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Yannick Borel, épéiste de l'équipe de France : «j’attends les Jeux de Tokyo depuis 2016»

Après Tokyo, le Guadeloupéen compte bien être de la partie pour Paris 2024.[Adidas]

Il a l’épée entre les dents. Présent lors d’une «rentrée à l’américaine» organisée à l’Insep par Adidas avec 300 jeunes sportifs, mi-septembre, Yannick Borel s’est confié sur ses objectifs sur cette saison, son physique, ses envies et son rôle en équipe de France. Avec dans le viseur, Tokyo 2020.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’escrimeur (30 ans), après une saison mi-figue, mi-raisin, est très motivé. Que ses adversaires se préparent, le Guadeloupéen, qui a reçu pour l'occasion la nouvelle veste VRCT, inspirée de la culture Varsity des campus américains, est plus motivé que jamais.

Comment se passe cette rentrée ?

Je me sens bien, je sens que j’ai mis en place ce qu’il fallait autour de moi pour être performant. Il y a plusieurs personnes qui sont autour de moi pour me permettre de réussir mes objectifs qui sont de faire un doublé (individuel, équipe) sur une olympiade (2016-2020). Pour le moment, j’ai montré de la régularité, je vais faire en sorte que ça paie et que ça dure.

Ces derniers mois ont été compliqués à l'individuel…

Cette saison, je passe à côté de mon individuel aux championnats d’Europe et aux championnats du monde, je m’arrête en quarts de finale. Ce n’était pas l’objectif initial mais avec ma blessure au dos, je n’ai pas pu m’entrainer comme je l’aurais souhaité. Malgré tout, je ressors des Mondiaux avec une médaille d'or par équipe. J’y ai contribué. Je n’étais pas à 100% de mes capacités, j’ai tout donné et il y a quelque chose au bout. C’était une saison compliquée au final. Je me suis fait opérer fin août 2018 du poignet, j’ai fait une «demi-saison» et je finis 8e mondial alors que je n’ai pas pu m’exprimer pleinement. Je repars sans médaille au Mondiaux mais globalement, ça montre que même lorsque je suis diminué, je peux montrer de belles choses.

De bon augure à un an des Jeux de Tokyo…

Dans moins d’un an même. Tokyo, ça va vraiment être autre chose. Après, peut-être que je serais bien physiquement, peut-être que je ne le serais pas. C’est justement cet aléa que je ne connais pas et sur lequel je travaille. La seule chose que je peux faire, c’est tout mettre en œuvre pour arriver dans les meilleures conditions le jour J. Et tout ce que j’ai vécu sur les 3-4 dernières années, que ce soit positif ou négatif, c’est ce qui va me permettre de me construire et de me préparer comme il se doit. Je sais ce qu’il faut faire, j’ai ça en moi. Le problème, c’est que c’est un élément que l’on ne peut pas maîtriser. Parfois tu es bien mais tu n’arrives pas à faire tout ce qu’il faut. Mais il faudra. Depuis 2016, j’attends ce rendez-vous. Je suis champion olympique par équipes mais en individuel je fais quart de finale. En septembre 2016, je suis rentré à l’Insep et j’ai été voir mes coachs et je leur ai dit «je veux être champion olympique dans quatre ans». C’est tout ce que j’aurais fait depuis 2016 qui va me permettre d’y accéder ou non.

L’escrime, ça reste un sport de combat

La dimension psychologique est très importante ?

Les Jeux, c’est quelque chose qui arrive tous les quatre ans, donc à ce niveau, c’est que du mental. On attend ça depuis tellement longtemps, on peut se faire bouffer par l’événement, on peut faire une bêtise qui va nous couter le match. C’est tellement éphémère comme moment qu’il faut arriver blindé mentalement pour y arriver. J’ai aussi un préparateur mental depuis trois ans pour travailler cet aspect. Je mets l’accent dessus pour ne pas me dire à l’arrivée : «il m’a manqué ça». L’escrime, ça reste un sport de combat. Il faudra se battre, battre ses adversaires. Tu n’es pas obligé d’être le meilleur pour gagner, il faut que la stratégie soit la bonne. Chaque adversaire à un profil différent donc il faut s’adapter ou imposer son style. C’est un peu comme à la boxe. Je n’ai pas peur des autres, je pense que sur le circuit, j’ai déjà battu tout le monde au moins une fois. Et numéro un mondial ou pas, ce n’est qu’un chiffre. Le jour J, tout le monde est au même niveau.

