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Internet : pédophilie, contrefaçon, désinformation...L'UE finalise une législation «historique» de régulation

L'objectif du DSA est de mettre fin aux zones de non-droit et aux abus sur internet à l'échelle de l'Union Européenne. [LUDOVIC MARIN / AFP]

Mieux lutter contre les appels au meurtre, les images pédophiles, les campagnes de désinformation ou les produits contrefaits... L'UE a conclu, samedi 23 avril, une nouvelle législation «historique» pour régiler l'Internet.

Le texte, discuté depuis près d'un an et demi, doit responsabiliser les très grandes plates-formes du numérique, comme Facebook (Meta) ou Amazon, en les contraignant à supprimer les contenus illégaux et à coopérer avec les autorités.

Le résultat de ce travail de longue haleine se présente en tant que «Digital Services Act» (DSA) et constitue l'un des deux volets d'un plan d'envergure présenté en décembre 2020 par la commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager, et son homologue au Marché intérieur, Thierry Breton. Le premier volet, le règlement sur les marchés numériques «Digital Markets Act» (DMA), qui s'attaque aux pratiques anticoncurrentielles, a été conclu fin mars.

«Cet accord est historique, s'est félicitée la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, sur Twitter. «Nos nouvelles règles vont protéger les utilisateurs en ligne, assurer la liberté d'expression et des opportunités pour les entreprises».

Le DSA, lui, met à jour la directive e-commerce, née il y a 20 ans quand les plates-formes géantes étaient encore embryonnaires. Objectif : mettre fin aux zones de non-droit et aux abus sur internet.

Retirer des contenus illicites

Concernant les réseaux sociaux, ceux-ci devront suspendre les utilisateurs fournissant «fréquemment» des contenus illégaux comme des discours de haine et des annonces frauduleuses.

Pour les sites de vente en ligne, ils devront contrôler l'identité des vendeurs avant de les autoriser sur leur plate-forme et bloquer les fraudeurs récidivistes. Des contrôles aléatoires sur leurs annonces seront réalisés. Le DSA proscrit en outre les interfaces trompeuses (dite «dark pattern») qui poussent les internautes vers certains paramétrages de compte ou certains services payants.

Pour les plates-formes en ligne, à l'exception des microentreprises et des petites entreprises, elles auront l'obligation de retirer «promptement» tout contenu illicite dès qu'elles ont connaissance de produits contrefaits, dangereux pour la santé, en accord avec les lois nationales et européennes.

La publicité en ligne sera également mieux encadrée. Les plates-formes devront ainsi permettre à chaque utilisateur de connaître les paramètres utilisés pour le cibler et de savoir qui est le financeur de l'annonce. Le texte interdit aussi la publicité ciblée à destination des mineurs et celle visant des caractéristiques «sensibles», comme la tendance politique ou l'appartenance religieuse.

Enfin, les plates-formes en ligne devront publier une fois par an un rapport détaillant notamment les actions mises en place pour modérer les contenus. Elles devront se doter d'un système gratuit de réclamations permettant de contester des décisions de retrait d'information, de suspension ou de résiliation de compte. 

Les Gafam concernés

Le projet impose également de nouvelles obligations aux «très grandes plates-formes», celles comptant «plus de 45 millions d'utilisateurs actifs» dans l'UE, comme les Gafam, ainsi que Twitter, et peut-être TikTok ou Booking.

Ces acteurs devront évaluer eux-mêmes les risques liés à l'utilisation de leurs services et mettre en place les moyens appropriés pour retirer des contenus problématiques. Ils se verront imposer une transparence accrue sur leurs données et algorithmes de recommandation.

Ils seront audités une fois par an par des organismes indépendants et placés sous la surveillance de la Commission européenne qui pourra infliger des amendes atteignant 6% de leurs ventes annuelles en cas d'infractions répétées. Le DSA interdit notamment l'utilisation des données sur les opinions politiques à des fins de ciblage publicitaire.

Une première mondiale

Pour le Conseil de l’UE, ce texte «vient consacrer le principe que ce qui est illégal hors ligne, doit également être illégal en ligne».

L'ancienne secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, avait demandé jeudi soir à l'UE d'adopter cette nouvelle législation pour «soutenir la démocratie mondiale avant qu'il ne soit trop tard. Pendant trop longtemps, les plates-formes technologiques ont amplifié la désinformation et l'extrémisme sans avoir à rendre de comptes», avait-elle souligné.

La lanceuse d'alerte américaine Frances Haugen, qui a dénoncé la passivité de Facebook face aux nuisances de ses réseaux sociaux, avait salué en novembre le «potentiel énorme» du DSA qui pourrait devenir une «référence» pour d'autres pays, y compris les Etats-Unis.

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