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La semaine de Philippe Labro : héroïnes du quotidien, héros de la démocratie

[THOMAS VOLAIRE]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour Direct Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre. 

 

LES «PONTS DE MAI» 

Les «ponts» ! Ces longues et vides journées de ralentissement général du pays, votre chroniqueur – pour cause d’un incident de santé – les a passées en milieu hospitalier. Qu’on se rassure : tout va bien. Mais cette immersion inattendue dans l’univers si particulier qu’est une grande institution dévouée à sauver, soigner, guérir, me permet, encore une fois, de rendre hommage aux femmes et aux hommes qui, en France, font profession, ou plutôt, font vocation d’aider les autres. Si j’écris «encore une fois», c’est parce que, dans un de mes livres (La traversée) et dans quelques articles anciens, j’avais déjà exprimé ma reconnaissance à l’égard de celles et ceux que j’ai appelés «les héroïnes et les héros du quotidien». Je suis heureux de pouvoir, ici, à nouveau, le dire et le redire, puisque je viens de le revivre.

Nous ne nous rendons pas assez compte que nous possédons, sans doute, une des meilleures médecines du monde – que, du plus grand chirurgien à la plus anonyme des aides-soignantes, il y a, dans tous les exercices de ces métiers (de la salle de réanimation aux techniciens du scanner, des brancardiers aux anesthésistes, des infirmières aux internes, de celui qui opère à celles qui l’assistent, de celle qui perfuse à celle qui nourrit, de celui qui veille, la nuit, à celle qui arrive, à 6 heures du matin, après, parfois, un long trajet de train ou de métro), une somme incalculable et admirable de précision, attention, compétence, respect du patient, concentration (aucune faute n’est envisageable, on ne peut rien négliger) qui force le respect.

J’éprouve, en particulier, une tendresse et un intérêt très vifs pour les infirmières et les aides-soignantes. Ces femmes – souvent jeunes – sont celles qui vous relient le plus fréquemment à la vie : les petites choses, le suivi, toujours délicat, qui semble routinier mais exige, en réalité, un méticuleux devoir de vigilance, du savoir-faire, de l’expérience, et, ce qui est tout aussi important, un surcroît de sourire, une once de gentillesse.

Je les revois toutes, de Delphine à Awa, de Nicole à Aïssa, et tant d’autres ! Elles appartiennent à une profession souvent ignorée, pas bien payée, dont peu de gens mesurent ce qu’elle signifie de sacrifices et d’altruisme. Quiconque a, au moins une fois dans son existence, fait le voyage au sein du grand paquebot et en est revenu pour fouler à nouveau la terre du bonheur de tous les jours, doit saluer ces inconnues aux visages plus beaux et plus vrais que ceux de toutes les marionnettes que veut nous imposer la foire aux vanités médiatico-contemporaine.

 

MERCREDI 14 MAI

Début du 67e Festival de Cannes. Habituel brouhaha de rumeurs, de films «sulfureux» (adjectif tellement utilisé, désormais, qu’il en perd sa force) et, on l’espère, quelques surprises. Je signale, le 19 mai, un documentaire sélectionné hors compétition, réalisé par Stéphanie Valloatto, coécrit et produit par Radu Mihaileanu (réalisateur de Va, vis et deviens, Le concert, etc.) consacré à douze défenseurs de la liberté d’expression qui n’ont qu’une seule arme pour combattre les dictateurs : un crayon. Ça s’appelle Caricaturistes - Fantassins de la démocratie. Tunisiens, Chinois, Israéliens ou Palestiniens, ce sont douze portraits, drôles et tragiques, de ces caricaturistes en danger. Original. Et puissamment différent de toutes les paillettes et artifices. Que Thierry Frémaux ait décidé de faire monter les marches à cette équipe pour présenter ce document témoigne du rôle formidable que peut jouer un tel Festival, ce qui, d’un coup, l’exonère, selon moi, de toute critique.

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