En direct
A suivre

Mutilations génitales féminines : 5 idées reçues sur ces violences faites aux femmes

Les mutilations sexuelles féminines sont reconnues au niveau international comme une violation des droits fondamentaux des femmes et des filles. [NICOLAS TUCAT / AFP]

Ce mardi 6 février marque la Journée internationale de tolérance zéro à l'égard des mutilations génitales féminines. De nombreuses idées reçues circulent sur ces pratiques qui concernent des millions de femmes dans le monde.

Parfois mortelles, toujours traumatisantes, les mutilations sexuelles féminines concernent 200 millions de femmes dans le monde, selon les estimations de l'Unicef.

Méconnues, elles sont souvent décrites comme des pratiques marginales et circonscrites au continent africain, alors même qu'elles existent dans 31 pays et menacent 4 millions de jeunes filles chaque année.

La Journée internationale de tolérance zéro à l'égard des mutilations génitales féminines, ce mardi 6 février, vise justement à sensibiliser le grand public sur ces violences, reconnues au niveau international comme une violation des droits fondamentaux des femmes et des filles. La lutte contre ces pratiques passe notamment par la déconstruction des idées reçues à leur sujet.

L'excision est la seule forme de mutilation existante

Le sujet des mutilations sexuelles féminines (MSF) est souvent traité sous le seul prisme de l'excision, mais l'Organisation mondiale de la santé (OMS) distingue en réalité quatre types d'atteinte.

Le premier concerne la clitoridectomie, qui correspond à une ablation partielle ou totale du clitoris. L'excision représente le type 2 et renvoie aux pratiques visant à couper n'importe qu'elle partie de la vulve. Il est question d'une mutilation rituelle, souvent pratiquée sur des bébés, enfants ou adolescentes et qui aboutit à l'ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres, avec ou sans mutilation des grandes lèvres.

Appartenant au type 3, l'infibulation est un «rétrécissement de l'orifice vaginal par ablation et accolement des petites lèvres et/ou des grandes lèvres, avec ou sans ablation du clitoris». Enfin, les formes «non classées» de mutilations sexuelles féminines sont regroupées dans le type 4 qui rassemble «toutes les autres interventions nocives ou potentiellement nocives pratiquées sur les organes sexuels féminins à des fins non thérapeutiques».

Le mot «excision» est aujourd'hui devenu un «mot-valise», souvent utilisé pour désigner les mutilations sexuelles féminines dans leur globalité. Cela s'explique par le fait que les mutilations de type 2 sont les plus pratiquées dans le monde et donc les plus connues du grand public.

En dehors de ces quatre types de mutilations, d'autres sévices sont infligés aux femmes dans le même but, à savoir contrôler leurs corps et leur vie sexuelle. C'est notamment le cas du repassage des seins qui consiste à écraser la poitrine naissante des jeunes filles à l'aide d'une pierre ou d'autres objets chauds voire brûlants. Selon Plan International France, cette pratique est fréquente au Cameroun, où une fille sur quatre serait touchée.

Il n'y a pas de victimes EN FRANCE

D'après l'étude «Estimation du nombre de femmes adultes ayant subi une MSF vivant en France», d'Armelle Andro et Théo Lombart, il y aurait environ 125.000 femmes adultes ayant subi une mutilation sexuelle en France au milieu des années 2010.

Cette même enquête indique qu'environ 530.000 femmes victimes de ces pratiques vivent sur le territoire de l'Union européenne et environ une femme excisée sur 2 vit en France ou au Royaume-Uni.

Les estimations de l'Unicef montrent que la majorité des femmes excisées vivent dans 30 pays d'Afrique et du Moyen-Orient et que 5% d'entre elles sont en Europe, dont environ 53.000 résidant dans l'Hexagone.

