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Le patrimoine historique d'Alep en danger

Prise entre insurgés et troupes fidèles au président syrien Bachar al-Assad, la ville d'Alep s'inquiète pour son patrimoine historique unique, qui de balles d'armes automatiques en obus de mortier, subit des dommages inouïs.[AFP] Prise entre insurgés et troupes fidèles au président syrien Bachar al-Assad, la ville d'Alep s'inquiète pour son patrimoine historique unique, qui de balles d'armes automatiques en obus de mortier, subit des dommages inouïs.[AFP]

Prise entre insurgés et troupes fidèles au président syrien Bachar al-Assad, la ville d'Alep s'inquiète pour son patrimoine historique unique, qui de balles d'armes automatiques en obus de mortier, subit des dommages inouïs.

"Les soldats de Bachar al-Assad ne respectent rien. Ni notre histoire, ni notre religion", lâche un combattant rebelle.

Courte barbe de jais, la tête ceinte d'un bandana vert, il pointe un trou béant ouvert par un projectile à la base du minaret de la mosquée al-Mahmandar, un joyau vieux de sept siècles, sis dans le quartier de Bab al-Nasser. Sous ses pas, le verre brisé craque alors qu'il pénètre dans la salle de prière.

Et tant que les rebelles de l'Armée syrienne libre (ASL) se maintiendront juste à côté de l'imposante mosquée, les obus des troupes du régime continueront sans doute de s'abîmer contre elle.

Un nombre indéterminé de soldats loyalistes ont, eux, pris position dans la citadelle toute proche.

Impressionnante, la forteresse domine toute la ville. Les rebelles sont parvenus à encercler presque totalement la citadelle et assurent que les soldats qui s'y trouvent ne disposent plus que d'un seul passage leur permettant d'être ravitaillés.

"D'un point de vue militaire, la citadelle a presque autant de valeur aujourd'hui qu'il y a 500 ans. Mais, même si nous arrivions à l'encercler complètement, je pense que nous aurions du mal à la prendre", reconnaît Abou Mohammed, un chef rebelle.

De fait, au cours de son existence la citadelle n'aurait été prise, dit-on, qu'une seule fois, par le conquérant mongol Tamerlan, en 1400.

De jour en jour, de pâté de maisons en pâté de maisons, les insurgés ont réussi à s'approcher de la vieille ville. Mais les troupes loyalistes ne lâchent rien. Appuyées par les chars et l'aviations, elles pilonnent des quartiers entiers occasionnant d'importants dégâts aux bâtiments historiques.

Selon l'Unesco, cinq des six sites syriens classés au patrimoine mondial de l'humanité ont souffert des combats qui font rage depuis près d'un an et demi en Syrie. Outre Alep, Damas, l'oasis de Palmyre, le Krak des Chevaliers et les Villages antiques du Nord ont payé un lourd tribut.

Mais Alep, l'une des plus anciennes villes au monde située dans le nord du pays, a sans doute subi les dégâts les plus sévères. Au début du mois, la citadelle a été touchée et son entrée, qui date de l'ère des Mamelouks, a été endommagée.

"Le pire est peut-être à venir"

Au beau milieu des combats, la directrice générale de l'Unesco, Irina Bokova, a lancé un appel aux belligérants, les exhortant à épargner le patrimoine de la ville.

Dans un communiqué, l'organisation dit collaborer avec d'autres agences internationales, dont Interpol, et les pays voisins de la Syrie "pour prévenir le trafic illicite d'objets culturels pouvant résulter de vols dans les musées ou le sites". Le musée de Palmyre a déjà fait les frais de pillards, et celui d'Alep n'est qu'à un jet de pierre de la ligne de front...

Plus tôt dans la semaine, c'est dans le quartier chrétien de Jdeidé que les combats faisaient rage. Là aussi, armes automatiques, obus, lance-roquettes ont fait pleuvoir leurs munitions sur de vieilles bâtisses. Certains encorbellements en bois datant de l'époque ottomane ont été détruits.

"Le pire est peut-être à venir. Ce qui me semble certain, c'est que les risques de destructions sont importants et que le régime est tout à fait capable de raser une partie de la ville", note Thierry Boissière, spécialiste de l'histoire d'Alep.

"De l'autre côté, si le souci de la préservation du patrimoine n'est pas absent de l'ASL, il n'est pour l'instant pas une priorité dans un contexte où prime avant tout la chute du régime", dit-il.

En attendant, des souks où régnait il y a quelques semaines encore l'odeur du fameux savon d'Alep et des épices se dégage aujourd'hui la puanteur âcre des détritus en combustion. Les échoppes sont abandonnées, détruites.

"D'ordinaire, ça grouille de touristes ici. En Europe, les gouvernements mettent en valeur leur patrimoine culturel. Mais pour Bachar al-Assad, tout ça ne vaut rien", lance Abou Abdallah, un jeune combattant, alors qu'il frôle la plaque commémorative apposée sur la façade des plus anciens bains publics du monde.

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