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Election présidentielle au Brésil : tout savoir sur Lula, le nouveau président

Lula remporté le second tour de la présidentielle au Brésil avec 50,9 des voix Lula remporté le second tour de la présidentielle au Brésil avec 50,9 des voix [Bruna Prado / AP ]

Luiz Inacio Lula da Silva, plus connu sous le nom de Lula, a remporté l'élection présidentielle au Brésil ce dimanche 30 octobre, entamant ainsi son troisième mandat. Figure du syndicalisme ouvrier, Lula a été élu président pour la première fois en 2002.

A 76 ans, Luiz Inacio Lula da Silva a remporté à l’élection présidentielle au Brésil ce dimanche, et va donc entamer son troisième mandat. Au total, il s’agit de la sixième élection à laquelle il se présente. Donné favori de l’élection depuis des mois, face à son principal adversaire, l’actuel président d’extrême droite Jair Bolsonaro, Lula, de son surnom, qui a remporté le scrutin d'une très courte tête, a un long passé politique derrière lui.

Du syndicalisme au Parti des Travailleurs

Issu d’une famille modeste du nord-est du Brésil, Lula quitte l’école à 10 ans pour travailler dans les rues de Sao Paulo afin de subvenir aux besoins de sa mère et de ses sept frères et sœurs. Après avoir été cireur de chaussures et vendeur de rue, il rentre au début de l’adolescence dans une usine de métallurgie et devient ouvrier.

A 21 ans, Lula se syndicalise alors que le Brésil connaît un boum économique dans les années 1960 mais qui ne bénéficie pas à la classe ouvrière. Fort de son talent de tribun, il devient l’une des figures de proue du syndicat de la métallurgie, ce qui lui vaut quelques séjours en prison sous la dictature militaire (1964-1985). Après le premier choc pétrolier en 1973 et la crise économique mondiale qui en découle, de nombreux ouvriers de la région de Sao Paulo se mettent en grève, avec Lula comme leader du mouvement.

C’est en 1980 qu'il décide de passer du syndicalisme à la politique, en fondant le Parti des Travailleurs (PT), dont il est toujours le leader aujourd’hui. Lula est élu député sous l’étiquette du PT en 1986 et entre au Congrès brésilien, après la fin de la dictature militaire. Il devient une figure de l’opposition à gauche et se présente trois fois de suite à l’élection présidentielle, en 1989, 1994 et 1998, qu’il perd à chaque fois.  

Enfin président, Lula devient très populaire

Après trois tentatives infructueuses, Lula remporte finalement l’élection présidentielle suivante, rentre au palais présidentiel le 1er janvier 2003, et devient le premier président de gauche du pays. Il prend la tête du pays avec du pain sur la planche, à cause d'une inflation généralisée, une monnaie dévaluée et de fortes inégalités sociales…

Lula poursuit la politique de rigueur monétaire et financière entamée par son prédécesseur, pour ancrer davantage le Brésil dans la mondialisation, mais y ajoute ce pourquoi il s’est fait élire : sa politique sociale. Il réhausse le salaire minimum, fait de la lutte contre la faim sa priorité, conçoit des grands plans de scolarisation des enfants, donne accès à l’eau potable pour tous… L’une de ses mesures phares : systématiser la Bolsa familia (Bourse famille en français), une allocation familiale versée aux familles modestes, qui doivent en contrepartie scolariser leurs enfants et effectuer les vaccins obligatoires.

L’économie brésilienne se remet sur pied, et Lula est réélu pour un deuxième mandat, en 2006, avec plus de 60% des voix au second tour. A l’issue de ses 8 ans au pouvoir, la malnutrition a reculé de 70% et le taux de mortalité infantile de 47%, selon les bilans des Nations unies. Plus de 3 millions de Brésiliens sont sortis de la pauvreté pour rejoindre la classe moyenne, et la croissance du pays dépasse les 7%.

En 2010, Lula quitte le pouvoir avec plus de 80% d’opinion favorable de la population, du jamais-vu dans un pays démocratique. Sa protégée, Dilma Rousseff, sa cheffe de cabinet, est investie présidente en 2011. 

Accusation de corruption et emprisonnement

En 2014 alors que Dilma Rousseff est présidente, le scandale Petrobras éclate. Une vaste enquête menée par des centaines d’agents fédéraux révèle un système de pot-de-vin et de détournements de fonds de géants du BTP et du groupe public pétrolier Petrobras, impliquant des entrepreneurs, mais aussi des dizaines de personnalités politiques, notamment certains cadres du Parti des Travailleurs et de la coalition de la gauche au pouvoir.

En 2016, après des mois de scandale et des manifestations géantes à travers le Brésil, la population ressentant une grande défiance vis-à-vis du PT, Dilma Rousseff, dont l’image a été entachée par le scandale, est destituée. Le juge Sergio Moro, à la tête de l’opération baptisée «Lava Jato» («Lavage express» en français), ordonne la même année un mandat d’amener contre Lula, soupçonné d’avoir reçu en cadeau un «triplex», appartement de trois étages, de la part d’un groupe de BTP impliqué dans le scandale. Il est également suspecté d’avoir tenté de faire obstruction à la justice en complicité avec Dilma Rousseff, qui aurait cherché à le nommer ministre pour lui éviter toute poursuite judiciaire.

Le 12 juillet 2017, le juge Moro condamne Lula à neuf ans et six mois de prison pour blanchiment d’argent et corruption, une première dans l’histoire du Brésil. Lula fait appel de ce jugement, mais en deuxième instance, sa culpabilité est confirmée et sa peine alourdie à douze ans et un mois de réclusion. Il est emprisonné en avril 2018, et ne peut pas se présenter à l’élection présidentielle du mois d’octobre.

Retour en force pour l’élection 2022

Pour une partie de la population brésilienne, Lula a été victime d’un procès politique. En juin 2019, le journal d’investigation The Intercept dévoile une enquête selon laquelle le juge Sergio Moro aurait comploté avec les enquêteurs de l’affaire Lava Jato pour empêcher Lula de se présenter à l’élection présidentielle de 2018, lors de laquelle Jair Bolsonaro, le candidat d’extrême droite, a été élu. Après avoir purgé un sixième de sa peine, Lula est libéré en novembre 2019 par la Cour Suprême, et en mars 2021, toutes ses condamnations sont annulées par le Tribunal Suprême Fédéral. L'institution estime que le tribunal qui l’a condamné n’était pas compétent dans cette affaire, et a établi la partialité du juge Moro, par la suite devenu ministre de la Justice de Jair Bolsonaro.

Lula a donc retrouvé ses droits politiques, et a pu se présenter à l’élection présidentielle de 2022. Depuis sa sortie de prison, Lula s'est préparé à ce scrutin historique, et a multiplié les déplacements à travers le Brésil, mais aussi à l’étranger. Sa popularité acquise tout au long de sa carrière politique, ainsi que sur que le bilan de ces deux précédents mandats ont fait pencher la balance en sa faveur, bien que l'élection ait été très serrée : Lula a remporté le second tour avec 50,9% des voix, contre 49,1% pour Jair Bolsonaro. 

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