Seules les communautés africaines sont concernées

Si les mutilations sexuelles féminines sont effectivement pratiquées dans certains pays d'Afrique, les données de l'association Excision, parlons-en ! montrent qu'elles existent aussi en Asie, au Moyen-Orient et en Amérique du Sud. La Malaisie, l'Indonésie, l'Irak, l'Inde, le Pakistan sont cités, mais aussi la Colombie et le Pérou.

L'association ajoute que tous les pays d'Afrique ne sont pas concernés, puisque l'excision ne «serait» pas pratiquée au Maroc, en Algérie, en Tunisie, en Libye, en Guinée Equatoriale, au Gabon, au Congo, au Cabinda, au Rwanda, au Burundi, en Angola, en Namibie, en Zambie, au Mozambique, au Malawi, au Zimbabwe, au Botswana, au Swaziland, au Lesotho, en Afrique du Sud, à Madagascar ou dans les Comores.

Par ailleurs, ces mutilations «persistent parmi les communautés de la diaspora dans les pays où elles ne sont pas traditionnellement pratiquées». Elles se produisent donc également en Europe, aux Etats-Unis, au Canada et en Australie.

Excision, parlons-en ! ajoute que l'excision était pratiquée auparavant en Europe de l'Ouest et aux Etats-Unis et n'a été que tardivement abandonnée. Jusqu'à la fin des années 1960, elle y était pratiquée pour contrôler la sexualité des femmes et pour traiter ce qui était à l'époque considéré comme des «maladies» : l'hystérie, la masturbation, l'homosexualité ou même de réelles pathologies comme l'épilepsie et les troubles mentaux.

L'excision n'a pas de conséquences à long terme

La zone génitale étant très innervée et très sensible, les douleurs ressenties pendant et après l'excision sont extrêmes. Les mutilations sexuelles féminines sont la plupart du temps infligées sans anesthésie et le suivi des soins est souvent insuffisant. Ces conditions précaires favorisent les hémorragies, la transmission du VIH ou les infections, pouvant mener à la stérilité voire à la mort. 

Les douleurs peuvent persister tout au long de la vie et, dans certains cas, les femmes victimes sont confrontées à des problèmes urinaires et menstruels. Devenues adultes, les petites-filles excisées sont confrontées à des complications sérieuses durant la grossesse et l'accouchement. Selon Excision, parlons-en !, des études ont montré que les mutilations sexuelles des mères augmentent le risque de décès des nouveaux-nés.

De nombreuses victimes de mutilations sexuelles féminines font également part du traumatisme psychologique que représente ces pratiques. La vie sexuelle peut elle aussi être affectée, avec des douleurs, une sensibilité amoindrie et une diminution du plaisir.

Une victime d'excision ne peut pas avoir une sexualité épanouie

Si les mutilations sexuelles féminines peuvent avoir de lourdes conséquences sur la vie sexuelle des victimes, cela ne veut pas dire qu'elles sont condamnées à renoncer à leur sexualité. Le niveau de sensibilité accessible varie en fonction des cas et de l'étendue des mutilations mais, avec l'accompagnement psychologique et sexologique adéquat, les victimes peuvent retrouver une vie de femme épanouie.

La chirurgie reconstructrice est également proposée à celles qui le souhaitent. Depuis 2004, grâce au travail de l'urologue français Pierre Foldès, il est même possible de reconstituer le clitoris. Réduisant les douleurs et permettant à certaines femmes d'atteindre l'orgasme, ces interventions constituent un progrès mais la présidente d'Excision, parlons-en !, Ramata Kapo, insiste auprès de CNEWS sur le fait qu'il n'y a pas de miracle.

«Il ne faut pas vendre aux femmes qu'il suffit d'une opération et que vous appuyez sur un bouton et tout revient comme avant [...] Je dis toujours aux femmes qu'il faut faire le deuil de ce que vous avez perdu [...] Ce qu'on reconstruit c'est ce qu'il reste, ce qu'on vous a enlevé a été enlevé à vie. Le plus important c'est d'être accompagnée psychologiquement et au niveau de la sexualité.»

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités