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En Turquie, la contestation anti-Erdogan ne faiblit pas

Banderolle exigeant la démission du gouvernement le 8 juin 2013 place Taksim à Istanbul [Ozan Kose / AFP]

Des milliers de personnes sont à nouveau descendues samedi dans les rues de Turquie malgré les appels répétés du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan à l'arrêt immédiat de la contestation qui ébranle depuis neuf jours tout le pays.

Toujours aussi déterminés, des milliers de manifestants ont occupé la place Taksim d'Istanbul et le désormais fameux parc Gezi, dont la destruction annoncée a déclenché la plus grave crise politique depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement islamo-conservateur en Turquie en 2002.

"Il y a une semaine, je n'aurais jamais pu m'imaginer en train de dormir dans les rues d'Istanbul", a confié à l'AFP Aleyna, une manifestante enveloppée dans sa couverture. "Maintenant je ne sais plus si je pourrai en partir".

Des manifestantes le 8 juin 2013 à Izmir [Ozan Kose / AFP]
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Des manifestantes le 8 juin 2013 à Izmir
 

"Le Premier ministre essaie tous les jours de diviser la population", a déploré Eroy Dilek, un étudiant en génie mécanique de 21 ans, "nous reviendrons ici tous les jours jusqu'à ce qu'il démissionne". Les protestataires reprochent au Premier ministre, leur principale cible, son exercice autoritaire du pouvoir et l'accusent de vouloir islamiser la société turque.

Critiqué dans son pays comme à l'étranger pour la brutalité avec laquelle la police a réprimé la fronde qui le vise, M. Erdogan a légèrement adouci vendredi le discours extrêmement ferme qu'il tient depuis plus d'une semaine contre les contestataires, souvent qualifiés de "vandales" ou d'"extrémistes".

"Nous sommes contre la violence, le vandalisme et les actions qui menacent les autres au nom des libertés", a-t-il déclaré lors d'un forum international à Istanbul, mais "nous accueillons de tout coeur ceux qui viennent avec des exigences démocratiques".

Lors de la même conférence, le commissaire européen à l'Élargissement Stefan Füle a une nouvelle fois dénoncé "le recours excessif à la force" qui "n'a pas sa place dans une démocratie" et appelé M. Erdogan au dialogue.

Sur le même thème, la chancelière allemande Angela Merkel, la Fédération internationale des journalistes (FIJ) ou la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) ont haussé le ton contre les brutalités policières.

"Deux poids, deux mesures"

Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan , le 7 juin 2013 à Istanbul [ / AFP]
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Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan , le 7 juin 2013 à Istanbul
 

Piqué au vif, le Premier ministre truc a vivement réagi en dénonçant le "deux poids, deux mesures" des pays occidentaux à l'endroit de son pays. "Dans n'importe quel pays d'Europe, lorsqu'il y a une protestation violente contre un projet de démolition de ce genre, croyez-moi, ceux qui sont impliqués subissent une répression plus sévère", a-t-il lancé en citant la Grèce, la France ou l'Allemagne.

Selon le dernier bilan rendu public par le syndicat des médecins turcs, la contestation a causé la mort de deux manifestants et d'un policier et fait 4.785 blessés.

L'Association turque des droits de l'Homme (IHD) et un groupe d'avocats ont dénoncé le recours abusif aux gaz lacrymogènes par la police, estimant qu'ils pouvaient être considérés comme des "armes chimiques" lorsque utilisés "à courte distance, en grandes quantités ou des espaces fermés".

Dans un geste de conciliation envers les manifestants, le maire d'Istanbul Kadir Topbas s'est dit prêt à amender le projet urbain à l'origine de la contestation, y excluant "un "centre commercial ou un hôtel". Mais il a maintenu la reconstruction à la place du parc d'une caserne ottomane, rappelant que c'était une "promesse électorale".

Angela Merkel le 7 juin 2013 à Berlin [Odd Andersen / AFP]
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Angela Merkel le 7 juin 2013 à Berlin
 

Le Premier ministre présidait depuis le début de l'après-midi l'une des réunions régulières des instances dirigeantes de son Parti de la justice et du développement (AKP), exceptionnellement organisée à Istanbul, le coeur de la contestation. Selon les médias turcs, il devait ensuite s'entretenir avec le président du Parlement Cemil Ciçek.

Parfois qualifié de "sultan" par ses détracteurs, M. Erdogan avait profité de son retour du Maghreb, dans la nuit de jeudi à vendredi, pour faire étalage de sa puissance et du soutien que continue à lui apporter une part importante de l'opinion turque.

Devant des milliers de supporteurs chauffés à blanc, il avait fustigé les manifestants et exigé la fin "immédiate" des manifestations.

Cette première réponse publique organisée dans la rue par l'AKP depuis le début de la fronde a fait craindre une confrontation entre les deux camps. Mais le chef du gouvernement avait appelé ses partisans à "rentrer chez eux".

A New York, dimanche, des milliers de personnes sont attendues pour une manifestation en soutien au mouvement de protestation en Turquie.

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