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Le gouvernement dénonce des pressions contre les bibliothèques

Un garçon étudie dans une bibliothèque [Loic Venance / AFP/Archives] Un garçon étudie dans une bibliothèque [Loic Venance / AFP/Archives]

"Mademoiselle Zazie a-t-elle un zizi?" ou "Papa porte une robe": le gouvernement est monté au créneau pour dénoncer des "pressions" de militants ultraconservateurs visant à faire retirer ces livres des rayons jeunesse de certaines bibliothèques municipales, mais leur action s'avère encore très limitée.

"On demande aux parents d’appeler les bibliothèques, d’appeler les mairies pour que ces livres soient retirés des rayonnages", a déclaré mardi à l'AFP Béatrice Bourges, président du Printemps français, groupe d'opposants radicaux au mariage homosexuel.

A l'origine de cet appel, il y a un blog marqué très à droite, le Salon beige, qui depuis la semaine dernière dresse une liste de "bibliothèques idéologiques" proposant selon ses termes des livres "à la gloire du +gender+", c'est-à-dire de la "théorie du genre" au coeur des combats des défenseurs d'une vision traditionnelle de la famille.

"Les livres qui mettent dans la tête d'une petite fille ou d'un petit garçon qu'ils ne sont pas forcément fille ou garçon en fonction de leur sexe biologique mais qu'ils décideront quand ils seront plus grands, ces livres-là doivent être mis à part", estime Béatrice Bourges.

C'est la décision prise par le maire DVD du Chesnay Philippe Brillault, en pointe de la contestation contre le mariage gay. La dizaine de titres auparavant stockés dans un bac accessible aux plus petits sont désormais placés en hauteur sur une étagère du "fonds des parents" dédiée à la parentalité dans le rayon jeunesse de la bibliothèque de cette ville des Yvelines.

"Nous protégeons les enfants, c'est aux parents de choisir ce qu'ils veulent pour eux", a-t-il justifié. Se défendant d'être un "censeur", il assure que la municipalité continuera "à acheter ces livres".

 

"Jamais agressifs"

 

L'édile a reçu la semaine dernière deux parents venus lui demander de retirer le livre "Tango a deux papas et pourquoi pas?" des rayons de la bibliothèque. Quelques jours, plus tard il recevait un message sur son blog et trois mails de Chesnaysiens, "jamais agressifs" selon lui.

La ministre de la Culture Aurélie Filippetti a dénoncé lundi soir les "pressions" exercées par des "mouvements extrémistes" contre une trentaine de bibliothèques. Selon elle, ces groupes "somment" les personnels "de se justifier sur leur politique d'acquisition, fouillent dans les rayonnages avec une obsession particulière pour les sections jeunesse, et exigent le retrait de la consultation de tout ouvrage ne correspondant pas à la morale qu'ils prétendent incarner".

Des livres dans une bibliothèque [Loic Venance / AFP/Archives]
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Des livres dans une bibliothèque
 

Mais, pour l'heure, certaines des villes citées par le ministère et contactées par l'AFP disent n'avoir reçu aucune pression, comme à Strasbourg, Lyon, Saint-Etienne, Dole ou Mérignac. A Rennes, "un Rennais" a écrit un courriel pour dénoncer la présence des ouvrages incriminés.

A Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), le maire UDI Jean-Christophe Fromantin assure lui aussi n'avoir reçu "aucune pression" mais deux mails et un courrier incriminant cinq livres, dont certains en rayon depuis 1994. Les livres sont sur le bureau du maire, qui veut les consulter avant de prendre une décision. Et s'il juge qu'ils font la promotion de la théorie du genre? "Oui, je les retirerai après en avoir parlé aux élus."

L'Association des bibliothécaires de France (ABF) a exprimé son "désaccord profond avec ces prises de positions partisanes et extrêmes". Selon elle, les ouvrages visés sont issus d’une bibliographie proposée par un syndicat enseignant pour promouvoir l'égalité femme-homme et la lutte contre l'homophobie.

La directrice du Salon du livre jeunesse de Montreuil, Sylvie Vassallo, s'inquiète de son côté des "attaques" qui "se multiplient depuis quelques mois sur le caractère +pernicieux+ de la littérature jeunesse".

Dimanche, le président de l'UMP Jean-François Copé avait déjà brandi et critiqué un livre, "Tous à poil", présenté comme recommandé aux enseignants pour les classes primaires -- il s'agit en fait, selon le gouvernement, d'un ouvrage recommandé par une association encourageant la lecture chez les jeunes dans la Drôme et l'Ardèche, repris par l'académie de Grenoble. "C'est tout à fait le type de livre que l'on pourrait acheter, un livre qui traite de la nudité", assume Chantal Picazo, bibliothécaire d'Andernos-les-Bains (Gironde), qui n'a pas reçu de pression. "Moi j'ai l'impression de donner du sens à mon travail et de faire évoluer les consciences."

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