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Etats-Unis : une juge emprisonnait abusivement des enfants depuis 2008 et monétisait cette pratique

Le comté de Rutherford (dans le Tennessee) avait signé des contrats avec 39 autres comtés américains pour héberger des prisonniers mineurs moyennant finance. [Gary Cope / CC Flickr].

En place depuis 2000 à l’unique poste de juge du tribunal pour mineurs du comté de Rutherford dans le Tennessee (Etats-Unis), Donna Scott Davenport était à l’origine d’un immense scandale mêlant un système de répression pour jeunes aussi injuste que lucratif.

Grâce à une longue enquête publiée dans le média américain ProPublica vendredi 8 octobre, le «système de filtre» hors-la-loi mis en place par la juge depuis 2008 afin de donner carte blanche aux gardiens de prison pour l’incarcération ou non de mineurs a pu être révélé.

En 2014, 48% des mineurs présentés devant le tribunal pour mineurs du comté de Rutherford ont été emprisonnés, contre 5% des mineurs dans le reste de cet Etat du Tennessee.

En avril 2016, une bagarre avait éclaté entre 2 jeunes garçons âgés de 5 et 6 ans sur un terrain de basket proche d’une école. Coupables d’avoir été témoin de la scène, 4 enfants noirs âgés de 8 à 12 ans avaient été menottés et transférés en centre de détention au motif imaginaire de «responsabilité criminelle de la conduite d'autrui».

Les familles des jeunes concernés par ce scandale s'étaient réunies afin de déposer un double recours collectif, le premier permettant de recevoir 397.500 dollars (quelque 344.000 euros) d’indemnités compensatoires en 2017 et le second mettant fin «au système de filtre» mis en place neuf ans plus tôt. En revanche, la juge n’a pas été inquiétée, tout comme la chef du centre de détention pour mineurs de l’époque, Lynn Duke.

Les avocats de l’un des jeunes ont estimé que 1.500 enfants ont été emprisonnés à cause du système mis en place par la juge Davenport et que 500 jeunes l’ont été pour des motifs illégaux. Les chiffres avancés n’ont pas tenu compte des arrestations de mineurs effectuées hors du bureau du shérif, ce qui grossirait sans doute l’ampleur du phénomène.

Une activité lucrative pour le comté et la juge

Pire encore que l’ensemble de ce système, la monétisation de ces emprisonnements injustes d’enfants est venue noircir un tableau déjà bien sombre. Le comté de Rutherford avait signé des contrats avec 39 autres comtés américains pour héberger des prisonniers mineurs dans leurs 64 lits pour la somme de 175 dollars, soit plus de 150 euros, par jour.

Une opération scandaleuse qui a permis de gonfler le budget dédié aux services des mineurs, comprenant le personnel des tribunaux et du centre de détention, de 962.444 dollars (soit 831.720 euros) en 2005 à 3,69 millions de dollars (soit 3,189 millions d’euros) en 2020.

Un regain financier qui a permis à la juge Davenport, toujours en poste jusqu’en 2022, de gonfler son salaire annuel à 176.000 dollars, soit 152 095 euros.

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