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Mélenchon : "L'austérité ne mène nulle part"

Jean-Luc Mélenchon[Laurent Chamussy / SIPA pour Direct Matin]

C’est la dernière ligne droite pour les partis politiques avant les européennes de dimanche. Candidat à sa réélection dans la circonscription Sud-Ouest, Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche) entend continuer à lutter contre l’austérité et pour une autre Europe.

 

Vous souhaitez refonder l’Europe. Qu’est-ce que cela signifie ?

L’Europe est passée d’une coopération économique à une absurdité erigée en règle absolue : pas plus de 3% de déficit ou la mort. Le résultat ? Il n’y a jamais eu autant de chômeurs, de pays ruinés et aussi peu de croissance. Prétendre « réorienter l’Europe » dans le cadre des traités actuels est une mystification. Ces textes bloquent tout. Il faut donc refonder l’Europe en partant sur d’autres bases.

 

Le traité transatlantique a été au cœur de cette campagne. Pourquoi y êtes-vous opposé ?

Ce marché Etats-Unis-Europe va unifier les normes, à propos des marchandises, de leur contenu, de la manière de les conditionner et de les vendre. L’alignement par le bas est garanti d’avance. L’arrivée sur notre marché du poulet américain lavé à la javel en serait un exemple extrême. Cela donne un contenu très concret à cette élection. L’électeur pourra dire oui ou non à ce traité en élisant les députés qui vont se prononcer à son sujet.

 

Comment lutter contre l’austérité ?

L’austérité ne mène nulle part. On le voit, les Grecs en sont à leur cinquième année de récession. Or, on ne peut rompre avec cette politique que si les etats peuvent se financer auprés de la Banque centrale publique et pas sur le marché financier privé, qui nous fait dépendre d’agences de notation et de fonds de placement. Bien sûr, c’est très difficile. C’est pourquoi il est important qu’il y ait un parti anti-austérité comme le FG. Sinon on finirait par croire qu’il n’y a qu’une politique possible.

 

Le risque d’abstention est majeur pour ce scrutin...

Il y a une forme d’insurrection froide. Les gens se demandent à quoi ça sert, surtout quand ils ont voté non au traité européen de 2005 et que Nicolas Sarkozy et le PS ont fait comme si c’était « oui ». Ce serait dommage que cette colère ne se traduise pas par un vote en notre faveur, qui nous aide à construire une nouvelle alliance avec les Verts et avec les dissidents PS. L’abstention est un cadeau aux sortants.

 

Croyez-vous à la victoire du FN ?

Aux yeux du monde, une victoire de l’extrême droite en France serait un signal terrifiant. Mais quels que soient les résultats, je persiste et je signe en face de Marine Le Pen : non, le problème, ce n’est pas l’immigré, c’est le financier. Et la meilleure manière de défendre la France, ce n’est pas d’abandonner l’euro à Angela Merkel.

 

Il y a plusieurs mois, vous espériez devancer le PS. Aujourd’hui vous visez 10 %...

J’ai dit un score à deux chiffres. Mon but reste le même. Non, il n’y a pas qu’un choix dans ce pays, les socialistes ou la droite et l’extrême droite. Oui, autre chose est possible. Un bon score nous permettra d’imposer cette idée au centre de la scène à gauche.

 

Pour la première fois, les élections européennes vont influer sur le choix du président de la Commission. Pour vous, Martin Schulz, soutenu par le PS, est un mauvais candidat ?

Martin Schulz est l’incarnation de la cohabitation entre les socialistes et la droite européenne. Actuellement président du Parlement européen par tourniquet avec la droite, son parti est membre du gouvernement de Angela Merkel. Je ne comprends pas quelle aberration a conduit les socialistes à présenter ce personnage comme emblème du combat qu’ils prétendent mener contre l’austérité et pour un changement de l’Europe. Martin Schulz incarne cette continuité de l’Europe qui étrangle les peuples.

 

Le geste fiscal annoncé vendredi par Manuel Valls est-il suffisant ?

C’est purement électoraliste. Il retire des impôts à des gens qui n’en payaient pas avant que le gouvernement socialiste leur en fasse payer. On finit par s’y perdre. Manuel Valls défait les mesures fiscales décidées par Jean-Marc Ayrault et présente cela comme un progrès. Hollande réforme sa réforme territoriale. Cela donne le sentiment d’une politique de gribouille.

 

Vous prenez la défense de Jérôme Kerviel. Vous croyez à un geste de François Hollande en sa faveur ?

Non, parce que François Hollande n’a jamais eu de sensibilité à la dimension humaine de la justice. Jérôme Kerviel est innocent. C’est une thèse qu’on peut discuter mais chacun peut se faire une conviction personnelle. En annulant son amende record, la Cour de cassation a confirmé qu’il y avait des doutes sur la perte enregistrée par la Société générale donc sur le 1,7 milliard qu’elle a empoché pour compenser. Je ne vois pas l’urgence qu’il y a aujourd’hui à aller embastiller Jérôme Kerviel si ce n’est parce que le système veut donner le dernier mot aux banquiers.

 

Le Front de gauche est apparu divisé ces derniers mois. Pour André Chassaigne (PC), c’est votre personnalité qui pose problème. Il a tort ?

C’est vrai que nous avons été divisés sur la stratégie générale de notre mouvement aux municipales. Devions-nous ou non affirmer notre autonomie en toutes circonstances ? Cela a été un facteur d’illisibilité très dommageable. Mais aujourd'hui, nous sommes repartis dans cette campagne de façon totalement homogène. La machine est relancée. Et comme je ne demande rien pour moi, je ne crois pas que ma personnalité soit un obstacle à quoi que ce soit. Je m'efforce de faire du mieux que je peux. J’ai des défauts. Qui n’en a pas ? Mais je crois que je fais assez bien mon travail, j’arrive à entrainer, à soulever de l’enthousiasme. Après, on peut toujours faire mieux… Que personne n’hésite à essayer !

 

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