de «violer la frontière russe» et de «mener des actions illégales dans les eaux territoriales russes».

Des policiers et soldats devant l'ambassade de Russie lors d'une manifestation, le 25 novembre 2018 à Kiev, en Ukraine [Sergei SUPINSKY / AFP]
Des policiers et soldats devant l'ambassade de Russie lors d'une manifestation, le 25 novembre 2018 à Kiev, en Ukraine [Sergei SUPINSKY / AFP]

«Une violation a eu lieu, et des méthodes dangereuses ont par ailleurs été utilisées. Cela pouvait créer et cela a crée une menace et des risques pour le déplacement normal des navires dans ce corridor maritime», a accusé lundi le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov, en dénonçant une «provocation» de Kiev.

A Kiev, des dizaines d'Ukrainiens se sont rassemblés devant l'ambassade russe dans la nuit de dimanche à lundi, en lançant des fumigènes et installant des bateaux en papier devant l'ambassade. Selon les médias locaux, une voiture appartenant à un diplomate russe a également été brûlée à Kiev.

L'Union européenne et l'Otan ont appelé les deux pays à «la retenue» et la «désescalade».

Plusieurs alliés de Kiev, notamment le Canada et la Lituanie, ont condamné «l'agression» russe contre l'Ukraine.

La Turquie s'est déclarée «inquiète» et appelé à la fin de l'«escalade», alors que la Chine a appelé Moscou et Kiev à «régler leurs différends via un dialogue et des consultations».

Il s'agit d'un nouvel épisode de la crise russo-ukrainienne qui a commencé avec le soulèvement proeuropéen du Maïdan à Kiev et a débouché sur la fuite en Russie du président prorusse Viktor Ianoukovitch et sa destitution en février 2014.

Un mois plus tard, la Russie a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée en majorité russophone. En avril de la même année, un conflit armé entre Kiev et les séparatistes prorusses a éclaté dans l'Est de l'Ukraine faisant depuis plus de 10.000 morts.

«Blocage inacceptable»

Kiev et l'Occident accusent la Russie de soutenir militairement les séparatistes, ce que Moscou nie farouchement. L'Occident a imposé de lourdes sanctions économiques à la Russie pour l'annexion de la Crimée et son rôle présumé dans la guerre dans l'Est de l'Ukraine.

Plus particulièrement, la tension a monté autour du détroit de Kertch dont la Russie revendique le contrôle depuis l'annexion de Crimée et où elle a construit un nouveau pont reliant la péninsule au territoire russe.

Kiev et les Occidentaux accusent la Russie d'«entraver» délibérément la navigation des navires commerciaux entre la mer Noire et la mer d'Azov, via le détroit de Kertch.

L'Ukraine et la Russie ont par ailleurs renforcé leur présence militaire dans cette zone sensible, en y déployant des bateaux militaires ces derniers mois.

L'Allemagne a dénoncé lundi un blocage «inacceptable» de la mer d'Azov par Moscou.

Le secrétaire général du Conseil de l'Europe, Thorbjorn Jagland, a de son côté appelé à «éviter toute escalade dans la région».

Selon le centre d'analyse Eurasia Group, basé aux Etats-Unis, ce nouvel incident pourrait entraîner l'introduction de nouvelles sanctions européennes et américaines contre Moscou.

«Les gouvernements occidentaux vont soutenir l'Ukraine face à la Russie, ce qui rend de nouvelles sanctions probables», a-t-il déclaré dans un communiqué.

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