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Guerre en Ukraine : tout comprendre à la crise des céréales

Les stocks ukrainiens de céréales sont bloqués dans les silos ou dans les ports ukrainiens de Marioupol et Berdiansk, contrôlés par l’armée russe. [ANATOLII STEPANOV / FAO / AFP]
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Alors que la Russie et l'Ukraine représentent 30% des exportations mondiales de blé, la guerre fait craindre une crise alimentaire mondiale. Les Occidentaux accusent Vladimir Poutine de retenir les stocks de céréales.

le rISQUE D'UN «ouragan de famines»

Grenier à blé de l'Europe, la Russie et l'Ukraine sont respectivement les premier et quatrième exportateurs mondiaux. A elle seule, l'Ukraine assure aussi la moitié du commerce mondial de graines et d'huile de tournesol.

Avec la guerre, la paralysie des exportations ukrainiennes et russes a entraîné une flambée des cours des céréales et des huiles, dont les prix ont dépassé ceux constatés au moment des printemps arabes de 2011 et des émeutes de la faim de 2008.

Le programme de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a estimé que 8 à 13 millions de personnes supplémentaires pourraient souffrir de sous-nutrition dans le monde, si la crise durait.

Le secrétaire général de l'ONU a mis en garde contre «un ouragan de famines», essentiellement dans des pays africains qui importaient plus de la moitié de leur blé d'Ukraine ou de Russie. 

les exportations ukrainiennes et russes bloquées

La Russie bloque les ports ukrainiens de la mer Noire, notamment celui d'Odessa, et empêche donc l'exportation de ces céréales. «Actuellement, entre 20 et 25 millions de tonnes de céréales sont bloquées et cet automne ce chiffre pourrait augmenter à 70-75 millions de tonnes», a déclaré le président Volodymyr Zelensky.

Moscou affirme que le blocage n'est pas de sa faute, ni le résultat de la présence de sa flotte de guerre au large de l'Ukraine. Vladimir Poutine met en cause le minage des ports ukrainiens par Kiev et affirme que «la situation s’est aggravée en raison des restrictions anti-russes imposées par les Etats-Unis et l’Union européenne».

Le chef d'Etat russe estime en effet que la Russie ne peut plus vendre ses céréales et ses engrais en raison des sanctions occidentales touchant les secteurs financiers et logistiques.

«Le blé est une arme diplomatique pour Vladimir Poutine. La Russie a connu une très bonne récolte avec plus de 87 millions de tonnes de blé mais pour l’instant les sanctions empêchent de sortir ce blé comme Moscou l’entendrait. Et donc Vladimir Poutine fait un chantage en disant : levez les sanctions et nous pourrons exporter notre blé», analyse pour TV5 Monde Arthur Portier, spécialiste du marché agricole.

LA RUSSIE ACCUSÉE DE VOL de céréales

Les Occidentaux accusent la Russie de piller les céréales ukrainiennes pour les revendre «à son profit». Selon les responsables ukrainiens, une grande partie des denrées volées transitent par camion vers les ports contrôlés par la Russie, notamment Sébastopol, en Crimée occupée depuis 2014.

Des images satellites prises au-dessus de la péninsule montrent des tonnes de céréales être chargées par les Russes dans des navires qui ont accosté plus tard en Syrie. La Russie semble aussi revendre à l'Afrique. Selon le New York Times, Washington a averti mi-mai 14 pays, principalement africains, que des cargos russes transportaient des «céréales ukrainiennes volées».

Au total, le ministère de l’agriculture ukrainien a estimé en mai que 500.000 tonnes de blé avaient déjà été «volées» par Moscou.

une médiation dans l'impasse

Après sa rencontre avec le chef de l'Union africaine Macky Sall, Vladimir Poutine a mentionné la possibilité d'exporter en passant par les ports ukrainiens de Marioupol et de Berdiansk. Conquis par les forces russes, ils sont situés sur la mer d'Azov, qui donne accès à la mer Noire. «Nous sommes prêts à offrir un passage sécurisé aux bateaux utilisant ces ports, y compris aux bateaux ukrainiens», a-t-il déclaré.

En coopération avec la Turquie, la Russie a aussi proposé de mettre en place des corridors sécurisés au départ des ports de la mer Noire toujours sous contrôle ukrainien, notamment celui d'Odessa. Mais pour cela, Moscou a exigé que les eaux de ces ports soient «déminées». Craignant que les forces russes n'en profitent pour attaquer Odessa, Kiev a rejeté le plan russo-turc, exigeant la fourniture d’armes de défense côtière et l’implication de navires de l’OTAN en mer Noire.

Parmi les autres voies possibles, selon Vladimir Poutine : un transport sur le Danube via la Roumanie, la Hongrie, la Pologne ou «le plus facile, le moins cher», via le Bélarus, à condition de lever les sanctions occidentales contre ce pays.

Alors que les tentatives de médiation russo-ukrainiennes n'ont rien donné de satisfaisant, Kiev a entamé des discussions avec la Pologne et les pays Baltes pour exporter de petites quantités de céréales par les chemins de fer.

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