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Auschwitz, Chernobyl, Fukushima : quand le tourisme dérape

Ce décapsuleur était vendu par Amazon. Ce décapsuleur était vendu par Amazon.[Capture d'écran diffusée par le Twitter du camp d'Auschwitz.]

Le compte Twitter du camp de concentration d'Auschwitz a épinglé Amazon lundi 2 décembre en lui demandant de retirer de la vente un décapsuleur à son image. Un nouveau dérapage autour d'un lieu de mémoire qui rejoint une liste déjà longue.

Devant le tollé crée par la vente de décorations de Noël à l'image d'Auschwitz (et aussi d'un tapis de souris...), la firme américaine s'est dépêchée d'agir et il n'est plus possible d'acheter ces objets.

des comportements irrespecteux déjà pointés du doigt

Ce n'est pas la première fois que le mémorial d'Auschwitz dénonce des comportements peu en adéquation avec la solennité du lieu. En mars 2019, le musée alertait sur Twitter à propos de l'attitude de certains de ses visiteurs : « Quand vous venez ici, souvenez-vous que vous êtes sur un site ou plus d'un million de personnes ont été tuées ».

En cause, des photos diffusées sur les réseaux sociaux montrant des visiteurs se balancant sur les rails qui accueillaient les trains remplis des futurs prisonniers. « Il y a des endroits plus appropriés pour apprendre comment marcher sur des rails que le site qui symbolise la déportation de centaines de miliers de personnes vers leur mort » s'indignait le musée sur le réseau social américain. 

Le phénomène du «tourisme noir»

Ce cocktail explosif qui mélange tourisme de masse et réseaux sociaux n'a pas frappé qu'à Auschwitz. Le succès de la série Chernobyl a donné envie à de nombreux internautes de se rendre dans la ville de Prypiat, en Ukraine, pour visiter le lieu de la catastrophe nucléaire de 1986. Les clichés que certains touristes ont diffusé sur les réseaux sociaux peuvent laisser pantois, certains n'hésitant pas à se mettre en scène dans ce lieu devasté.

Craig Mazin, le créateur de la série, a d'ailleurs tenu à rappeler quelques règles élémentaires de bienséance sur Twitter.

«C'est magnifique que Chernobyl soit à l'origine d'une arrivée massive de touristes sur la zone d'exclusion. Mais oui, j'ai vu les photos qui tournent. Si vous visitez cet endroit, rappelez-vous qu'une terrible tragédie a eu lieu ici. Comportez-vous avec respect en mémoire de ceux qui ont souffert et se sont sacrifiés.»

La situation est la même dans les villes proches de Fukushima, la centrale nucléaire japonaise qui a connu un accident en 2011. Les villes contaminées voient affluer un nombre important de touristes, pris en charge par des agences locales qui organisent des circuits touristiques bien rôdés. Ce business qui prend de plus en plus d'importance donne le sentiment étrange de mélanger voyeurisme et devoir de mémoire.

La visite de lieux macabres, souvent associés à une tragédie, est devenu un phénomène mondial connu sous le nom de «tourisme noir» (qui vient de l'anglais «dark tourism»). Une série Netflix, «Dark Tourist», a été consacrée à ce sujet de société en 2018, popularisant l'expression. Les exemples de ce phénomène sont nombreux : en Italie, l'épave du Costa Concordia qui a sombré en 2012 coûtant la vie à plusieurs dizaines de personnes, était devenue un lieu touristique à la mode où les visiteurs venait chercher un cliché insolite. Le bateau a finalement été remorqué en 2013.

Le photographe Ambroise Tézenas a largement documenté ce phénomène, immortalisant plusieurs lieux emblématiques de ce qu'il nomme le «tourisme de la désolation». Une série à voir ici.    

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