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Banlieues : "il est où le changement ?"

François Hollande interpellé depuis son appartement par un habitant d'Echirolles, en banlieue de Grenoble, le 1er octobre 2012 [Jean-Pierre Clatot / AFP/Archives] François Hollande interpellé depuis son appartement par un habitant d'Echirolles, en banlieue de Grenoble, le 1er octobre 2012 [Jean-Pierre Clatot / AFP/Archives]

Dix mois après l'élection de François Hollande, l'impatience monte en banlieue où responsables associatifs et élus de la diversité manifestent de plus en plus ouvertement leur déception, malgré l'adoption cette semaine de premières mesures pour les quartiers populaires.

"Où est le droit de vote des étrangers ? La lutte contre le contrôle au faciès ?", interroge Mehdi Bigaderne, adjoint au maire de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), d'où sont parties les émeutes de l'automne 2005, et membre de l'Association nationale des élus de la diversité (Aneld).

"Le gouvernement aurait au moins pu envoyer des signes forts sur la lutte contre les discriminations. Or ce sont toujours les mêmes conseillers dans les ministères...", poursuit cet élu, avant de conclure en référence au slogan de campagne de François Hollande: "il est où le changement?"

Les quartiers ont largement contribué à la victoire du socialiste qui a décroché 77% des suffrages à Trappes (Yvelines) ou 76% à Bobigny (Seine-Saint-Denis). Pendant la campagne, il les avait courtisés lors d'un tour des banlieues. "Je ne veux rien dire que je ne puis être capable de tenir demain", promettait-il à cette occasion.

Aujourd'hui, il peine pourtant à concrétiser une promesse très attendue dans les quartiers à forte mixité: donner le droit de vote aux élections locales aux étrangers non communautaires. Une promesse déjà abandonnée par François Mitterrand en 1981.

Cette réforme passe par une révision de la Constitution, qui ne peut être adoptée que par 3/5e des parlementaires ou par référendum. Alors qu'il manque une trentaine de voix pour la première option, le chef de l'Etat a exclu tout référendum sur le sujet.

Certains minimisent la portée de ce renoncement, en assurant que les habitants de banlieues s'intéressent plus au chômage qu'au droit de vote. Certes, "mais c'est quand-même très important, souligne Mehdi Bigaderne. C'est la reconnaissance des efforts de nos parents à la construction de la France."

Tout est dit: l'enjeu est de l'ordre de l'affectif. Les banlieues et les descendants d'immigrés ont eu le sentiment d'être stigmatisés sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Et, ils attendaient plus de considération une fois la gauche au pouvoir.

François Hollande à Chelles, en banlieue parisienne, le 8 novembre 2012 [Bertrand Langlois / AFP/Archives]
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François Hollande à Chelles, en banlieue parisienne, le 8 novembre 2012
 

Pour eux, cela passe aussi par la fin des contrôles d'identité abusifs, qui crispent les relations entre les jeunes et la police. François Hollande s'était engagé à lutter contre ces "contrôles au faciès", mais le gouvernement a abandonné l'idée de "récépissés" réclamés par les associations.

Il n'en a pas fallu plus au collectif Stop le contrôle au faciès pour accuser le PS d'avoir "trahi les minorités".

D'autres, dont Les Marianne de la diversité et le club Averroes (qui promet la diversité dans les médias) , ont dénoncé dans le Monde une "mise au ban systématique" des citoyens ultramarins et issus de l'immigration dans les dernières nominations.

"Je comprends très bien les attentes et l'impatience légitime", a déclaré lundi le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, lors de son premier déplacement en banlieue, à Clichy-sous-Bois. Le lendemain, il promettait "le retour de l'Etat dans les quartiers", à l'issue d'un Comité interministériel des Villes.

Cette réunion, qui a réuni 20 ministres, a permis d'adopter 27 mesures pour la banlieue. Mais faute de marge de manoeuvre financière, le gouvernement a surtout misé sur le redéploiement de dispositifs existants vers les zones sensibles.

Pas sûr que cela suffise à calmer les esprits. Pour le rappeur et militant associatif Axiom, l'idée d'une réunion interministérielle était "plutôt saine et positive". Mais il craint qu'elle ne soit pas suivi d'effets puisque, selon lui, "tout le monde se fiche de la lutte contre les discriminations car personne ne mesure l'ampleur de la colère."

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