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«Emmanuel Macron ne pourra plus se contenter de sa majorité pour gouverner», estime Bruno Jeanbart d'OpinionWay

Le front républicain fonctionne moins bien, mais fonctionne toujours selon Bruno Jeanbart, analyste chez OpinionWay.[THOMAS COEX / AFP]

Emmanuel Macron l'emporte avec 58,54% des voix contre 41,46% pour son adversaire Marine Le Pen. Front républicain, reports de voix, abstention... Analyse des résultats avec Bruno Jeanbart, vice-président de l'institut de sondage OpinionWay.

Emmanuel Macron est réélu avec 16 points d'avance sur sa concurrente. Cette victoire finalement assez nette est-elle surprenante ?

C'est dans la fourchette haute de ce que nous avions estimé. L'écart s'est agrandi dans les derniers jours. Cela vient confirmer une tendance qu'on voit presque systématiquement lors des duels entre un candidat du Rassemblement national et un candidat d'un parti plus modéré. Par rejet de l'extrême droite, une partie de l'électorat finit par se rendre aux urnes pour voter pour l'autre candidat.

Le front républicain existe donc toujours ?

On l'a vu aux régionales l'an dernier, pour la région Paca notamment, et on le voit ce soir. Le front républicain fonctionne moins bien mais il fonctionne encore suffisamment pour empêcher l'élection de Marine Le Pen.

L'abstention atteint 28%. Comment l'analysez-vous ?

Comme attendu, elle est assez forte mais elle l'était déjà au premier tour (26%). On observe quand même que de nombreux électeurs ont fait le choix de voter même si 50% d'entre eux n'ont pas vu leur candidat favori qualifié. Les électeurs de Jean-Luc Mélenchon n'ont pas complètement boudé les urnes ou pas aussi massivement que certains pouvaient le dire au soir du premier tour. A noter aussi que le vote blanc et nul est relativement élevé (8,6%).

Les Français ont-ils voté par choix ou par rejet ?

Selon notre enquête, 54% des électeurs ont voté par choix et 46% par rejet de l'autre candidat. Chez les électeurs d'Emmanuel Macron, 52% ont voté pour lui et 42% contre Marine Le Pen. Chez les électeurs de Marine Le Pen, ils sont un peu plus nombreux à avoir voté par adhésion (56%). Globalement, et comme en 2017, c'est un second tour en partie par défaut auquel on a assisté.

Comment ont joué les reports de voix ?

Plus de la moitié (54%) des électeurs de Jean-Luc Mélenchon ont voté pour Emmanuel Macron, c'est plus que ce qui était attendu au soir du premier tour mais c'est moins qu'en 2017 (plus de 60%). Ce recul se fait au profit du vote Le Pen : 24% des électeurs de Jean-Luc Mélenchon au premier tour ont voté pour Marine Le Pen, contre 10% en 2017.

C'est le vote de l'électorat de Jean-Luc Mélenchon qui explique la victoire nette d'Emmanuel Macron ce soir. Il pouvait gagner sans, grâce à une grande réserve de voix chez les électeurs de Pécresse, Jadot, Hidalgo, Roussel... Mais avec un électeur de Jean-Luc Mélenchon sur deux, il était évident que la victoire serait assez large.

A noter également que les abstentionnistes du premier tour ayant voté au second ont majoritairement choisi Emmanuel Macron.

Marine Le Pen fait-elle toujours peur ?

Plus on se rapproche du scrutin, plus la peur de l'arrivée de l'extrême droite au pouvoir se fait sentir et mobilise les électeurs. Malgré tout, la courbe de progression du RN est impressionnante. On passe de 18% en 2002 à 41% en 2022. La question qui se pose c'est : jusqu'où va-t-elle aller ?

63% des Français souhaitent imposer une cohabitation à Emmanuel Macron. Que vous inspire ce chiffre ?

C'est assez logique mais ça ne veut pas dire qu'il y aura une cohabitation. Premièrement, ces 63% se divisent entre ceux qui veulent une cohabitation avec la droite et ceux qui veulent une cohabitation avec la gauche. Deuxièmement, ces électeurs iront-ils voter ? Les bases électorales du RN et de LFI sont jeunes et populaires. Elles risquent de s'abstenir aux élections législatives. Ni Jean-Luc Mélenchon ni Marine Le Pen ne retrouveront en juin leur score du 10 avril. La mobilisation de l'électorat va être un des enjeux de la campagne. Ça va être difficile, on voit que les Français en ont marre et veulent penser à autre chose. On s'attend à une forte abstention, probablement moins d'un électeur sur deux.

Comment se profilent les élections législatives ? Emmanuel Macron aura-t-il une majorité ?

Le principal enjeu, c'est l'offre électorale à gauche. Si la gauche est divisée entre PS, écologiste, Insoumis et communiste, la règle des 12,5% de voix pour accéder au second tour risque de limiter les chances de la gauche d'avoir beaucoup d'élus. Ils peuvent néanmoins espérer en avoir plus qu'en 2017 grâce au poids de Jean-Luc Mélenchon.

Emmanuel Macron a une bonne chance d'obtenir une majorité mais je dirais que ce n'est pas son principal défi. Son défi sera de réformer le pays contre une opposition forte, y compris dans la rue. Il va devoir inventer une manière de réformer plus consensuelle. Il ne pourra plus se contenter de sa majorité au parlement pour gouverner.

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