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«Chaise-tigre», «dents de loup», matraques électriques... : l'inquiétant arsenal des centres éducatifs pour musulmans en Chine

181 centres de formation professionnelle strictement réservés aux musulmans ont fleuri aux quatre coins du Xinjiang depuis 2014[AFP]
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Face à la montée du terrorisme islamiste et aux revendications indépendantistes des Ouïghours, minorité musulmane au Xinjiang, les autorités chinoises ont ouvert il y a deux ans des «centres de formation professionnelle».

Objectif annoncé : prévenir le fondamentalisme religieux. Mais les lieux s'apparenteraient en fait à un «goulag» pour musulmans, équipés de divers instruments de torture.

Le Xinjiang, région irrédentiste

Le Xinjiang abrite 11,3 millions de musulmans (soit presque la moitié de sa population totale), des Ouïghours turcophones pour la grande majorité. S'il bénéficie du statut de région autonome, ce territoire de l'ouest de la Chine reste sous la tutelle de Pékin depuis la fin du XIXe siècle, période de son annexion. Entre Ouïghours et Hans, le courant passe peu ou mal. L'instabilité des relations a permis aux islamistes d'infiltrer peu à peu la société Ouïghour et de se greffer au mouvement sécessionniste incarné jusque-là par des autonomistes dits «ethniques». 

Après les attentats du 11 septembre 2001, le gouvernement chinois a décidé d'intensifier sa surveillance au Xinjiang. Révoltes, troubles, attentats... la violence semble monter crescendo depuis 2000. Le 4 août 2008, 16 policiers chinois sont assassinés par deux séparatistes ouïghours. En 2009, Pékin réprime une insurrection à Urumqi. Bilan officiel : au moins 156 morts. Nouvelles violences en 2014 lorsque 29 personnes sont tuées à la gare de Kunming par des Ouïghours. Depuis, Pékin ne lâche pas d'un oeil sa région et demeure décidé à ne rien céder aux Ouïghours.

LES PREMIERS CENTRE DE FORMATION PROFESSIONNELLE DEBARQUENT EN 2014

Pour contrer les revendications sécessionnistes et la montée salafiste, 181 centres de formation professionnelle strictement réservés aux musulmans ont fleuri aux quatre coins du Xinjiang depuis 2014. La télévision d'Etat rapporte que l'admission y est facultative.

Mais la réalité serait tout autre : pour preuve, les prisonniers de droit commun y seraient systématiquement internés... une fois leur peine carcérale purgée. La télé chinoise montre en boucle des images sur lesquelles on découvre des étudiants apprenant le chinois et des métiers du textile ou de l'alimentation. Selon une directive interne de fin 2017, les prisonniers passent aussi du temps «à crier des slogans, chanter des chants révolutionnaires et apprendre par coeur le Classique des trois caractères», un texte d'enseignement confucéen.

En clair, les centres doivent permettre de «couper le renouvellement des générations (de terroristes), leurs racines, leurs contacts, leurs ressources», synthétise un document dévoilé par l'AFP. Quitte à employer la manière la plus forte pour y faire régner l'ordre.

DES PLACEMENTS qui EXPLOSENT et des commandes qui font craindre le pire

On constate une recrudescence du nombre d'internés depuis le printemps 2017. Des rumeurs indiquent que jusqu'à 1 millions de personnes seraient prisonnières, information démentie par Pékin. Reste que les appels d'offres de chaque centre, consultés par l'AFP, semblent bel et bien attester d'une forte population. L'administration chargée du centre de Hotan a ainsi passé récemment une drôle de commande : 2.768 matraques, 1.367 paires de menottes et 2.792 pulvérisateurs de gaz poivre. 

D'autres équipementss, dont la nature a de quoi effrayer, ont été rendus public. Il a par exemple été établi que des gourdins à pointes, surnommés «dents de loup», des matraques électriques et au moins une «chaise-tigre» (pupitre permettant d'attacher les pieds et les mains d'un suspect) ont été commandés pour équiper ces centres.

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