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Georges Mathieu, "calligraphe occidental" et père du "happening"

Le peintre Georges Mathieu pose devant certains de ses tableaux, en 1971 à Paris.[AFP/Archives]

Le logo d'Antenne 2, la pièce de dix francs, des toiles peintes en public et en accéléré et de magnifiques bacchantes: le peintre et artiste multicartes Georges Mathieu, décédé dimanche à l'âge de 91 ans, était le père de l'Abstraction lyrique et un précurseur du "happening".

Figure artistique emblématique des années 60 et 70, celui qu'André Malraux qualifiait de "calligraphe occidental", a été l'un des artistes français les plus célèbres au monde. Ses toiles sont exposées dans nombre de musées. Il fut aussi paradoxalement le symbole du peintre "officiel" en France, s'appuyant notamment sur le président Georges Pompidou, très ouvert à l'art contemporain.

Adulé au Japon, "il est à la peinture abstraite ce que Bernard Buffet fut à la peinture figurative: un trublion", dit de lui un célèbre critique d'art.

Né le 27 janvier 1921 à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), Georges Victor Mathieu d'Escaudoeuvres, dit Georges Mathieu, a d'abord étudié le droit et l'anglais, qu'il a enseigné tout en commençant la peinture en 1942.

Dès ses débuts en peinture, il abandonne la figuration pour se lancer dans "l'Abstraction lyrique", titre qu'il donne à une exposition organisée en décembre 1947 à Paris: un art libéré de toutes les contraintes et habitudes classiques, dans lequel il veut privilégier le geste, le mouvement et l'émotion, face à l'abstraction géométrique de Mondrian.

L'Abstraction lyrique devient très vite un mouvement avec des peintres comme Hans Hartung, Gérard Schneider, Wols ou Jean-Paul Riopelle.

20 minutes, 800 tubes de couleurs

Mathieu, qui peint directement sur la toile avec ses tubes de couleur, ajoute au geste vitesse et improvisation. L'artiste -qui fera connaître Pollock et "l'action painting" aux Français- se fait précurseur du "happening" en organisant des spectacles au cours desquels il peint des toiles immenses.

Au cours d'une "Nuit de la Poésie" au théâtre Sarah-Berhnardt de Paris en 1956, il peint ainsi en 20 minutes, devant 2.000 spectateurs, une toile de douze mètres sur quatre, avec 800 tubes de couleurs, de longs pinceaux et une échelle roulante, raconte le critique d'art Michel Ragon.

Il récidive à Tokyo l'année suivante en peignant 21 toiles en trois jours.

A la fin des années 1960 et dans les années 1970, voulant faire passer "ces formes dans la vie" et transformer "son langage en style", il se fait graphiste, architecte et designer: il crée une pièce de dix francs (1974), dessine des timbres-poste, dont un en hommage au Général de Gaulle, les plans d'une usine de transformateurs électriques, des affiches pour Air France, le trophée des 7 d'Or et le logo d'Antenne 2, des modèles de haute-couture, de mobilier, de bijoux ou de tapisseries.

Engagé, il demande "la suppression du ministère de la Culture" et le licenciement des 15.000 inspecteurs de la Création, pour lutter "contre (leur) emprise administrative sclérosante", dans une lettre de l'Académie des Beaux-arts, dont il était membre depuis 1975.

Une rétrospective lui a été consacrée en 2003 à Paris et quelques-unes de ses toiles accrochées en 2006 au musée du Luxembourg lors d'une exposition sur l'Abstraction lyrique. Sa dernière exposition personnelle remonte à 2006 à Versailles.

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