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L'épave du Thésée fait rêver les archéologues

Le "Miniplon" bâteau utilisé pour les recherches archéologiques sous marines de l'épave du "Thésée", navire français coulé en 1759 lors de la bataille "des cardinaux" contre la Grande-Bretagne [Marcel Mochet / AFP] Le "Miniplon" bâteau utilisé pour les recherches archéologiques sous marines de l'épave du "Thésée", navire français coulé en 1759 lors de la bataille "des cardinaux" contre la Grande-Bretagne [Marcel Mochet / AFP]

Un vaisseau de 74 canons gisant intact à quelques kilomètres seulement des côtes du Morbihan? C'est ce que pensent avoir découvert des archéologues sous-marins qui rêvent de ressusciter le Thésée, fleuron de la Royale coulé en 1759 lors de la bataille des Cardinaux.

"C'est une épave extraordinaire, un bateau flambant neuf coulé sans avoir subi le feu de l'ennemi, et protégé par une épaisse couche de vase", dit à l'AFP Jean-Michel Keroullé, président de la Société d'archéologie maritime du Morbihan, évoquant un "Graal de l'archéologie sous-marine française".

Des plongées exploratoires menées fin mai sous l'autorité du ministère de la Culture ont renforcé les chercheurs dans leur conviction que l'épave, localisée en 2009, à une vingtaine de mètres de profondeur, à 6 milles au nord-est de l'île de Hoedic (Morbihan), dans la baie de Quiberon, est bien celle du Thésée.

"Sous 2,5 m de vase et 20 cm de concrétions de coquillages, nous avons découvert sur 50 cm une pièce de bois en très bon état, dont un échantillon va être analysé", dit Patrice Brunet, président de l'association Vaisseau Thésée et vice-président du Yacht club de France.

- Naufrage en baie de Quiberon -

 

"Officieusement on est sûr que c'est le Thésée, même si officiellement ce n'est pas encore établi", affirme le passionné.

Des archéologues sous marins en train d'examiner des pièces de métal remontées de l'épave qu'ils croient être celle du "Thésée", un navire coulé en 1759 en baie de Quiberon [Marcel Mochet / AFP]
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Des archéologues sous marins en train d'examiner des pièces de métal remontées de l'épave qu'ils croient être celle du "Thésée", un navire coulé en 1759 en baie de Quiberon

Quelque peu tombée dans l'oubli, la bataille des Cardinaux qui opposa 21 vaisseaux français à 26 navires anglais le 20 novembre 1759, près des roches de Hoedic qui lui ont donné son nom, fut une des plus importantes batailles navales de son époque et l'une des plus cuisantes défaites de la Royale.

"En pleine guerre de Sept ans, elle a scellé la prédominance de l'Angleterre sur les mers et la perte par la France de ses colonies en Amérique", rappelle Gilles Renaudot, responsable du musée consacré à cette bataille à Piriac-sur-Mer (Loire-Atlantique).

Parmi les huit vaisseaux perdus lors de la bataille, le Thésée, alors tout juste sorti des chantiers navals de Brest, est le seul à avoir sombré intact: il a coulé en quelques instants pour avoir viré brutalement de bord en laissant ouverts ses sabords, les ouvertures à fleur d'eau destinées aux canons.

- L'exemple du Vasa en Suède -

 

"Sur les 650 marins à bord, seuls une vingtaine ont pu se sauver en grimpant dans la mâture, laquelle, vu la faible profondeur, a continué à dépasser des flots", raconte M. Renaudot.

Olivia Hulot (g) experte au Département des recherches archéologiques sous-marines (DRASSM) et David Brossard (d), skipper du bateau de recherche "Miniplon" en train d'examiner un plan du bateau "Thésée", coulé en baie de Quiberon en 1759 [Marcel Mochet / AFP]
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Olivia Hulot (g) experte au Département des recherches archéologiques sous-marines (DRASSM) et David Brossard (d), skipper du bateau de recherche "Miniplon" en train d'examiner un plan du bateau "Thésée", coulé en baie de Quiberon en 1759

"Il s'agit d'un site tout à fait exceptionnel", confirme Olivia Hulot, experte au Département des recherches archéologiques sous-marines (DRASSM), évoquant un "faisceau d'indices" laissant penser que l'épave est bien celle du Thésée.

Si tel est le cas, "elle recèle, outre les corps des marins, tout ce que pouvait contenir à l'époque un bateau partant pour une longue campagne en mer, des vivres à l'armement en passant par la vaisselle et l'accastillage", souligne l'archéologue, qui a elle-même plongé sur le site.

"Le milieu de conservation est optimal: froid, sans lumière et anaérobie", dit Mme Hulot.

 
 

Techniquement envisageable, un renflouement ne pourra pas être réalisé à court terme et s'avèrera extrêmement coûteux, reconnaissent les acteurs au dossier.

"Il faudra compter plusieurs années et quelque 20 millions d'euros, frais de conservation compris, pour les seules fouilles sous-marines", estime Mme Hulot. "Vu l'épaisseur de la vase et la turbidité extrême de l'eau, c'est un chantier titanesque."

Pour le communicant Daniel Perrin, associé au projet, le jeu en vaut la chandelle.

"Dans une période aussi triste, redonner vie à une telle épave pourrait être une cause nationale fédératrice", juge-t-il, évoquant "un Pompéi sous-marin". En Suède, le Vasa a attiré plus de 20 millions de visiteurs depuis son renflouement, affirme-t-il.

 

 

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