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Vanessa Paradis, née sous la bonne étoile

Vanessa Paradis lors de l'avant première de "Café de Flore" le 24 janvier 2012 à Paris[CC/Baptiste ROUSSEL]

Tout a commencé par une chanson. Une petite voix émoustillante, une mélodie originale et voici Joe le taxi, le plus grand tube des années 80 en France. En 1987, une adolescente de tout juste 14 ans déboule sur les ondes. Elle s’appelle Vanessa Paradis.

 

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Tout commence en 1980, avec une première apparition télé aux côtés de Jacques Martin dans l’Ecole des fans. Vanessa n’a que 7 ans, mais son interprétation du tube de Philippe Châtel, Emilie Jolie, sonne très juste. Les parents Paradis, artisans commerçants en bord de Marne, n’imaginent pas leur fille en chanteuse prodige. Ils se limitent à inscrire Vanessa à des cours de piano et de danse.

 

Vidéo : Vanessa Paradis chante « Émilie Jolie » à l’école des fans (1980)

 

 

Sept ans plus tard, tout s’enchaîne. Son oncle, Didier Pain, lui fait enregistrer « Joe le taxi » aux côtés d’Etienne Roda-Gil pour les paroles, et de Franck Langolf pour la musique. A la fin de l’été 1987, Joe le taxi vient de passer 14 semaines en tête des hits parades, et s’est vendu à 1 million d’exemplaires. L’enfant prodige devient star. La France découvre la Lolita aux jeans troués et aux yeux clairs. « Joe » caracole pendant des semaines en tête des hit-parades, en France mais aussi en Grande-Bretagne. Pourtant, malgré le succès, l’adolescente n’est pas aimée et se retrouve au cœur d’une campagne de lynchage médiatique, venue de la critique mais aussi du public. Trop jeune, trop jolie, trop femme enfant : Vanessa attise les jalousies et maîtrise mal son image. Quelques années plus tard, elle reconnaîtra qu’à 14 ans, maquillée comme une femme, elle ne faisait pas ce qu’il fallait pour qu’on l’aime. Elle en gardera une blessure profonde, mais pas une soif de revanche.

 

Vidéo : « Joe le taxi » (1987)

 

 

Malgré le déchaînement des passions, Vanessa garde la tête froide : « Quand la chance passe devant vous, il faut l’attraper au vol, il faut se battre pour la conserver, (...) ça peut faire penser à un p’tit soldat », confiait-t-elle quelques années plus tard au JT de France 2. Dans le style «petit soldat» justement, Vanessa n’est pas du genre à se reposer sur sa bonne étoile : la jeune fille travaille sans relâche et multiplie les rencontres.

 

Des rôles sur mesure

Comme pour la musique, Vanessa se lance très tôt dans le cinéma, dès 1989. Elle tient le rôle d’une Lolita dans Noce blanche, un film de Jean-Claude Brisseau. Pour ce premier rôle - celui de Mathilde, une jeune fille marginale amoureuse de son prof de philo - Vanessa bluffe son public et la critique. Récompensée par le César du meilleur jeune espoir féminin et par le Prix Romy-Schneider.

 

Vidéo : Vanessa Paradis dans Noce Blanche (Jean-Claude Brisseau, 1989)

 

 

Au cours de la cérémonie des César, elle interprète « La javanaise », ce qui ne laisse pas insensible l’un de ses futurs Pygmalion : Serge Gainsbourg. Sous le charme, il la prend sous son aile et lui écrit son deuxième album sur mesure : Variations sur le même t’aime. Plusieurs singles «se détachent» de cet album: « L’amour en soi », « Dis-lui toi que je t’aime » et « Tandem » dont le clip, tourné par Jean-Baptiste Mondino, marquera le début de la collaboration entre le photographe et la chanteuse. Avec ce disque, la « lolycéenne » de 18 ans remporte une Victoire de la musique dans la catégorie meilleure chanteuse féminine. Plus mature, Vanessa Paradis quitte définitivement le monde de l’enfance. Le grand Serge dira d’elle : «Paradis c’est l’enfer».

 

Vidéo : « Dis-lui toi que je t’aime »

 

 

A l’approche de ses 19 ans, Paradis n’est plus une enfant gâtée. Sa collaboration avec le fumeur de Gitanes, son caractère trempé et ses nombreuses récompenses l’ont crédibilisée. Elle est désormais artiste et femme à part entière. La maison Chanel ne s’y trompe pas et choisit la chanteuse pour représenter le parfum Coco. En 1991, le spot signé Jean-Paul Goude qui fera le tour du monde : la lolita, transformée en oiseau de paradis, sifflote et se balance dans une cage géante à 15 mètres du sol (pour la petite histoire, Vanessa a refusé de se faire doubler et a suivi un stage de trapèze à l’école du cirque d’Annie Fratellini).

