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Fin de partition pour les prestigieux pianos Pleyel

Une employée travaille à l'assemblage d'un piano Pleyel, le 3 décembre 2010, dans les ateliers de Saint-Denis, près de Paris [Francois Guillot / AFP/Archives] Une employée travaille à l'assemblage d'un piano Pleyel, le 3 décembre 2010, dans les ateliers de Saint-Denis, près de Paris [Francois Guillot / AFP/Archives]

Chopin, Liszt, Debussy ou encore Saint-Saëns y ont joué leurs plus belles partitions: les prestigieux pianos Pleyel ne sortiront bientôt plus de la manufacture de Saint-Denis qui fermera ses portes en fin d'année, 200 ans après la création de la marque.

La société Pleyel, fondée en 1807, n'a pas pu résister à la concurrence venue de Chine et de Corée du Sud, en dépit d'un recentrage stratégique opéré en 2007 vers le piano haut de gamme.

"Dans une indifférence quasi générale, les prestigieux ateliers Pleyel ont annoncé l’arrêt de l'activité du site de Saint-Denis", a indiqué la Confédération française des métiers d'art (CFMA) dans un communiqué.

"Les ateliers vont fermer, le processus est en cours, ça va se faire avant la fin de l'année", a confirmé un responsable de l'entreprise, qui a souhaité rester anonyme. "Je fais partie des gens qu'on remercie, on est 14 dans la même galère", a ajouté ce salarié, au sujet de ce plan de licenciement collectif dévoilé fin octobre par la direction.

Interrogée par l'AFP, la direction de Pleyel international n'a pas souhaité commenter cette cessation d'activité, se contentant de préciser qu'un communiqué de presse serait "diffusé d'ici la fin de semaine".

Haut de gamme

La manufacture Pleyel de Saint-Denis avait ouvert ses portes en 1865, dans un vaste atelier de 50.000 m2. En 1961, la production avait été délocalisée en Allemagne, puis rapatriée en France, à Alès (Gard), de 1996 à 2007.

Le designer italien Michel de Lucchi pose le 3 décembre 2010 en face d'un piano qu'il a dessiné pour Pleyel [Francois Guillot / AFP/Archives]
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Le designer italien Michel de Lucchi pose le 3 décembre 2010 en face d'un piano qu'il a dessiné pour Pleyel

Le groupe était revenu s'implanter à Saint-Denis, au nord de Paris, à l'occasion du bicentenaire de la marque. Le nouvel atelier, situé à un centaine de mètres du Stade de France, était tourné vers le luxe (pianos à queue, de designers, d'artistes, commandes spéciales...) et fabriquait également des meubles design.

Conséquence de ce repositionnement, lié à la concurrence féroce des fabricants asiatiques: la société ne produisait plus ces dernières années que deux pianos par mois, contre près de 140 au début des années 2000.

"Catastrophe pour l'école française du piano"

La disparition de ce fleuron musical français, qui a conçu et fabriqué durant deux siècles près de 250.000 pianos et acquis une réputation internationale, sonne le glas d'une longue tradition manufacturière française dans le domaine musical.

"Cette disparition est symptomatique du plan social de grande ampleur actuellement à l'œuvre dans le secteur des métiers d'art", estime le CFMA. "Chaque jour, des ateliers et des savoir-faire ancestraux, constitutifs de l'ADN économique et culturel de notre pays, disparaissent".

La présidente du Conservatoire international de musique de Paris, François Lévechin, a évoqué "une grande catastrophe pour l'école du piano français". "C'est impensable qu'on ne puisse pas la soutenir, qu'on ne puisse pas sauver cette maison très ancienne qui est une grande manufacture française et qui fait partie de l'histoire du piano", a-t-elle déploré.

Dans un communiqué, le président des pianos Klein, autre fabriquant historique de pianos en France, a lancé un appel pour "préserver le savoir-faire exceptionnel français dans la conception de pianos de qualité, facteur de rayonnement culturel essentiel pour la France à l'étranger".

La société Pleyel avait obtenu en 2008 le label Entreprise du patrimoine vivant (EPV), attribué par l'Etat afin de distinguer des entreprises françaises aux savoir-faire artisanaux et industriels d'excellence.

La construction d'un piano Pleyel nécessite 5.000 pièces, entre 500 et 1.500 heures de travail, regroupant 20 métiers différents (luthiers, ébénistes, vernisseurs, laqueurs...), indique le constructeur sur son site.

Le nom des Pleyel est également lié à de nombreux lieux parisiens et de la petite couronne, comme la station de métro Carrefour Pleyel (ligne 13), la tour Pleyel (la plus haute de Seine-Saint-Denis avec 140 mètres) et la salle de concert Pleyel, située non loin de l'Elysée.

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