En direct
A suivre

Mathieu Bock-Côté : «C’est la gauche qui s’autoproclame gauche et qui refoule à droite ce dont elle ne veut pas»

La droite des idées et la droite des partis évoluent-elles en vents contraires ? La droite intellectuelle a-t-elle gagné la bataille des idées ? Comment s'inscrit dans ce cadre le clivage droite-gauche ? Ce lundi 27 septembre, dans Face à l'Info présenté par Christine Kelly sur CNEWS, Mathieu Bock-Côté a livré son analyse.

Concernant le premier point, à la question de savoir s'il y a un éloignement de plus en plus prononcé entre la droite des idées et la droite des partis, le sociologue québécois a dressé un constat sans appel, estimant que celui-ci existe bel et bien et «qu'il n’est même pas certain que les deux puissent converger».

Selon lui, il y a d’un côté la droite républicaine, en l’occurrence Les Républicains, et de l’autre «l’autre frange de la droite, la droite macronisée, compatible, associée à Edouard Philippe et d’autres qui a le grand fantasme giscardien de la convergence des centres». Pour le spécialiste, «à travers tout cela», il y a ainsi une grande faiblesse de la droite française qui est «cette obsession monomaniaque de l’économie, cette vision de la politique purement gestionnaire». Ce faisant, «la droite qui se questionne sur son identité ne sait plus, elle, à quoi elle sert.»

Dans le même temps, et paradoxalement, Mathieu Bock-Côté constate qu'«il y a une renaissance de la vie intellectuelle conservatrice et beaucoup de gens qui participent de ce renouveau conservateur ne s’estiment d'ailleurs pas de droite.» Bref, autant de profils qui, estime-t-il, se rejoignent pour alimenter la réflexion «sur la question de la civilisation, de l’Etat, de la dégénérescence de la démocratie» etc. Dans ce contexte, la droite des idées ne rencontre que «rarement» la droite des partis, juge le sociologue. Et, lorsque cette rencontre se fait, elle se fait plutôt «en période d’élection». Résultat, dit-il, : «la droite des idées est condamnée à une espèce d’exil intérieur.»

«Le clivage droite-gauche ne fonctionne qu'à l'avantage de la gauche»

En réalité, estime Mathieu Bock-Côté, l’essentiel du problème est à trouver dans le clivage droite-gauche. Un clivage qui fonctionne du reste d'après lui «exclusivement à l’avantage de la gauche». «C’est la gauche qui s’autoproclame gauche et qui refoule à droite ce dont elle ne veut pas (...) la gauche se permet d’édicter ‘avec qui peut-on débattre, avec qui on droit débattre’». L'observation faite par le sociologue est dans ce contexte sans appel. Car, selon lui, «ce sont des gens qui ne veulent débattre qu’avec eux-mêmes» dans la mesure où «une grande partie du travail intellectuel de la gauche consiste à dire pourquoi elle ne veut pas débattre avec des gens qui ne se soumettent pas à elle.»

Cette vision étant posée, le concept central sur lequel repose ce clivage gauche-droite ne peut-être pour Mathieu Bock-Côté que la notion d’extrême-droite, ou du moins celle que les forces de gauche entendent définir. «Le concept d’extrême-droite en dit plus sur celui qui l’utilise pour fustiger son adversaire que sur celui qui est ainsi fustigé (...) car le concept d’extrême-droite est à peu près indéfinissable aujourd’hui (...) il s’inscrit dans une vieille histoire politique qui consiste à créer des catégories nécessaires à l’ostracisme, à la mise à mort sociale, au bannissement civique ou médiatique». En définitive, d'après le sociologue, le concept d’extrême-droite sert à désigner une personne avec laquelle on n’est pas d’accord, «comme un diable sur lequel on peut lancer des fléchettes.»

Pour autant peut-on dire que la droite a remporté la bataille des idées ? Là dessus, l'analyse du sociologue se veut plus nuancée : «On a d'un côté une gauche qui a tellement été hégémonique qu'il lui suffit d’être contestée pour se croire assiégée et, de l’autre, on a une droite qui a longtemps été dominée, à qui il suffit d’être entendue pour se croire dominante». Un «double quiproquos», en somme, qui accompagne «l’éternelle tentation de fasciser l’adversaire». En conclusion, d'après Mathieu Bock-Côté, «l'anti-fascisme carnavalesque qui domine aujourd'hui est loufoque. Imaginez que de Gaulle ou Churchill reviennent aujourd'hui. Ils seraient extrême-droitisés» au seul motif que l'on diabolise la nation, le patriotisme, l’identité... «tout ce qui, au fond, a permis de lutter contre le totalitarisme au 20e siècle».

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités