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A Paris, des hangars immenses ou de petits centres pour loger les SDF - TERRAINS DE CAMPAGNE

Mohammed, 62 ans, Tunisien sans papiers à la rue depuis dix ans, dort chaque soir avec des centaines d'autres SDF dans d'immenses hangars au nord de Paris.[AFP]

Mohammed, 62 ans, Tunisien sans papiers à la rue depuis dix ans, dort chaque soir avec des centaines d'autres SDF dans d'immenses hangars au nord de Paris.

En tout, 10.000 à 15.000 SDF vivent à Paris, dont plus de 4.000 dorment dans la rue, selon les estimations des associations et de la mairie.

Ce soir, bonnet enfoncé sur la tête, Mohammed, qui ne souhaite pas donner son nom, est arrivé avec l'un des bus affrétés par la RATP pour conduire des sans-abri à la Boulangerie, dans le XVIIIe arrondissement de Paris.

Comme tous les matins, il a appelé le Samu social (115) qui lui a réservé une place.

"C'est les plus cassés, les plus fracassés", résume Marie-Claire Pinsolle, la directrice de ce centre d'urgence de 386 places, géré par Adoma (l'ex-Sonacotra), installé dans des hangars spartiates de l'armée, ouvert la nuit seulement, mais toute l'année.

"J'ai pas le RSA, rien. Je posais des carrelages, des parquets, au noir, maintenant je bouffe mes économies. La journée, je reste dans les cafés. Mais la nuit, vaut mieux être ici au chaud que dans la rue", dit Mohammed, en boitant vers le lit numéro 36, après avoir laissé son sac dans un casier et avalé un repas de l'Armée du Salut.

Dans chaque dortoir, une centaine de lits superposés aux matelas plastifiés, avec des draps en papier, pas de couverture. Les sans-abri, en grande majorité de jeunes migrants (Afghans, Iraniens, Tibétains), y dorment habillés dans une odeur fétide.

"Il y a trop de bruit, j'arrive pas à bien dormir et puis c'est dur, on nous réveille si tôt", vers 07H00. A 08H30, les portes ferment, se plaint Mohammed.

La journée, des associations proposant des consultations médicales, de laver le linge ou de stocker les affaires des SDF prennent le relais. Sont aussi assurés des permanences sociales, des bains-douches et des restaurants sociaux - financés par l'Etat et la mairie.

La ville de Paris compte quelque 8.000 places d'hébergement, et chaque nuit 17.000 chambres d'hôtels sont payées pour des sans-toit en Ile-de-France.

Contrairement à de nombreux centres, la Boulangerie accepte tout le monde, même les sans-papiers, les gens ivres, drogués ou dérangés.

"Mais pas la violence", souligne Mme Pinsolle. Mais les bagarres, dues à la promiscuité et l'alcool, sont inévitables. Une société de sécurité patrouille d'ailleurs toute la nuit dans les locaux, où rarement plus de cinq lits restent vides. En Ile-de-France, il manque 13.000 places d'hébergement.

"Ce centre offre le minimum, un lit, un repas, il a juste le mérite de sortir les gens de la rue", relève Mme Pinsolle, qui aimerait bien "faire plus humain, avec des dortoirs plus petits". De nombreux SDF, victimes de vols ou d'agressions, refusent d'ailleurs d'y aller.

Certaines structures mettent justement l'accent sur "l'humain". Comme L'Olivier, à Boulogne-Billancourt, qui accueille 24 personnes, dont quatre femmes, pour une durée indéterminée, 24 heures sur 24.

Pour la plupart des résidents, la régularité des trois repas quotidiens est une épreuve. Les éducateurs les invitent à laisser leur bouteille d'alcool à l'entrée, un chenil permet d'accueillir les chiens.

Alcool, froid, sous-alimentation, violences, la plupart souffrent de problèmes de santé, notamment psychiques, en raison du temps passé dans la rue.

Quelques-uns s'en sortent. Comme Dominique Hérail, 52 ans. "Foutu à la porte" par sa copine à l'été 2008, il a perdu son emploi: "Les nuits où le 115 ne me trouvait rien, je dormais dans ma voiture."

Dominique a vécu 2 ans et demi à L'Olivier. Il a d'abord retrouvé un travail grâce à la mairie et habite depuis un mois dans un logement social, seul. Mais "ça me perturbe un peu", avoue-t-il. Pour l'instant, il revient presque chaque soir manger au centre.

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