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Tout savoir sur le CETA, l'accord de libre-échange entre l'UE et le Canada, approuvé par l'Assemblée nationale

Le Canada et l'UE ont conclu un vaste accord commercial en octobre 2016, après sept ans de négociations. Le Canada et l'UE ont conclu un vaste accord commercial en octobre 2016, après sept ans de négociations. [PATRICK KOVARIK / AFP]

Conclu en octobre 2016, l'accord de libre-échange entre l'Union européenne (UE) et le Canada, appelé le CETA, a été ratifié par les députés français ce mardi 23 juillet. Un traité commercial de grande ampleur, qui cristallise les critiques.

Un accord commercial «de nouvelle génération»

Comme tout accord de libre-échange, le CETA (acronyme pour «Comprehensive Economic and Trade Agreement») prévoit une réduction drastique des droits de douane entre les pays signataires, en l'occurence l'UE et le Canada. Ils seront supprimés sur 98 % des produits échangés entre les deux zones.

Mais le texte de 2 344 pages, négocié pendant sept ans, va plus loin que cela. Il est appelé accord «de nouvelle génération» par l'UE car il ne se contente pas de s'attaquer aux barrières tarifaires au commerce, mais a également pour but de limiter les obstacles appelés «non tarifaires». Ceux-ci concernent entre autres les différences de normes entre les deux zones. Ainsi, le CETA prévoit par exemple de renforcer la coopération entre l'Union et le Canada en matière réglementaire.

Il permet aussi la reconnaissance au Canada de 143 produits d'origine géographique protégée (AOP), dont 42 françaises (roquefort, saint-nectaire, pruneaux d’Agen...). Dans le sens inverse, l'agriculture canadienne gagne un accès accru au marché européen.

La Wallonie a failli tout faire capoter

Le CETA a failli ne jamais voir le jour, et ce à cause de l'opposition de la Wallonie. Alors que le traité commercial devait être entériné le 27 octobre 2016 à Bruxelles lors d'un sommet européen, la région belge a paralysé le processus, en refusant de le voter en l'état, bloquant ainsi la signature de la Belgique et, en conséquence, de l'UE toute entière. Un «non» qui a entraîné l'annulation de la réunion des dirigeants européens.

Finalement, après avoir obtenu des clarifications sur certaines dispositions du texte (notamment l'agriculture et les services publics), la Wallonie a donné son accord le 28 octobre. Le sommet européen s'est tenu le 30 octobre 2016, lors duquel le traité a été signé par l'UE et le Canada.

Sous le feu des critiques

En France, le CETA fait l'objet de nombreuses critiques, de la part des agriculteurs comme des écologistes, mais aussi de l'ensemble des partis d'opposition. Avant le passage du texte à l'Assemblée nationale, plus de 70 organisations (Attac France, CGT, Greenpeace, UFC-Que Choisir...) avaient dans une lettre demandé «solennellement» aux députés «de ne pas ratifier le CETA». Trois reproches sont régulièrement faits au texte.

Premièrement, ses détracteurs craignent son impact sur l'agriculture française, et notamment sur la filière bovine. Le CETA prévoit en effet que le Canada puisse exporter chaque année sans droits de douane vers l’Europe 67 950 tonnes de bœuf. Le chef de file des Républicains à l'Assemblée Christian Jacob redoute ainsi une «déstabilisation de la filière [bovine]». Selon les chiffres du Canada, cela n'est pas le cas à l'heure actuelle, puisque, depuis l'entrée en vigueur provisoire du CETA en septembre 2017, le pays nord-américain n'a exporté vers l'UE que 1 000 tonnes de viande de bœuf, soit à peine 2 % du quota accordé par le CETA.

Par ailleurs, le risque sanitaire est également mis en avant. Les éleveurs bovins et les ONG s'alarment de la possible arrivée massive de bœufs nourris avec certaines farines animales et dopés aux antibiotiques, des pratiques courantes outre-Atlantique. Les farines animales réveillent notamment chez les agriculteurs le douloureux souvenir de la crise de la vache folle, qui a touché l'Europe dans les années 1990.

Enfin, l'accord représente pour certains une menace pour l'environnement. Le Parti socialiste (PS) dénonce un texte «incompatible avec les accords de Paris» et sans véritable «veto climatique» malgré les affirmations de la majorité. Ce dernier consiste en un mécanisme permettant à l'UE et au Canada de protéger ses normes environnementales en cas de contestation d'une entreprise privée. Même si ce dispositif fait partie de l'accord, certains dénoncent une version édulcorée et pas assez verrouillée.

Pas le seul accord de libre-échange dans l'actualité

La ratification du CETA par les députés français intervient alors qu'un autre accord de libre-échange de l'UE fait lui aussi parler de lui en ce moment. En effet, après vingt ans de négociations, l'Union et le Mercosur, un bloc regroupant quatre pays d'Amérique latine (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay), ont conclu fin juin un traité commercial.

Comme le CETA, il supprime la plupart des droits de douane (91 %) imposés par le Mercosur sur les produits européens. Comme le CETA, il prévoit que l'UE ouvre son marché agricole aux produits sud-américains, notamment la viande bovine. Comme le CETA, il suscite l'opposition des écologistes, des agriculteurs et des partis d'opposition. Mais la majorité LREM et MoDem à l'Assemblée a plaidé pour éviter un «amalgame» entre le CETA et l'accord UE-Mercosur. En effet, alors que la majorité est favorable au traité avec le Canada, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a assuré le 2 juillet dernier que la France n'était «pour l'instant pas prêt[e] à ratifier» l'accord UE-Mercosur.

Un accord pas encore définitivement reconnu

Même avec la ratification de l'accord par les députés français, le CETA n'est pas encore officiellement reconnu. En effet, pour entrer en application définitivement et dans sa totalité (90 % du texte est déjà en vigueur depuis septembre 2017), le traité doit être approuvé par les 38 assemblées nationales et régionales d’Europe.

Après l'Assemblée nationale, le CETA doit donc également passer en France devant le Sénat, à une date pas encore fixée. A l'échelle de l'Union, treize Etats ont déjà ratifié l'accord.

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