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Carnaval de Rio : dernière nuit de folie au sambodrome

Une personne de l'école de samba de Mangueira défile à Rio lors du Carnaval, le 12 février 2018 [Mauro PIMENTEL / AFP] Une personne de l'école de samba de Mangueira défile à Rio lors du Carnaval, le 12 février 2018. [Mauro PIMENTEL / AFP]

Une première école de samba a commencé à faire vibrer l'immense sambodrome de Rio de Janeiro lundi soir avec des danses endiablées et un déluge de décibels pour un carnaval contestataire, qui va aller jusqu'au bout de la nuit.

L'école Unidos da Tijuca a ouvert la dernière nuit des défilés des écoles de samba avec pour thème un hommage à un auteur et artiste brésilien. Cinq autres écoles doivent se succéder, défilant une heure chacune jusqu'à mardi matin, pour tenter de décrocher le titre de numéro un des 13 écoles de samba formant l'élite du «groupe spécial» du carnaval.

La veille, sept écoles de samba ont fait défiler quelque 3.000 danseurs, chanteurs et musiciens chacune dans des roulements de tonnerre de percussions et de chansons très rythmées, devant 72.000 spectateurs survoltés.

Les participants, qui se succèdent en de nombreux tableaux très colorés, portent les déguisements les plus extravagants, et sont accompagnés par des chars allégoriques monumentaux pouvant faire près de 20 mètres de haut, dans une ambiance joyeuse et irrévérencieuse.

Parmi les six dernières écoles de samba défilant dans la nuit de lundi à mardi, celle de Beija-Flor, notamment, est attendue sur le versant contestataire.

Elle a choisi de dépeindre un Brésil rongé par la corruption, avec ses valises de billets qui circulent et ses hommes politiques et entrepreneurs de haut vol jetés en prison.

Le maire de Rio Marcelo Crivella représenté en épouvantail lors du défilé des écoles de samba au Carnaval de Rio, le 12 février 2018 [Mauro PIMENTEL / AFP]
Le maire de Rio Marcelo Crivella représenté en épouvantail lors du défilé des écoles de samba au Carnaval de Rio, le 12 février 2018 [Mauro PIMENTEL / AFP]

Cette école de samba doit notamment faire défiler un rat géant, allégorie des politiques, de droite comme de gauche, mouillés jusqu'au cou dans des scandales de corruption ayant éclaté avec l'enquête tentaculaire «Lavage express» autour de Petrobras, en 2014.

Le défilé de Beija-Flor - qui doit fermer le bal - était très attendu aussi en raison de la participation de la célébrissime drag queen Pabllo Vittar, sur le thème de la dénonciation de l'intolérance sexuelle.

Ce fléau fait chaque année plusieurs centaines de tués parmi les membres de la communauté LGBT au Brésil.

Exaspération

Les fêtards du carnaval de Rio peuvent oublier momentanément sur les rythmes endiablés de la samba la violence devenue incontrôlable et la crise qui a fait 12 millions de chômeurs dans le pays.

«Je ne pense plus à la crise à cet instant, parce que la crise on la vit toute l’année. Donc on va penser à la joie d’être ici, que ce moment au moins soit un moment de bonheur», déclare à l'AFP-TV Cintia, danseuse de l'école de Tijuca.

Mais la fête est malgré tout l'occasion pour les Brésiliens d'exprimer leur exaspération face à leurs dirigeants.

Défilé des écoles de samba sur le Sambodrome de Rio de Janeiro, le 12 février 2018 [Carl DE SOUZA / AFP]
Défilé des écoles de samba sur le Sambodrome de Rio de Janeiro, le 12 février 2018 [Carl DE SOUZA / AFP]

Ainsi, dès les défilés des premières écoles, les responsables politiques ont été visés.

A commencer par le maire de Rio de Janeiro, Marcela Crivella, un évangéliste honni par les Cariocas pour avoir divisé par deux les subventions des écoles de samba du carnaval le plus spectaculaire au monde.

L'école Mangueira a de son côté visé de ses flèches cet empêcheur de danser en rond dimanche, avec une chanson qui disait notamment : «le péché, c'est de ne pas s'amuser au carnaval».

Le carnaval de Rio   [Gal ROMA / AFP]
Le carnaval de Rio [Gal ROMA / AFP]

M. Crivella, qui avait ouvert vendredi le carnaval en assurant un service minimum, ne fréquentera pas, pas plus que l'an dernier, les tribunes de l'immense sambodrome de plus de 700 mètres de long: il est parti en Europe dès dimanche.

Au même moment, l'école Paraiso do Tuiuti faisait défiler en Dracula le président Michel Temer, accusé de corruption. Le plus impopulaire des présidents brésiliens depuis la fin de la dictature (1985), était représenté avec des billets collés sur des plumes de paon.

Sous une chaleur étouffante, les spectateurs du sambodrome verront dans la nuit défiler la populaire école de Portela, victorieuse ex aequo l'an dernier. L'engouement est tel que la foule s'agglutine autour du sambodrome sur les avenues et les ponts en surplomb.

Les résultats de la compétition seront connus mercredi. Les écoles sont évaluées sur de nombreux critères: chorégraphie, musique, scénographie, beauté des costumes et des chars, rythme auquel elles défilent, ou thème choisi.

Des thèmes très variés, car après l'abolition de l'esclavage, l'empire chinois, ou le très remarqué futur high-tech la veille de Vila Isabel, les écoles vont défiler dans la nuit notamment sur les thèmes de la gastronomie brésilienne, de la fondation de New York ou du matriarcat.

Hormis un char immobilisé la veille, le défilé jusqu'ici n'a pas connu les drames ayant entaché l'édition 2017. Tous les conducteurs de char ont été obligés de souffler dans le ballon après des accidents qui avaient fait un mort et de nombreux blessés l'an dernier.

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