Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour CNEWS Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.
VENDREDI 1ER SEPTEMBRE
Le signe immanquable, c’est le grand marronnier en face de mes fenêtres. Lorsqu’il est rouge-orange et que ses feuilles s’amenuisent, il permet de distinguer la silhouette du génial monument – exploit d’ingénieurs qui ne prirent pas plus de deux ans pour construire cette tour Eiffel –, alors je sais que l’été s’achève, que septembre arrive, et, avec lui, l’automne. J’ignore ce que l’automne va nous apprendre. On peut tenter, en revanche, à l’occasion de cette chronique de rentrée, de récapituler ce que l’été nous a appris.
Qu’ai-je appris de l’été ? J’ai appris qu’en matière d’actualité politique, il n’y a plus de pause estivale. Le grand chambardement qui a précédé, puis suivi, l’élection de Macron à la tête de l’Etat, ses réussites comme ses erreurs, les éparpillements des partis traditionnels, les balbutiements d’un mouvement à peine naissant, les surprises et les méprises, tout cela a alimenté les chaînes d’info en continu.
J’ai appris, aussi, qu’il n’existe aucun état de grâce pour un nouveau président et qu’après avoir été encensé, Emmanuel Macron a eu droit – et continue d’avoir droit – à ce que les maniaques du langage américain appellent le «bashing» et qu’on peut, plutôt, identifier comme la dégelée, la charge, le harcèlement, la critique, la désillusion, ce goût irrépressible du Français pour le mécontentement. A qui la faute, me direz-vous ? A l’opinion ou aux médias ? A celui (ou ceux) qui a (ont) fauté ? A tout cela réuni ?
J’ai appris que François Hollande ne quittera jamais la politique et ne pourra jamais trop longtemps rester à l’écart de ce qu’il aime faire, ce qu’il sait faire : parler, synthétiser, parler. Pour revenir ? J’ai appris que seuls les imbéciles refusent encore la réalité de la dégradation climatique planétaire.
Les bouleversements observés, filmés, étudiés, les glaciers qui s’effritent et les forêts qui brûlent (Portugal, France, Californie…), les ouragans qui paniquent toute une région (Harvey, en ce moment, au Texas et en Louisiane, un désastre sans précédent, qui coûtera des vies et des milliards) ont régulièrement occupé les écrans. Et nous ont régulièrement amenés à cette interrogation simple, lancinante et coléreuse : «Que font-ils donc ?»
J’ai appris que Donald Trump ne répondrait pas à cette question, que son imprévisibilité et son impulsivité «tweetomaniaque» avaient conduit plusieurs membres de son propre parti à se demander : «Est-il simplement apte à exercer le job ?» Toute hypothèse est possible sur l’avenir de Donald Trump, mais je crois qu’il peut durer plus longtemps que ne l’espèrent ses adversaires.
J’ai appris qu’Angela Merkel avait toutes les chances d’être élue chancelière d’Allemagne pour la quatrième fois. Et cela m’a réjoui.
J’ai appris que la Dame en Noir ne connaît pas de trêve en été : nous n’avons pas cessé de rendre hommage à des hommes et des femmes qui ont traversé nos générations : Simone Veil, bien entendu (la plus grande des Françaises), et d’autres, de Claude Rich à Gonzague Saint Bris (je suis allé cette année à sa Forêt des livres : 60 000 visiteurs, 400 écrivains, c’est extraordinaire !), de Jeanne Moreau à Mireille Darc (on l’enterre aujourd’hui, la souriante femme de cœur), de Sam Shepard à Max Gallo, de Christian Millau à Chester Bennington – arrêtons là, voulez-vous ?
J’ai appris qu’il y a beaucoup d’argent dans le football.
J’ai appris ce que je savais déjà : Il fait toujours beau quelque part, Prendre un enfant par la main, Le meilleur des choses ne coûte rien – chansons éternelles, vérités évidentes, mais faut-il les ignorer parce qu’elles le sont ?