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Georges Salinas, directeur de la sécurité d'Emmanuel Macron : «une frange de la population croit que tout est permis»

Le président Macron est toujours suivi de près par Georges Salinas (dans le fond, à sa droite) et ses hommes. [Ludovic Marin / AFP]

Entre animosité extrême de certains, déplacements à honorer et campagne électorale qui fait grimper la tension, la protection du président Emmanuel Macron revêt un enjeu critique. Georges Salinas, directeur de la sécurité de la présidence de la République et chef du groupe de sécurité du président depuis l’été 2021, est en première ligne. Il nous raconte.

Comment s'organise la protection du président de la République ?

Dans notre mission, il y a deux parties. Celle qui concerne les déplacements, ce dont je m'occupe, avec le travail des officiers de sécurité. Ils forment une bulle autour du président pour lui éviter un problème, qui peut être grave. Il y a aussi celle qui concerne les emprises, c'est à dire l'Elysée et les dépendances de l'Elysée. Lorsqu'il y a des réceptions, lorsque le président reçoit des chefs d'Etat, il y a toute une sécurisation qui doit être faite. Le plus voyant dans ce cas, c'est de garder les portes, pour que personne n'entre. Mais il y a aussi d'autres menaces, comme des drones qui s'introduisent dans le périmètre, par exemple.

Sur le terrain, quels sont les risques les plus importants ?

Il n'y a pas de risque moins important qu'un autre. On doit tout prévoir. Un cortège qui se déplace sur la route, il y a des risques d'attaque. Lorsqu'on arrive à un endroit, c'est pareil. Le haut du spectre, c'est l'attaque terroriste, mais ça peut aussi être un simple jet d'œuf. Dans ce cas, ce n'est pas quelque chose qui peut tuer le président, mais c'est une atteinte à l'institution, c'est quand même grave et ça provoque un choc dans la société.

Sur la gifle, beaucoup de choses ont été dites

Y-a-t-il des endroits plus dangereux que d'autres ?

Les menaces dans un bain de foule ne sont pas les mêmes que celles lorsque l'on visite un commissariat, c'est clair. Tout ça est pris en compte, préparé, analysé, puis sécurisé avec des gens qui ont des missions bien spéciales, pour empêcher tout débordement ou acte de malveillance.

On se rappelle l'épisode de la gifle reçue par Emmanuel Macron. Même si vous n'étiez pas en poste à ce moment-là, que s'est-il passé ?

De tradition, les présidents français ont toujours eu un contact avec la population. Ça se voit rarement aux Etats-Unis, par exemple. Nous, ça existe. Donc à partir du moment où il a décidé qu'il poursuivrait cette tradition, c'est quelque chose à laquelle on doit s'adapter. Sur l'histoire de la gifle, beaucoup de bêtises ont été dites. Vous vous doutez bien que sur un bain de foule, il y a une sécurisation qui a été faite avant. Les gens qui s'approchent, qui viennent à la barrière, ont été fouillés, etc. Ce sont des gens qui ne présentent pas une menace, du moins avec arme. Dans ce cas précis, il faut se rappeler que ce n'est qu’une gifle. On ne peut pas accepter non plus de ne faire rentrer dans le périmètre que des manchots. Il y a un risque qui est normalement calculé. Là, on connaît les circonstances, c'est allé très très vite, il ne faut pas non plus faire croire qu'il y avait une grosse menace sur le président.

Avec la période de campagne présidentielle, est-ce encore plus stressant pour vos hommes ?

Pas plus que ça. On n'est pas stressé, mais vigilant. Après les épisodes qu'on a eu ces dernières années, avec les gilets jaunes, etc., on a quand même une population qui s'est un peu débridée, avec une frange qui se lâche et pense que tout est permis. Il est clair qu'on est un peu plus vigilant.

Ce que fait le président, en dehors de sa sécurité, je n'ai pas à en parler

Il y a un rendez-vous qui va arriver et qui est toujours source de tension : le Salon de l'agriculture. En 2017, lors de la précédente campagne, Emmanuel Macron avait notamment reçu un œuf sur la tête. Est-ce qu'il s'agit d'un moment particulièrement risqué ?

Il y a un dispositif particulier, qui n'est pas petit, sur lequel je ne peux évidemment pas entrer dans les détails. On prend toutes les mesures de sécurité pour éviter un incident.

N'êtes-vous pas finalement les personnes les plus proches du président de la République, au point de devenir des amis ?

C'est difficile de répondre. La sécurité est omniprésente, c'est clair, elle rentre même dans l'intimité des gens. C'est pour ça qu'on demande aussi aux agents d'être ultra-discret. De là à devenir amis, je n'en ai aucune idée. Comme dans toutes les relations humaines, il y a des gens que vous appréciez, d'autres moins, certains avec qui vous pouvez devenir ami, d'autres non. Nous, on établit une relation professionnelle, et la protection du président c'est une mission, c'est notre mission. C'est ça qui compte, au-delà de ce qu'il peut y avoir comme relation humaine.

Avec cette proximité, vous devez être les témoins de scènes importantes des coulisses du pouvoir.

Comme je l'ai dit, la première des qualités demandée à quelqu'un de la sécurité, c'est la discrétion. Les rencontres politiques, ce n'est pas mon domaine. Tout ce que fait le président, en dehors de sa sécurité, je n'ai pas à en parler. Et si je suis amené à voir quelque chose c'est pareil. C'est une règle d'or.

de la réalité à la fiction

Avant d’être responsable de la sécurité du président de la République, Georges Salinas a passé de nombreuses années dans la police, de la brigade des Stups à la BRI. Il s’est inspiré de cette longue carrière, des enquêtes et des interventions qu’il a menées pour écrire des romans policiers. Le dernier, «Le murmure des âmes perdues», plonge le lecteur dans une histoire en deux temps, au contact du grand banditisme versant dans le proxénétisme jusqu’à la filature de terroristes trafiquants de drogue. De quoi permettre au lecteur d’en apprendre plus sur le lien pas toujours connu entre certaines filières de stupéfiants et le financement d’opérations terroristes. Un polar rythmé, efficace et agréable à lire, où les règlements de compte peuvent surgir jusqu'à la dernière page.

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