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Etats-Unis : une adolescente accusée d'avortement illégal après que Facebook a révélé ses messages privés

Facebook a fourni les messages privés échangés entre Céleste et Jessica Burgess à la police, dans le cadre d'un mandat de perquisition. [OLIVIER DOULIERY / AFP]

Le groupe Meta, propriétaire de Facebook, est au coeur d'une polémique après avoir participé à la mise en examen d'une adolescente de 17 ans pour avortement illégal. Le réseau social a fourni des conversations privées à la police.

Céleste Burgess a 17 ans et, en avril dernier, elle a souhaité mettre un terme à une grossesse non désirée. Dans un contexte tendu aux Etats-Unis, alors que la Cour suprême a révoqué en juin l'arrêt Roe v. Wade, qui garantissait le droit fédéral à l'avortement, la jeune fille est accusée d'avoir pratiqué un IVG illégal. L'enquête s'appuie notamment sur des messages privés échangés sur Facebook, que le réseau social a fourni à la police.

C'est ce point de l'affaire en particulier qui suscite la polémique outre-Atlantique. D'après Forbes, les soupçons des autorités de l'Etat du Nebraska à l'égard de la jeune fille n'ont dans un premier temps reposé que sur un «tuyau». Ce dernier indiquait que Céleste Burgess avait fait une fausse couche en avril et s'était débarrassée du foetus en secret, avec l'aide de sa mère.

Les deux femmes ont d'abord été accusées d'avoir dissimulé ou abandonné un cadavre humain et d'avoir caché la mort d'une personne. L'enquête a pris un autre tournant lorsqu'un mandat de perquisition a été délivré pour accéder aux comptes Facebook de l'adolescente et de sa mère.

Le réseau social s'est exécuté et les enquêteurs ont pu lire des messages échangés entre les deux femmes, décrivant comment Jessica Burgess avait obtenu des pilules abortives pour sa fille. Une découverte qui a motivé les poursuites pour avortement illégal à leur encontre.

Bon nombre d'utilisateurs de Facebook se sont ainsi montrés inquiets concernant la confidentialité de leurs données. Le fait qu'il soit question du droit à l'avortement, aujourd'hui fragilisé aux Etats-Unis, rend le sujet d'autant plus sensible. Après sa révocation au niveau fédéral, des élus démocrates et des associations de défense des droits humains avaient justement craint de telles situations et demandé aux plate-formes de renforcer la protection des données personnelles.

Une semaine après la décision de la Cour suprême, Google avait d'ailleurs annoncé que les données de localisation de ses utilisateurs seraient automatiquement supprimées en cas de visite d'une clinique spécialisée pratiquant des avortements.

Rien «ne mentionnait un avortement», selon meta

Le groupe Meta, qui détient Facebook, avait quant à lui adopté une position moins tranchée. D'un côté, il proposait de rembourser les déplacements des employés ayant «besoin d'accéder à des soins de santé sexuelle situés dans un autre Etat» et, d'un autre, il leur conseillait de ne pas «discuter ouvertement de l'avortement au travail». Selon le New York Times, un mémo a circulé dans l'entreprise pour mettre en garde les salariés de «l'environnement de travail hostile» qu'ils risquaient de créer avec ce genre de discussions. 

Sous le feu des critiques dans le cadre de l'affaire Céleste Burgess, l'entreprise a publié un communiqué dans lequel elle assure que «rien dans les mandats que nous avons reçus des forces de l’ordre début juin, avant la décision de la Cour suprême [le 24 juin, Ndlr], ne mentionnait un avortement».

Soumis jusqu'ici à des obligations de non-divulgation, désormais levées, Meta affirme que «les mandats concernaient des accusations liées à une enquête criminelle et les documents judiciaires indiquent que la police à l’époque enquêtait sur le cas d’un bébé mort-né qui a été brûlé et enterré, et non sur une décision d’avorter». Pour certains observateurs, cette affaire montre toutefois que le groupe est prêt à se conformer aux ordonnances des tribunaux des Etats qui ont criminalisé l'interruption volontaire de grossesse.

Selon Forbes, Céleste Burgess est l'une des premières à voir son activité Facebook utilisée pour l'incriminer dans une affaire d'avortement illégal depuis la révocation de l'arrêt Roe v. Wade. Pour rappel, cette décision prise par la Cour suprême ne rend pas tous les IVG illégaux sur le sol américain mais laisse chaque Etat libre de les interdire ou non. En l'occurrence, le Nebraska proscrit toute interruption de grossesse au-delà de 20 semaines, comme c'était déjà le cas avant le 24 juin.

Désormais, Céleste et Jessica Burgess attendent leur procès devant le tribunal de district du comté de Madison, en octobre. La première est accusée d'avoir dissimulé ou abandonné un cadavre humain, mais aussi d'avoir caché la mort de quelqu'un et fait de fausse déclaration. La seconde, d'avoir pratiqué un avortement au-delà de 20 semaines de grossesse et sans être un médecin agréé, ce qui constitue deux chefs d'accusation, ainsi que d'avoir dissimulé ou abandonné un cadavre humain. Il est prévu que l'adolescente soit jugée en tant qu'adulte.

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