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Le gouvernement turc détruit plus de 300.000 livres, la purge continue

Selon ses détracteurs, le chef de l'Etat, Recep Tayyip Erdogan, entend ainsi faire disparaître toute trace de son opposant Fethullah Gülen.[© Adem ALTAN / AFP]

Un autodafé en toute discrétion. Le gouvernement turc a annoncé cette semaine avoir détruit des centaines de milliers de livres dans le but d'éliminer toute trace écrite de Fethullah Gülan, opposant notoire au chef de l'Etat, Recep Tayyip Erdogan.

D'après le ministre de l'Education turc, Ziya Selçuk, les 301.878 ouvrages en question, issus des bibliothèques et institutions nationales, seraient en effet liés de près ou de loin au détracteur, exilé aux Etats-Unis depuis qu'il a été accusé par Ankara d'avoir fomenté le coup d'Etat manqué de juillet 2016. C'est du moins ce que rapporte le quotidien britannique The Guardian le mardi 6 août.

Sauf que plusieurs associations contestent la véracité de cette version, assénant que la destruction des ouvrages va bien au-delà d'un litige politique et s'inscrit dans une grave crise de la liberté d'expression. Les exemples ne manquent pas : selon les médias, rien qu'en 2016, un livre de mathématiques a été banni des cursus scolaires pour avoir rédigé les initiales de Fethullah Gülen dans une question «du point F au point G» (visiblement sans rapport avec le fameux «point G»), plus de 1,8 million de manuels scolaires ont été réimprimés pour ne plus faire apparaître la mention «Pennsylvania» (l'Etat américain où Gülen est réfugié), et plusieurs rues du pays ont été rebaptisées pour éviter toute allusion à l'opposant.

La «propagande terroriste» a bon dos

L'association d'écrivains Pen International résume la situation depuis l'état d'urgence décrété après la tentative de putsch :«En à peine trois ans, le paysage éditorial turc a été pratiquement décimé, avec la fermeture de plus d'un quart des maisons d'édition [29 au total] pour 'diffusion de propagande terroriste'.» Sans compter, selon un rapport de 2018 de Pen English, les quelque 200 médias et maisons d'éditions qui ont été fermés, les 80 écrivains visés par des enquêtes et des procès (et pour certains emprisonnés), et les 5.822 professeurs d'universités contestataires licenciés.

La défaite du parti d'Erdogan à la mairie d'Istanbul, en juin dernier, pourrait-elle être un premier frein à la politique de répression menée par le gouvernement turc depuis au moins trois ans ? Ses détracteurs l'espèrent.

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