Après quelques années de galère, l’équipe de France est-elle de retour ?

Elle est sur la bonne voie. Car elle part de loin. Il y a des individualités fortes qui devraient être au rendez-vous au Japon. On espère que la France aura toutes ses équipes qualifiées car pour la première toutes les catégories sont autorisées aux Jeux.

Avez-vous un rôle de grand frère avec les Bleus ?

Je suis entre les deux. Je ne suis pas le doyen de l’équipe mais après c’est vrai que comme j’ai eu pas mal de résultats, mon expérience peut aider. Dans une compétition, ça motive de voir un coéquipier décrocher une médaille car on a envie de l’imiter. Et pareil, si on n’en a pas, tu veux débloquer le compteur. Je ne sais pas si j’aurais un rôle à jouer mais si je fais médaille en individuel ça pourra galvaniser les troupes. Je vais tout donner pour y arriver. Et personnellement, j’ai fait deux fois les JO… et je ne veux plus vivre ça, de Jeux sans médailles. Après c’est le sport mais je mets tout en place pour que ça se passe différemment.

On vous demande quand même des conseils ?

Oui ça m’arrive. Je suis originaire de Guadeloupe et il y a pas mal d’Antillais en équipe de France donc on échange. Les jeunes viennent me voir naturellement. Ils vont me parler de leurs problèmes par exemple. Parfois, c’est pour gérer une coupure, une pause dans une compétition. Ou comment bien préparer l’approche d’un championnat. Comment garder la motivation, ne pas être dégoûté de l’escrime… 

Paris 2024, j'ai envie d'y être et j'y serai

Deux mots pour décrire les Jeux ?

Spécial et historique. Car tu peux marquer l’histoire de ton sport et pour nous c’est quelque chose de spécial en escrime.

Quand vous irez à Tokyo, que ferez-vous après la compétition ?

J’aime bien la culture japonaise. Je trouve qu’il y a beaucoup de respect, il y a beaucoup de valeurs. Les mangas j’aime bien, je suis un fan de «One Piece», il faut aller chercher le trésor que tout le monde veut. Après c’est vrai que j’ai fait deux fois les JO (Londres et Rio) et les deux fois je suis parti juste après la compétition sans rien faire. Cette année je veux profiter des JO. Si y a un match France-États-Unis en basket, je veux y aller, aller voir l’homme le plus rapide du monde en athlétisme… si je vais à Tokyo, je veux profiter de l’ambiance, faire la cérémonie de clôture et être dans l’avion du retour. On me dit que c’est génial. Et profiter avec ma famille qui sera là-bas, et ils sont déjà en train de programmer leur voyage. Eux ils sont qualifiés déjà, moi pas encore. Ils m’ont même dit «même si tu n’es pas qualifié, nous on ira». Je connais pas du tout Tokyo. Mais j’aimerai bien me laisser séduire par la ville, par les gens. Au Brésil, les gens étaient chaleureux. En Angleterre, ils étaient très courtois. Alors, au Japon, ça doit aussi être quelque chose.

Après Tokyo 2020, allez-vous pousser jusqu’à Paris 2024 ?

Oui ! A la maison, devant tout le monde, devant les amis. Briller chez soi, ça c’est précieux. Quand on l’a fait une fois dans sa vie, c’est magnifique. J’ai fait les Mondiaux en 2010 à Paris, au Grand Palais, c’était énorme. J’étais dans les gradins. Et c’était un moment exceptionnel. Ils sont champions du monde par équipe. Ça a d’ailleurs été un déclic, je voulais faire pareil. Et l’année d’après, je vais au championnat du monde en Italie. Je n’aurai que 35 ans, j’aurai peut-être le rôle de grand frère. Surtout si mon corps me le permet. En tout cas, Paris 2024, j’ai envie d’y être et j’y serai.

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