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Génocide : la France a «failli» au Rwanda, selon un rapport remis à Emmanuel Macron

L'historien français Vincent Duclert remet au président français Emmanuel Macron (g) un rapport sur la politique française au Rwanda entre 1990 et 1994 dans la salle des fêtes du palais de l'Elysée à Paris, le 26 mars 2021 [Ludovic MARIN / POOL/AFP] Ce rapport d'historiens est le fruit de deux années d'analyse d'archives. [Ludovic MARIN / POOL/AFP]

Un rapport de plus de 1.000 pages remis, ce vendredi 26 mars, à Emmanuel Macron, pointe du doigt la «faillite» de la France et ses «responsabilités accablantes» dans le génocide des Tutsi du Rwanda de 1994.

Ce rapport d'historiens, fruit de deux années d'analyse des archives relatives à la politique française au Rwanda entre 1990 et 1994, dresse un bilan cinglant de l'implication militaire et politique de Paris, tout en écartant la «complicité» de génocide longtemps dénoncée par Kigali. Ce rapport pourrait être décisif dans la relation entre les deux pays, empoisonnée depuis plus de 25 ans par les violentes controverses sur le rôle de la France au Rwanda.

Dans ses conclusions, la commission de 14 historiens présidée par Vincent Duclert, explique que la France est demeurée «aveugle face à la préparation du génocide» des Tutsi du Rwanda de 1994 et porte donc des «responsabilités lourdes et accablantes» dans la tragédie.

Le rôle de François Mitterand

Les historiens reviennent longuement sur l'engagement français durant ces quatre années décisives, pendant lesquelles s'est mise en place la dérive génocidaire du régime hutu, avec pour conséquence la tragédie de 1994. En effet, quelque 800.000 personnes, majoritairement tutsi, ont été exterminées dans des conditions abominables entre avril et juillet.

Le rôle de François Mitterand, président de la République à l'époque, est notamment mis en cause. «La France s'est longuement investie au côté d'un régime qui encourageait des massacres racistes. Elle est demeurée aveugle face à la préparation» du génocide et «cet alignement sur le pouvoir rwandais procède d'une volonté du chef de l'Etat de la présidence de la République». 

La France «a tardé à rompre avec les responsables»

Cette relation, doublée «d'une grille de lecture ethniciste» de la situation au Rwanda, a justifié «la livraison en quantités considérables d'armes et de munitions au régime d'Habyarimana, tout comme l'implication très grande des militaires français dans la formation des Forces armées rwandaises» gouvernementales.

Au moment du génocide, la France «a tardé à rompre avec les responsables, et a continué à placer la menace du FPR (Front patriotique rwandais, l'ex-rébellion tutsi qui mit fin au génocide) au sommet de ses préoccupations», soulignent les historiens. «Elle a réagi tardivement» avec l'opération militaro-humanitaire Turquoise entre juin et août 1994, «qui a permis de sauver de nombreuses vies, mais non celles de la très grande majorité des Tutsi du Rwanda exterminés dès les premières semaines du génocide», précisent-ils.

«une avancée considérable»

L'Elysée a réagi, ce vendredi, après la publication de ce rapport, qui «marque une avancée considérable» pour comprendre l'engagement français au Rwanda, a estimé le chef de l'Etat français. La France, où se sont installés plusieurs personnes suspectées d'avoir des responsabilités dans le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, «poursuivra ses efforts» contre les responsables de génocides, a-t-il ajouté.

De son côté, le Rwanda s'est félicité de ce rapport, qui constitue «un pas important vers une compréhension commune du rôle de la France». 

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