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Pourquoi l'ambassade de Chine est-elle aussi agressive avec la France ?

Lu Shaye, ambassadeur de Chine en France.[Martin BUREAU / AFP]

«Toutes les limites communément admises» ont été franchies. Le ministère des Affaires étrangères et son directeur Asie, Bertrand Lothory, n’ont pas du tout apprécié les dernières saillies verbales de l’ambassadeur chinois à Paris. Depuis plusieurs jours, les relations entre les diplomates du pays communiste et les gouvernement européens sont particulièrement tendues.

Lu Shaye, en poste en France, a ainsi traité le chercheur Antoine Bondaz, spécialiste de l’Asie à la Fondation pour la recherche stratégique, de «petite frappe», «hyène folle» et «troll idéologique», dans un communiqué. Il lui reproche de vouloir se rendre à Taïwan avec des parlementaires français, une île que Pékin revendique comme sa province et dont l’indépendance est source de vives tensions. Une façon de signifier à ceux qui s’intéressent à la question de rester en dehors des affaires chinoises, puisqu’il a également fait pression sur les élus pour ne pas qu’ils fassent ce voyage.

Le ministère français des Affaires étrangères a réagi, indiquant à l’ambassadeur que «l’insulte, l’invective, la menace contre des parlementaires, des chercheurs» sont des «méthodes d’intimidation inacceptables». Il avait convoqué Lu Shaye lundi, mais celui-ci ne s’y était pas rendu, au motif que son emploi du temps ne le permettait pas.

«Le problème d'agenda, je n'y crois pas trop et ça ne marche pas dans ce sens là», a répondu mardi Clément Beaune, secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, sur franceinfo. «Ni la France ni l'Europe ne sont des paillassons. Quand on est convoqué, quand on est ambassadeur, on se rend à une convocation au ministère des Affaires étrangères».

Bataille de sanctions entre l'UE et la Chine

Comme Paris, les gouvernements des Pays-Bas, d’Allemagne, du Danemark, de Suède et de Lituanie ont convoqué leurs ambassadeurs chinois ces derniers jours, pour s’entretenir des sanctions prises par le régime communiste contre dix parlementaires européens pour leur dénonciation de la répression des Ouïghours. La Belgique et l’Italie doivent faire de même. Chose qui ne plait pas au régime communiste.

«La Chine n’accepte pas cette façon déraisonnable de certains pays européens de convoquer ses ambassadeurs», a fait savoir sa porte-parole des Affaires étrangères. «Les Européens s’autorisent à diffamer et à attaquer les autres et imposent arbitrairement des sanctions (interdiction de visas et gels d’avoirs pour quatre responsables, ndlr) fondées sur de fausses informations et des mensonges, mais ils refusent de laisser la Chine répliquer et riposter».

«C’est du deux poids, deux mesures, un exemple d’intimidation et d’hypocrisie», a-t-elle poursuivi.

Une réponse que la chercheuse Camille Brugier, spécialiste des questions chinoises à l’Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire, analyse dans Le Parisien comme «une politique de statut qui se joue là». «La Chine considère comme très offensant, voire humiliant, que l’Union européenne et la France, petite institution et petit pays à ses yeux, lui fassent la morale». Une question d’ego et une façon de montrer les muscles, donc, à l’heure où l’immense pays de près d’1,4 milliard d’habitants cherche à ce que son influence diplomatique devienne aussi large que sa puissance économique.

Dans un tweet daté du 22 mars, l’ambassade de Chine en France indiquait d’ailleurs que «voir la diplomatie chinoise devenir une diplomatie d'"agneaux" qui encaisse les attaques sans broncher (est une) époque bel et bien révolue».

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