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Racisme, violences policières : Pourquoi la NBA a-t-elle une telle influence sur la société américaine ?

LeBron James et ses partenaires des Lakers posent un genou à terre pour lutter contre le racisme et les violences policières aux Etats-Unis. LeBron James et ses partenaires des Lakers posent un genou à terre pour lutter contre le racisme et les violences policières aux Etats-Unis. [DOUGLAS P. DEFELICE / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / GETTY IMAGES VIA AFP]

Boycott des rencontres, messages antiracistes et de solidarité sur les maillots et autour du terrain… Sous l’impulsion de ses joueurs, LeBron James en tête, la NBA a clairement pris position pour ses joueurs. Une décision assumée, au risque de provoquer la colère du président américain Donald Trump, surtout à l’approche des élections présidentielles. Rarement des sportifs n'ont eu une telle influence sur leur société et ses problématiques.

Cet engagement n’est pas nouveau pour la sphère de la balle orange, encore plus aux États-Unis. «La NBA a toujours été en avance dans ce domaine sur les autres sports américains, a relevé George Eddy, journaliste sportif à Canal+. Ça remonte aux années 50, 60 avec notamment Bill Russell qui luttait contre la ségrégation dans le sud. Il a également soutenu Martin Luther King et était présent à son fameux discours à Washington («I have a dream», en 1963)».

«C’est comme si le PSG avait fait grève pour l’affaire Adama Traoré»

L’histoire de la Grande ligue regorge d'athlètes emblématiques, sur les parquets mais également en dehors, comme le confirme Thomas Dufant, journaliste et cofondateur du média sportif First Team : «Les joueurs ont toujours été des ambassadeurs pour les droits civiques, on pense notamment à Lew Alcindor aka Kareem Abdul Jabbar (en 1968, le pivot des Lakers avait refusé une sélection pour les Jeux Olympiques de Mexico afin de lutter pour les droits civiques des afro-américains)». 

Dernier épisode en date : le 26 août dernier. Après l’affaire Jacob Blake, les Bucks de Milwaukee ont refusé de jouer une rencontre cruciale face au Magic d’Orlando car «ils avaient l’impression de ne pas avoir été entendus par rapport aux bavures policières, éclaire George Eddy. C’est comme si le PSG avait fait grève pour l’affaire Adama Traoré».

Une décision historique mais pas anodine. Ces millionnaires ont gros à perdre en prenant des positions politiques si affirmées : «C’est tout à leur honneur car ils pourraient très bien prendre leur argent et se cacher derrière parce que tout va bien pour eux», affirme le journaliste américain.

En effet, les répercussions financières pourraient être redoutables pour la ligue mais également pour les acteurs d'un point de vue personnel. «Certains sponsors ne sont pas pour que leurs athlètes prennent la parole comme cela, confie l’internationale française Diandra Tchatchouang. C’est remarquable ! Je suis admirative. Ce combat, cette quête pour la justice, a dépassé tout ça. Certaines joueuses de la WNBA ont décidé de ne pas prendre part à la saison. C’est un sacrifice financier énorme».

Une ligue composée à 85% de joueurs noirs

Pour comprendre un tel engagement des athlètes américains, il faut prêter attention à ce qu’est «l’essence même d’un joueur NBA», relève Thomas Dufant : «à 85%, c’est un joueur noir, donc concerné par ce combat». Mais pas seulement car «beaucoup de joueurs blancs sont aussi montés au créneau pour soutenir la cause».

Diandra Tchatchouang évoque la composition même d’un vestiaire d’une franchise de la NBA, qui représente «un monde qui rassemble toutes les personnes, de tous horizons ou origines». «C’est très fédérateur. Que le message vienne de ces personnes-là, il y un côté solidaire qui ressort et qui amène beaucoup de pertinence quant au message de vivre ensemble».

Ce soutien entre coéquipiers trouve un prolongement très fort dans les instances dirigeantes. «Avant, c’était David Stern, maintenant Adam Silver, les Commissionners ont toujours été au soutien de leurs joueurs», rappelle le journaliste de First Team. Et cela même si ça implique d'aller «à l’encontre même du concept de la ligue qui est de faire de l’argent car c’est une société privée», ajoute-t-il. En effet, afin de soutenir la lutte contre les inégalités raciales, plusieurs franchises ont décidé de convertir leurs arènes en salles de vote pour les élections présidentielles. 

Surtout, le mouvement a même entraîné d’autres sportifs dans son sillage : «Après la grève de Milwaukee, il y a eu Noemie Osaka (Tennis) qui a refusé de jouer, confirme George Eddy. Des matches de baseball et de hockey sur glace ont été décalés. La nouveauté aujourd’hui c’est que ça fait une sorte de mouvement général qui touche plusieurs sports. Ça doit traduire un ras-le-bol général de ces bavures policières qui continuent depuis minimum 200 ans».

«Kaerpernick a libéré les paroles et les actes»

Si l’influence des joueurs de la NBA et la WNBA a été déterminante pour propager le mouvement, Diandra Tchatchouang rappelle un élément fondateur : le genou posé à terre, à chaque fois que retentissait l’hymne américain avant les matches, du joueur de Foot US Colin Kaepernick, en 2016. «Kaerpernick a libéré les paroles et les actes face à cette lutte antiraciste. LeBron James l’a remercié car il a eu ce rôle clé. Son rôle a été primordial, il sera toujours un des pionniers». Ce geste est d’ailleurs repris depuis cet été par les joueurs avant les rencontres qui se déroulent dans la «bulle» d’Orlando.

«Ce qu’il (Kaepernick) a fait il y a quelques années, permet aujourd’hui aux joueurs NBA, à Noémie Osaka (tennis) à la ligue de soccer, à la MLS, de faire ces actes forts aujourd’hui», constate la joueuse tricolore du Basket Lattes Montpellier Association (BLMA).

Ces sportifs s’inscrivent aujourd’hui dans la lignée d’autres actes qui ont marqué l’Histoire comme le refus d’incorporation de Mohamed Ali ou les poings levés de Tommie Smith et John Carlos, en 1968, lors des JO de Mexico.

Tous ces athlètes qui, comme le rappelle Diandra Tchatchouang, «ont décidé de défendre l’une des causes les plus nobles : la justice et l’égalité pour tous». Des athlètes qui n’ont pas toujours été suivis, au contraire de la Grande ligue qui appuie les combats de ses joueurs. «La NBA est une ligue un peu à part, peut-être plus intelligente que les autres, en tout cas elle a une aura différente», conclut Thomas Dufant.

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