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Affaire Barbarin : les enjeux du procès en appel

Le cardinal Barbarin est jugé jeudi par la cour d’appel de Lyon, après avoir été reconnu coupable en première instance de non-dénonciations d’agressions sexuelles d’un prêtre de son diocèse.

Il lui est reproché d’avoir gardé le silence lorsque le père Preynat, auteur des faits, lui avait avoué en 2010 s’être livré à des attouchements sur des enfants. Puis de n’avoir toujours rien dit lorsqu’une des victimes, un ancien scout, s’était confié à son tour, en 2014. La justice lui reproche donc d’avoir «couvert» le prêtre. «Alors même que ses fonctions lui donnaient accès à toutes les informations et qu’il avait la capacité de les analyser et les communiquer utilement, Philippe Barbarin a fait le choix en conscience, pour préserver l’institution à laquelle il appartient, de ne pas les transmettre à la justice», détaille le jugement de première instance.

un nouveau témoignage embarassant

Le cardinal avait alors été condamné à six mois de prison avec sursis, avant de faire appel. Il continue toujours de nier avoir voulu cacher les agissements de Bernard Preynat. Avec ses avocats, il affirme que la victime qui lui avait dévoilé les faits avait également expliqué que son dossier était prescrit (les attouchements sexuels se sont déroulés de 1975 à 1982 et la prescription était de 20 ans en 2014, lorsqu’elle en a parlé au cardinal, contre 30 ans désormais). Il explique également avoir reçu ses paroles comme une confidence. S’il reconnaît des erreurs (notamment de ne pas avoir écarté le prêtre de la paroisse), le religieux estime que s’être tû ne constitue pas un délit.

Récemment, un ancien prêtre est venu s’en prendre à son tour au cardinal, en affirmant au Parisien qu’il savait dès 2002 que le père Preynat avait commis des actes pédophiles. «J’ai des fiches sur Preynat», aurait-il même indiqué. Le prélat se défend en expliquant ne pas avoir le souvenir d’une discussion de la sorte et en niant l’existence de fiches. Il argue qu’il s’agit d’une vengeance de la part de l’ancien prêtre, puisque le cardinal l’avait défroqué en apprenant son homosexualité.

la non-dénonciation, un dossier très complexe juridiquement

En plus de cela, le dossier est particulièrement complexe sur le plan juridique. Une jurisprudence considère qu’apprendre des faits susceptibles d'être dénoncés mais ne pas le faire est une infraction «instantanée», dont le délai de prescription, fixé à trois ans, commence à courir quand la personne est informée. Or, lors de la première instance, si le tribunal a reconnu le cardinal coupable d’avoir gardé le silence sur ce que le père Preynat lui avait avoué en 2010, ce délit était prescrit lorsque la justice s’est saisie du dossier, en 2015. En revanche, concernant le témoignage de l’ancienne victime, en 2014, la prescription ne s’appliquait pas. Monseigneur Barbarin avait à nouveau était reconnu coupable et, cette fois, condamné pour cela.

Les débats lors de ce deuxième procès risquent fortement de se concentrer essentiellement autour de la façon dont le délit de non-dénonciation s’inscrit dans le temps. Avec la crainte de voir le fond de l’affaire, l’entrave (ou non) de l’action de la justice par le prélat, être relégué au second plan. Les parties civiles resteront, elles, attentives aux considérations sur le secret de la confession et si celui-ci s’applique automatiquement dès lors que l’on parle à des clercs, ce qui les empêcherait de facto d’avoir à signaler un fait répréhensible dont ils viennent d’être informés, même hors de l’acte confessionnel à proprement parler.

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