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Jouyet reconnait s'être entretenu avec Fillon

Jean-Pierre Jouyet et François Fillon, en 2008.[GERARD CERLES / AFP]

Les révélations de journalistes du Monde sur une supposée intervention de François Fillon auprès de l'exécutif contre Nicolas Sarkozy placent Jean-Pierre Jouyet en fâcheuse posture en dépit du refus affiché du gouvernement de s'immiscer dans les affaires judiciaires.

 

Dans un livre intitulé "Sarko s'est tuer", deux journalistes du Monde rapportent des propos du secrétaire général de l'Elysée Jean-Pierre Jouyet selon lequel François Fillon lui aurait demandé d'accélérer le cours de la justice dans les affaires visant Nicolas Sarkozy.

Jean-Pierre Jouyet a d'abord démenti mais les deux journalistes l'ont enregistré avec son assentiment. Ce dimanche, il a néanmoins indiqué à l'AFP que François Fillon lui avait parlé de Bygmalion et des pénalités pour la campagne de Nicolas Sarkozy. Il a assuré que depuis 2012, selon lui il n'y avait  plus d'intervention de l'Elysée sur la justice. Voici l'intégralité de sa déclaration dimanche du secrétaire général de l’Élysée, Jean-Pierre Jouyet, lue à l'AFP:

"Les déclarations et les articles de presse, que je déplore, me conduisent à apporter les précisions suivantes. J'ai déjeuné le 24 juin dernier, à titre privé, avec François Fillon et Antoine Gosset-Grainville, une relation commune.

Nous avons abordé de nombreux sujets concernant le pays et la situation politique. François Fillon m'a fait part de sa grave préoccupation concernant l'affaire Bygmalion. Il s'en est déclaré profondément choqué. C'est ce que j'ai indiqué aux journalistes du Monde qui m'ont interrogé.

Il a également soulevé la question de la régularité du paiement des pénalités payées par l'UMP pour le dépassement des dépenses autorisées dans le cadre de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy.

J'ai fait part à mes interlocuteurs du fait que la présidence de la République ne pouvait rien s'agissant de cette procédure relevant de la justice. J'ai également rappelé que, depuis mai 2012, il n'y a plus aucune intervention de la présidence de la République dans une procédure judiciaire."

Le ministère de l'Economie avait pourtant donné en novembre 2013 son aval au paiement par l'UMP, à la place de Nicolas Sarkozy, de pénalités pour dépassement de ses comptes de campagne, a révélé le Journal du dimanche.

 

Fillon au 20h de TF1

François Fillon a annoncé lui qu'il porterait plainte contre les deux journalistes et le quotidien Le Monde. Il dément formellement avoir demandé à l'Elysée d'accentuer la pression sur Nicolas Sarkozy. Il est l'invité du journal télévisé de 20H00 sur TF1 dimanche soir. L'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy répondra en direct et en plateau aux questions de Claire Chazal.

 

En démentant dans un premier temps les informations du journaliste du Monde, le secrétaire général de l'Elysée s'est peut-être tiré une balle dans le pied.

L'ancien chef du gouvernement a bien déjeuné le 24 juin dans un restaurant près de l'Elysée avec M. Jouyet, et son ancien directeur adjoint de cabinet à Matignon, Antoine Gosset-Grainvillle. Mais selon lui, "à aucun moment" ils n'ont évoqué au cours de ce "déjeuner amical" la question des pénalités financières infligées à M. Sarkozy et réglées par l'UMP.

 

L'enregistrement à la disposition de la justice

"Je ne peux pas imaginer François Fillon se livrer à une telle démarche (...) la seule personne aujourd'hui qui soit acteur de cette affaire, c'est M. Jouyet", a résumé Henri Guaino, député UMP proche de Nicolas Sarkozy.

"Évidemment, on ne peut pas en rester là, ils (les journalistes) vont produire cette bande (...) Je demande que la bande soit mise sur la table", a-t-il ajouté. 

Mais les deux journalistes préfèrent à ce stade tenir cet enregistrement à la disposition de la justice et n'entendent "répondre à aucune injonction politicienne", ont-ils déclaré à l'AFP.

Quant à M. Jouyet, "qu'il s'explique et si les explications ne sont pas convaincantes, on ne peut pas en rester là", a prévenu l'ancien conseiller spécial de M. Sarkozy.

Pour lui, "c'est la majorité, le pouvoir qui ont intérêt" à relancer la guerre à droite. "M. Jouyet est au centre de cette opération", accuse Henri Guaino.  Sollicité par l'AFP, l'Elysée n'a pas souhaité réagir.

"C'est une affaire d'Etat s'il (M. Jouyet) a tenu ces propos: vous ne pouvez pas jeter des accusations de ce genre à la face de l'opinion sans avoir quelques preuves qui permettent de les étayer, ce n'est pas le rôle du secrétaire général de l'Elysée", a aussi accusé M. Guaino.

Ami proche de M. Hollande mais aussi ancien ministre de M. Sarkozy, Jean-Pierre Jouyet avait déjà commis des gaffes comme lorsqu'il avait annoncé lui-même la nomination de Jean-Marc Ayrault à Matignon en mai 2012. A la tête de la banque publique d'investissements (BPI), il avait aussi qualifié le site ArcelorMittal de Florang de "canard boiteux".

Cette affaire est d'autant plus regrettable pour la majorité qu'elle alimente les soupçons de "cabinet noir" à l'Elysée véhiculés par des proches de Nicolas Sarkozy. "C'est du pain bénit" pour l'ex-chef de l'Etat, soupire un proche de M. Hollande.

Cette affaire vient de surcroît jeter le soupçon sur la volonté de l'Elysée depuis 2012 de ne pas s'immiscer dans les procédures judiciaires. "Ce n'est pas la pratique du Président et du gouvernement, nous sommes attachés à la séparation des pouvoirs", a assuré sur RTL M. Ayrault.Le secrétaire d'Etat au Commerce extérieur, Matthias Fekl, a cependant expliqué sur France Inter qu'il était "incontestable" que "quand vous êtes au pouvoir, vous ayez toutes sortes de gens bizarres qui viennent vous demander des choses bizarres".

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