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Tunisie : la Constitution adoptée à 94%, après une forte abstention

Des centaines de Tunisiens ont célébré leur victoire «face aux islamistes» sur l’avenue Habib Bourguiba aux côtés de Kaïs Saied sonnant leurs klaxons et brandissant le drapeau national. [Anis MILI / AFP]

La nouvelle Constitution tunisienne voulue par le président tunisien Kaïs Saied a été adoptée avec plus de 94% de «oui», selon les résultats officiels préliminaires annoncés ce mardi soir par l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE) en Tunisie.

Une nouvelle ère s'installe. Berceau du Printemps arabe en 2011, la Tunisie va officiellement durcir son régime politique dans les prochaines semaines passant d’un régime parlementaire à un régime hyperprésidentiel.  

En effet, près d'un an après avoir limogé le Premier ministre et dissous le Parlement, les Tunisiens ont été appelés, ce lundi, à se prononcer sur la nouvelle Constitution controversée proposée par le chef de l’État Kaïs Saied. Cette dernière lui accorde les pleins pouvoirs au risque de mettre en péril la jeune démocratie tunisienne.

Faible participation et appel au boycott

Selon les derniers résultats officiels préliminaires annoncés par l’autorité électorale (ISIE) ce mardi soir, 2,75 millions d’électeurs ont participé à ce vote. Le «oui» l’a emporté avec 94,6% des voix malgré une participation très faible de seulement 30,5% des inscrits.

Cette faible participation s'explique notamment par l’appel au boycott du parti islamo-conservateur Ennahdha et de la coalition d’opposants Front du salut national (FSN).  

«L’Isie annonce que la nouvelle Constitution a été acceptée», a déclaré le président de l’Isie Farouk Bouasker en direct du Palais des Congrès à la télévision tunisienne ce mardi soir.

À l’issue des premières estimations, annoncées lundi soir par le cabinet Sigma conseil, des centaines de Tunisiens ont célébré leur victoire «face aux islamistes» sur l’avenue Habib Bourguiba à Tunis, aux côtés de Kaïs Saied, sonnant leurs klaxons et brandissant le drapeau national. Les pro-Constitution ont crié «Kaïs, on se sacrifie pour toi» et «Ennahdha, dégage».

Pour l’ancien ministre de l’Éducation et membre du FSN, Néji Jelloul, les résultats préliminaires ne reflètent pas une vraie adhésion au projet de constitution proposé par le président Kaïs Saied.

«Les Tunisiens ont voté contre Ennahdha, pas pour le projet de Constitution», a-t-il dit, relayé par le média tunisien Kapitalis. «Le gouffre s’est creusé entre les Tunisiens après le référendum, et le peuple est sorti divisé», a-t-il ajouté.

L'UE et les États-Unis inquiéts

À l’étranger, les États-Unis ont été les premiers à réagir. Si la Constitution accorde de vastes prérogatives au président tunisien, Ned Price, porte-parole du département d’État américain, a mis en garde contre le risque que la Constitution ne garantisse pas suffisamment les droits et libertés en Tunisie.

«Les inquiétudes de beaucoup de Tunisiens concernent l’absence d’un processus inclusif et transparent, ainsi que d’un véritable débat public durant la rédaction de la nouvelle Constitution. Nous savons aussi que des inquiétudes concernent les contrepoids affaiblis dans la nouvelle Constitution, ce qui compromet la protection des droits de l’Homme et des libertés fondamentales», s’est-il inquiété sur France 24.

Ce mercredi 27 juillet, l'Union européenne, à travers son Haut Représentant Josep Borell, a insisté sur la nécessité d’un «large consensus par les différentes forces politiques, y compris les parties politiques et la société civile» car cela est «essentiel pour la réussite d’un processus qui préserve les acquis démocratiques et nécessaire pour toutes les réformes politiques et économiques importantes qu’entreprendra la Tunisie». 

«La liberté d’expression, la liberté de la presse, la liberté de manifestation ainsi que les autres libertés fondamentales sont des valeurs essentielles des États démocratiques, auxquelles l’Union européenne tient tout particulièrement et qui doivent être préservées», a ajouté l'UE dans une déclaration publiée ce mercredi.

Implication française

Le 21 juillet 2022, la ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna avait pris contact avec son homologue tunisien Othman Jerandi. Dans un communiqué publié par les autorités françaises, la ministre avait «formé le vœu que la transition politique et institutionnelle se déroule dans les meilleures conditions possibles, dans le dialogue et le respect de l’État de droit», peut-on lire.

Catherine Colonna avait également rappelé «l’importance que la France accorde à la préservation des acquis démocratiques de la révolution de 2011 et à la garantie des droits fondamentaux et des libertés individuelles».

En attendant, Kaïs Saied a assuré que les libertés seront «intouchables». Les législatives sont prévues le 17 décembre prochain grâce à cette nouvelle Constitution.

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