 

Vidéo : Publicité Chanel avec Vanessa Paradis

 

 

Pour Vanessa, c’est une consécration : la jeune femme joue enfin dans la cour des grands... et a des envies d’Amérique. L’oiseau s’échappe deux ans plus tard. En 1991, elle part s’installer 6 mois à New York avec son oncle et manager, Didier Pain. L’occasion d’une belle rencontre : celle avec le chanteur Lenny Kravitz, qui va lui écrire un album aux accents seventies entièrement en anglais, baptisé très simplement Vanessa Paradis. L’idylle est passionnelle mais l’album connaît un succès mitigé. Peu importe, la jeune femme a plusieurs cordes à son arc.

 

Vidéo : « Be my baby » (1992)

 

 

Malgré le succès de Noce blanche (près de deux millions de spectateurs), la jeune fille souhaite se faire oublier quelque temps des plateaux de cinéma. Peut-être en raison du tournage du film de Brisseau, qui ne s’est pas très bien passé. La parenthèse durera 5 ans (Vanessa aurait, paraît-il, rejeté plusieurs scénarios, dont ceux de John Boorman et de Pedro Almodovar !).

Finalement elle dit oui à Jean Becker pour le film Elisa, où elle incarne une jeune orpheline à la recherche de son père (qui n’est autre que Gérard Depardieu). La comédienne prend donc son temps et tourne peu – à peine 8 films entre 1989 et 2007. Puis le rythme s’est accéléré : entre 2010 et 2013, elle joue dans 8 films. Quand on y regarde d’un peu plus près, les rôles choisis par Vanessa ont (presque) tous ce point commun d’incarner des personnages avec une grande soif d’absolu. Entre Colette, la prostituée au grand cœur de Mon Ange de Serge Frydman (2005), et Adèle, la jeune suicidaire qui s’éprend d’un lanceur de couteau lui aussi suicidaire (incarné par Daniel Auteuil) de La fille sur le pont (Patrice Leconte, 1999), il y a des similitudes évidentes.

 

Vidéo : Vanessa Paradis dans La Fille du pont (Patrice Leconte, 1999)

 

 

Vanessa le reconnaît à demi-mots : «J’aime les rôles intenses, qui laissent beaucoup de traces(...) Je fais peu de films et quand j’en fais j’ai vraiment envie de faire des voyages». Pourtant, Vanessa refuse de se laisser enfermer dans un seul registre. Pour preuve, son rôle dans la comédie d’action de Patrice Leconte Une chance sur deux, où elle partage l’affiche aux côtés de deux monstres sacrés (Jean-Paul Belmondo et Alain Delon), ou la comédie complètement déjantée des frères Poiraud, Atomik Circus : Le Retour de James Bataille, où elle interprète pour la première fois au cinéma une chanteuse (elle participe au passage à la bande originale du film).

 

Rencontre avec Johnny Depp

Les deux artistes se sont rencontrés à Paris en juin 1998, alors que Johnny Depp était sur le tournage de La Neuvième porte de Roman Polanski. Quatorze années de vie commune et deux enfants plus tard, le couple annonce sa séparation en juin 2012. Pour la chanteuse, la rencontre avec l’interprète d’Edward aux mains d’argent sonne comme un tournant : «Cet homme-là monopolise mon cœur à jamais (...) Je pourrais aller vivre au pôle Nord si Johnny voulait m’y emmener», confiait-t-elle à l’époque à un magazine féminin. Finalement ce sera une vie mi-glamour mi-bohème, entre Los Angeles et le Var... et une carrière mise entre parenthèses.

Sauf peut- être pour chanter l’amour des siens, avec cet album très personnel, Bliss (Béatitude), sorti en 2000, dédié à sa fille et à son fiancé. Il faut attendre 2006 pour que la jeune femme reprenne le chemin des studios d’enregistrements. Tout d’abord avec sa participation, dans le joli conte musical de Louis Chedid, Le soldat rose, où Vanessa interprète «Made in Asia», une poupée de chiffon un peu triste. Et puis surtout son album, Divinidylle, qui lui a fallu un an et demi pour enregistrer.

 

Vidéo : Mathieu Chedid et Vanessa Paradis

 

 

Inspirée par Cake et The Strokes, elle n’avait qu’une seule exigence : «Je n’avais pas de couleur ou de thème particulier en tête. J’avais envie d’un certain type de réalisation. Je voulais une vraie richesse de mélodie, mais une grande simplicité dans les arrangements. Quelque chose de pas trop chargé.» Résultat : un vrai disque pop. Plus simple, plus épuré, plus mystérieux aussi. Moins personnel que le précédent Bliss, où elle avait écrit « La ballade de Lili-Rose », Divinidylle ne compte qu’un texte écrit par la chanteuse : « Jackadi », une berceuse bluesy dédiée à son petit garçon, Jack. «De telles chansons me paraissent évidentes. Pas pour montrer mon bonheur aux autres, ni pour mettre mes enfants en avant, mais parce que je ne conçois pas ma vie, mon existence et donc mon métier sans euxElle signe elle-même la musique de cinq titres. On retiendra la ballade « Les revenants », son tout premier rock « La bataille » ou le reggae « La mélodie », tous trois sur un texte de Franck Monnet.

