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Sénégal : opposants écartés, manifestations monstres... Tout comprendre à la crise politique qui frappe le pays

Au pouvoir depuis 2012, Macky Sall a reporté la présidentielle sénégalaise. [© John Thys/POOL via REUTERS]

Le report de l’élection présidentielle, initialement prévue le 25 février, a plongé le pays d’Afrique de l’Ouest dans le chaos. Le chef d’Etat sénégalais, Macky Sall, dont le parti APR est menacé dans les sondages, a réitéré son engagement à ne pas se présenter pour un troisième mandat.

Samedi 3 février, un séisme politique a frappé le Sénégal. A quelques heures de l’ouverture de la campagne électorale, le président de la République, Macky Sall, a annoncé, son report.

«Notre pays est confronté depuis quelques jours à un différend entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel, en conflit ouvert sur fond d’une supposée affaire de corruption de juges», s’est-il justifié, le visage grave, sur les écrans de télévision.

Pour la première fois depuis 1963, la présidentielle n’aura pas lieu au Sénégal. Du moins, à sa date initiale, le 25 février. Elu en 2012, Macky Sall a, pour autant, réitéré son renoncement à un troisième mandat. «Mon engagement solennel à ne pas me présenter à l’élection reste inchangé. J’engagerai un dialogue national ouvert afin de réunir les conditions d’élections libres transparentes et inclusives dans un Sénégal apaisé et réconcilié.»

Un pays plongé dans l'incertitude

Invoquant les conflits entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel, qui a validé en janvier vingt candidatures (un record), le chef du parti Alliance pour la République (APR) a plongé son pays dans l’incertitude.

Menacé dans les sondages par Bassirou Diomaye Faye, le candidat désigné par Ousmane Sonko – principal opposant condamné à deux ans de prison ferme en juin 2023 -, le parti du chef d’Etat a obtenu le soutien du Parlement. Ce dernier a entériné, dans une grande confusion, le projet de loi visant à repousser la présidentielle au 15 décembre 2024.

Pour expliquer cette décision, qui planait depuis des mois, l’éviction du candidat du Parti démocratique sénégalais (PDS), Karim Wade, de la course à la présidentielle, par le Conseil constitutionnel, est également évoqué. En raison de sa double nationalité franco-sénégalaise au moment du dépôt de son dossier, le fils de l’ancien président Abdoulaye Wade (2000-2012) ne pouvait pas se présenter. La coalition de Karim Wade a initié la création d’une commission d’enquête parlementaire sur deux des sept juges du Conseil, qui ont, a contrario, validé la candidature de Rose Wardini, également franco-sénégalaise.

affrontements entre forces de l’ordre et manifestants

Le Sénégal, frappé par une grave crise politique en mars 2021 puis en juin 2023, pouvait s’enorgueillir d’une relative stabilité politique par rapport à ses voisins malien, burkinabé et nigérien. Les trois pays, confrontés à des problématiques de jihadisme, d’insécurité et de pauvreté, ont, depuis que des militaires ont pris le pouvoir par la force, en 2020 au Mali, en 2022 au Burkina Faso et en 2023 au Niger, été exclus de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Le report de l’élection a provoqué de vastes remous. Plus d’une dizaine de candidats de l’opposition se sont rassemblés, dimanche, à Dakar. Des affrontements entre forces de l’ordre et manifestants ont éclaté : la candidate Anta Babacar Ngom et l’ex-première ministre Aminata Touré ont été interpellées puis relâchées dans la nuit.

Contre ce «coup d’Etat constitutionnel», Khalifa Sall, l’ancien maire de Dakar, annoncé parmi les favoris du scrutin, a, de son côté, été incarcéré à la prison du Cap Manuel. Lâché en interne par son Premier ministre Amadou Ba, désigné en septembre pour représenter le parti au pouvoir, Macky Sall se trouve profondément isolé. Le report de l’élection paraissait inévitable pour éviter la déroute annoncée d'un parti désuni.

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