 « On a travaillé une première soirée, en novembre 2005, pendant laquelle Mathieu a arrangé une des chansons que j’avais composées (« La mélodie ») et il l’a sublimée. Le lendemain, on a passé une soirée en studio, Frank Monnet est venu et a écrit deux textes en deux heures. Tout d’un coup, ce n’était pas seulement de la musique mais des chansons. C’était l’une de ces soirées magiques qui durent très tard. C’est là que j’ai dit à Mathieu qu’on allait faire le disque ensemble. Après, pendant un an et demi, j’étais surtout à Los Angeles, très occupée ». Mais cela a été pour la bonne cause. « La conception de cet album s’est faite dans des conditions idéales : passer dix jours à travailler et pouvoir ensuite laisser passer deux mois jusqu’à la prochaine session, ça permet un recul rare. En plus, il y avait le manque. Quand on se retrouvait, il y avait une telle énergie, une telle joie d’être ensemble ! », explique-t-elle.

 

Vidéo : « Divine idylle »

 

 

L’album aura été l’occasion de belles collaborations. L’empreinte de M, bien sûr, s’entend énormément – il est le principal arrangeur de l’album–, le compositeur de cinq des onze chansons et a écrit deux textes. Mais ce n’est pas le seul. Thomas Fersen a écrit et composé un éloge ludique de la paresse (« Les piles »), chanté en duo par Vanessa et Mathieu. «Cette chanson, c’est un pur moment de fainéantise. Quand Thomas me l’a envoyée, ça m’a fait rire et ça m’a donné envie de la chanter...» confie-t-elle. Brigitte Fontaine aussi a participé à l’album, en écrivant le texte d’ « Irrésistiblement », l’histoire d’une fille qui guette l’arrivée de son amoureux. Ou encore, Alain Chamfort qui a composé « Junior suite » et Jean Fauque, parolier habituel de Bashung, qui a écrit « Chet Baker ». De jolies rencontres dans cet album qui n’ont rien d’étonnant. Depuis le début de sa carrière, il y a dix-sept ans, Vanessa fonctionne aux coups de cœur... et ça marche ! Numéro 1 dès sa sortie, l’album se vend à plus de 600 000 exemplaires.

 

Retour au cinéma

Depuis La clef, de Guillaume Nicloux, sorti sur les écrans en 2007, Vanessa Paradis s’est faite discrète. Aux plateaux de cinéma, elle a privilégié la musique et sa vie de famille. En 2010, l’actrice revient dans une comédie romantique, L’arnacœur, aux côtés du séduisant Romain Duris. Un registre inhabituel pour la demoiselle, qui s’est souvent illustrée dans des rôles dramatiques, comme dans Elisa ou La fille sur le pont.

 

Vidéo : Vanessa Paradis dans L’Arnacœur (Pascal Chaumeil, 2010)

 

 

La comédienne a, cette fois-ci, osé s’investir dans un domaine avec lequel elle n’était pas familière, démontrant ainsi l’étendue de son talent. «En lisant le scénario, j’ai ri et je me suis vue dans cette histoire, sans avoir d’idées derrière la tête (...). Je ne me suis pas dit : “Une comédie, ce serait bon pour ma carrière.” (Cela) a été naturel et très rapide», a expliqué la star dans un entretien accordé au magazine Première. Vanessa Paradis avoue par ailleurs avoir été séduite par l’idée de tourner avec Romain Duris. Un souhait partagé. «Cela faisait longtemps que je voulais jouer avec elle. Elle fait partie des actrices rares, car elle est pleine de mystère, pleine de grâce, pleine de magie », confie l’acteur. Sur le tournage, à Monte Carlo, les deux trentenaires se sont immédiatement plu. «Romain Duris et Vanessa Paradis ont vraiment beaucoup aimé travailler ensemble. Ils étaient en phase dans toutes les scènes. Ils étaient très généreux l’un vis-à-vis de l’autre », explique le réalisateur Pascal Chaumeil. Avec plus de 3,5 millions de spectateurs, L’arnacœur, de Pascal Chaumeil est son plus gros succès au cinéma.

Du haut de ses 25 ans de carrière, portée depuis ses débuts par de fructueuses collaborations, l’artiste avoue aujourd’hui garder ses distances avec la célébrité et prendre le temps d’écrire son histoire d’actrice et de chanteuse, au rythme de ses propres envies : «J’ai vécu mes premiers dix ans de carrière à fond, dans un déroulement ininterrompu, où tout s’enchaînait. Prendre le temps de choisir, d’être très sélective, s’est imposé», confiait-elle à l’hebdomadaire Les Inrockuptibles. Vanessa ne chôme pas, elle prend son temps, par amour des belles choses.

 

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